Chalon dans la rue

CHALON DANS LA RUE : Hop hop hop, et hope !

CHALON DANS LA RUE : Hop hop hop, et hope !

Désopilant, joyeux, émouvant : dans la programmation On de Chalon dans la rue se cachent des pépites, celle-ci, "Hop hop hop !", se joue encore demain et samedi à 11h30, rue de l'Oratoire, emplacement 62, ne vous en privez pas.

Trois comédiens, 18 femmes et hommes en situation de handicap mental, et 2 éducateurs , ont bossé dur pour nous offrir un moment de pur bonheur autour des questions cruciales et si sensibles des territoires, des espaces divers dans lesquels toute vie évolue, se ressource, et grandit, le tout appuyé sur une histoire de frontière gardée par deux douaniers qui voient se pointer un car de migrants.

Tout commence par des massages, par du contact, par du corps. Ancrage des uns avec les autres : la vie, c'est d'abord du corps, en effet, et du lien.
Mais la vie en sociétés, gouvernées par des États, c'est aussi du contrôle, et ça y va à la manœuvre. "Et ça contrôle, et ça contrôle". On sait bien que plus il y a de contrôles, moins il y a de vie à contrôler, c'est un fait. Cependant la vie têtue trouve toujours, comme des filets d'eau qui serpenteront encore entre deux cailloux, des chemins, aussi ténus soient-ils, pour se faire droit à elle-même.
Les 18 comédiens handicapés, soutenus et accompagnés par leurs éducateurs, y excellent, tant ils restent, par le force des choses peut-être, et peut-être pas, au ras du moment. Et ils bougent, et ils dansent, et ils sont refoulés par un douanier cynique qui relaie le message du gouvernement : "Mesdames, messieurs, le gouvernement et moi-même, on est désolés de la situation de votre pays. (...) Pour des raisons indépendantes de notre volonté, nous sommes obligés de fermer notre frontière. Merci de votre compréhension."
Le pays de Savabien, qui n'a besoin que de trois immigrés, mais surtout pas d'un homme de théâtre ("C'est dangereux pour la nation."), rappelle qu'on est prié de ne pas confondre "travail humanitaire" et "actions inconsidérées".

Richard Frech, dont c'est le troisième spectacle monté avec des adultes souffrant de handicap mental, a réussi sa mayonnaise : ramener les arcanes politico-administratives à leur expression de base, dans un contexte d'actualité où les questions de savoir ce qu'on fait aux autres (et ce que ça nous fait en retour) et ce qu'on a envie de vivre aussi sont parfaitement escamotées, étouffées. Ceux qui viennent nous le dire et nous le danser savent de quoi ils parlent. Et ils restent joyeux, comme des cœurs simples qui nous donnent une occasion d'être fiers les uns des autres.



Florence Saint-Arroman