Chalon dans la rue

CHALON DANS LA RUE 2017 : Joyeux vent de révolte rue fructidor

CHALON DANS LA RUE 2017 : Joyeux vent de révolte rue fructidor

Au début du XXème siècle, éclatait « l’affaire des Vermiraux », à la suite d’une révolte d’orphelins placés dans une institution privée du Morvan, suivie d’un procès retentissant, à l’issue duquel des adultes seront pour la toute première fois en France condamnés pour sévices sur enfants et autres joyeusetés. Cette affaire, le poignant spectacle de la Compagnie des Ô et Théâtre Sarbacane le met joliment en scène. Et, malgré le sujet pas forcément réjouissant, cela déborde de vie, d’espoir, de fantaisie. Une incitation à la résistance et à la révolte contre le désordre établi qu’il faut assurément voir !

« Nous étions presque tous des enfants de putes chez Madame Rosa »… Les lecteurs de Romain Gary ont sans doute reconnu là l’une des toutes premières phrases de La vie devant soi, un roman qu’il avait écrit sous le pseudonyme d’Emile Ajar et qui racontait l’enfance pas toujours gaie du jeune Momo.

A l’orphelinat des Vermiraux, les gosses ne sont pas des enfants de putes mais, comme le nom du lieu l’indique, des orphelins. Des orphelins qui, en 1910, se révolteront, pour ne plus sévir les mauvais traitements et sévices qui étaient leur lot quotidien.

Cette révolte et ce quotidien, c’est ce que le spectacle de la Compagnie des Ô et Sarbacane théâtre met intelligemment en scène, en donnant la parole à trois orphelins : Azolan, Basque et Fracasse. Des orphelins qui n’ont pas la langue dans leur poche. Comme le Momo de Gary, avec toutefois un langage un peu moins fleuri, ils racontent ce qu’il se passait aux Vermiraux ou, plutôt, ce qu’il ne s’y passait pas… L’absence de livres, tant et si bien qu’ils furent contraints de voler le Capitaine Fracasse de Théophile Gautier, à l’occasion d’une visite chez le préfet… La tyrannie et le sadisme de celle qu’ils appellent « la vilaine »… La crasse du lieu où « y a des toiles d’araignée que les araignées elles sont mortes depuis longtemps »… Le dressage des têtes et des corps, façon Surveiller et punir, de Michel Foucault… La résignation à ce que grandir veut dire (« glisser ses petits doigts délicats dans les engrenages du monde… se les faire broyer par le poids de la connaissance jusqu’à ce qu’on ne sente plus rien… »)...

Tout ce qu’ils racontent est souvent drôle, parfois touchant, quelques fois triste. Mais, toujours, derrière les mots, se cachent une envie de vivre qui n’aurait pas déplu à Nietzsche. Et, aussi, une forme de poésie. Car au détour d’une aventure ou d’une autre, les mots détachent régulièrement de l’horreur dépeinte en toile de fond  ce qu’il y a de plus beau à y voir, comme avec Michel-Ange qui, ayant vu un ange dans le marbre, disait avoir "juste ciselé pour l’en libérer".

Samuel Bon

Infos pratiques :

Compagnie : Ô et Sarbacane théâtre

Spectacle : Fracasse ou les enfants des Vermiraux

Lieu : rue fructidor (juste à côté de l’ancien cinéma Vox)

Horaire : 11

Date : samedi 21 et dimanche 22 juillet

Durée : 1 h 15