Chalon sur Saône

Linda de Suza, cette artiste persuasive à la beauté intérieure brillante comme un diamant

Linda de Suza, cette artiste persuasive à la beauté intérieure brillante comme un diamant

Sa vie n'a pas toujours été rose -doux euphémisme!-, mais l'hyper attachante Linda de Suza communie toujours avec son public à l'aide d'échanges costauds et d'émotions palpables, et ce besoin viscéral s'est manifesté à nouveau ce vendredi 19 mai au Parc des Expos de Chalon-sur-Saône. Celle qui a sorti treize albums studio et un en live, ainsi que quatre ouvrages, dont La valise en carton en 1984 et Des larmes d'argent en 2015, a terminé avec force enthousiasme les deux représentations du spectacle On a toujours vingt ans. Interview pour info-chalon.com

 Dans quel état d’esprit êtes-vous à l’heure actuelle ?

«Dans la vie, il ne faut pas se prendre au sérieux, et j’ai hâte, le public me manque tellement ! Je n’ai jamais, jamais, jamais quitté la scène, et là c’est quelque chose de très important et intéressant, parce que l’on est un groupe d’artistes. On va rencontrer les gens qui ont aimé tel artiste, c’est un mélange, donc personne ne part gagnant. On est là pour amuser. »

Vous intégrez le spectacle On a toujours vingt ans. Est-ce simplement une étape de plus, où êtes-vous particulièrement réjouie ?

« Je suis pleine de joie et impatiente, comme un enfant qui attend son gâteau, son bonbon, je ne tiens plus en place… »

Quelles sont les chansons que vous interpréterez à partir du 19 mai à Chalon-sur-Saône ?

« Il faut être fidèle. La chanson Le Portugais bien sûr, c’était le premier titre, en 1978. Et puis, pour amuser tout le monde, Tiroli-tirola, avec lequel j’ai vendu près de trois millions de quarante-cinq tours, c’est pas mal, pas seulement en France, au Portugal et un petit peu partout ! Il y aura également L’étrangère. Ces chansons me tiennent à cœur par rapport à l’accueil de l’inconnue que j’étais, la petite femme de chambre qui venait à peine de quitter son aspirateur. On m’a changé l’aspirateur par un micro ; avant, j’aspirais des poussières, et là, j’aspire le cœur des gens, c’est pas mal ! Il ne faut pas qu’un homme politique s’accapare cette expression (rires) !

De toutes vos chansons, avec laquelle avez-vous le plus d’affinités ?

« Une maman, qu’elle ait un enfant, ou cinquante, ou deux , ou trois, ou quatre, elle les aime tous. J’aime toutes mes chansons. J’ai un de mes petits gamins, j’en ai plein autour de moi, qui connaît toutes mes chansons depuis qu’il est tout petit. Ce gamin se prénomme Olivier, il habite à Lyon, et parfois il répond à des questions suivant les chansons. Ca serait bien qu’un jour vous interviewiez et puissiez créer un journal des interviews, pas des fans, parce que je n’aime pas ce mot ? J’aimerais bien savoir ce qu’il aurait répondu sur mamã Linda. Car avec eux je me fais appeler mamã Linda. J'ai une chanson qui s’appelle Qu’est-ce que tu sais faire,parce qu'on me posait souvent la question, mais moi je dis dans cette chanson : Qu’est-ce que je sais faire à part veiller, à part aimer ? Je pense que c’est pour ça que je n’ai jamais été mariée, et que je ne me marierai jamais, car à part être maman je ne sais pas faire grand-chose. Comme je le raconte dans mon livre La valise en carton, quand on est venu me chercher à l’orphelinat, j’avais onze ans, et je m’occupais de la maison, de mes petits frères et sœurs, j’allais à la Soupe populaire parce qu’on était très pauvres et qu’ il fallait manger. A part aimer et nettoyer la maison, je ne sais pas faire grand-chose. C’est ce qui m’est resté par rapport à la chanson aujourd’hui. C’est une bonne récompense que le Bon Dieu m’a donnée, d’avoir plein d’enfants qui m’aiment, c’est génial, et qui ont grandi avec moi, parce qu'aujourd'hui ils sont eux-mêmes parents. »

Comment êtes-vous considérée au Portugal, vous qui vivez en France depuis très longtemps ?

« Je n’en sais rien. Les gens sont adorables, vous savez, ils ont passé il y a quelques jours une émission sur moi au Portugal, et il paraît que c’était très, très émouvant. Alors, vous voyez, au bout de tant d’années, ce n’est pas mal ! Voulez-vous que je vous fasse un aveu ? C’est la première fois que je vais le dire : je fais toujours attention à ma coiffure, mon maquillage, si la robe va bien, etc. pour le respect du public, mais je ne regarde jamais, jamais, jamais, une émission sur moi. J’ai peur de me décevoir, vous comprenez ? Il y a un proverbe que j’ai appris en France : Loin des yeux, loin du cœur. Quand je ne regarde pas, ça ne me touche pas au cœur. On est là pour donner du bonheur aux gens. »

Culturellement parlant, quelles sont les grandes différences entre votre pays natal et La France ?

« J’ai eu mon premier disque en 1978, j’étais déjà en France, car je suis arrivée à la fin des années 60. En 1970 j’avais mon premier numéro de Sécurité sociale, donc je ne peux pas vous mentir, et j’avais à peine vingt-deux ans. Je connais mon histoire, mes racines, je suis toujours très proche de ce qui se passe au Portugal, mais je me suis cultivé ici, mais sans oublier d’où je viens. Comme la fidélité est ma marque de fabrique, je ne voulais pas décevoir les Français qui m’aiment, mais j’ai gardé ma nationalité. Pourquoi changer si les Français m’ont aimée comme ça ? Ca, c'est ma façon de faire, je ne dis pas que les autres doivent le faire. J’ai les mêmes droits, parce qu’aujourd’hui nous sommes dans l’Europe. Au Portugal il y a beaucoup de Français qui gardent leur nationalité. Je suis Portugaise, et il faut me supporter comme ça (rires). »

Quels rapports avez-vous entretenu et entretenez-vous avec tous les publics ?

«C’est la fidélité, et il faut leur demander, parce que nous ne sommes rien sans eux ! Qu’est-ce que vous pensez de Linda, de Sheila ou de quelqu’un d’autre ? Quels sont les rapports avec la Linda de Suza d’avant ? On n’a pas la chance d’être en contact avec tous les gens qui nous aiment, ils viennent de partout, et après quand ils viennent nous voir en gala, ils nous disent : « Ah, je vous suis depuis telle année ! », mais moi je n'ai pas eu de contacts avec eux. Quand je vois mes voisins ou vais en courses, quand on me fait un sourire, ça fait chaud au cœur, et puis j’aime bien les embrasser. Lorsque je vais au garage pour ma voiture, je fais un bisou, je suis très bisous, très famille, très mamã. Ca résume tout. »  

Etre artiste, avec ses hauts et ses bas, ça doit vous marquer à tout jamais ?

«S’il y a des hauts et des bas, ça nous touche, mais c’est la vie, c'est comme ça, comme une affaire, une société. Ca s’en va, ça revient, il y a des modes, des choses qui changent. Il faut accepter la vie avec solennité. Regardez les gens de l’usine Renault qui menacent de tout faire péter parce qu’on les abandonne. Vous avez vu, en politique, sans donner de noms, ils sont prêts à tout, pour acquérir un pouvoir, se bousculent, sont prêts à trahir leur parti pour aller vers un autre...Nous, nous restons fidèles. » 

Espérez-vous rebondir après la tournée On a toujours vingt ans, ou mettez-vous simplement à profit le moment présent ?

« Je profite de la vie, du moment présent comme vous venez de le dire, mais à mon âge, vous vous rendez compte, les années passent, comme pour tout le monde. On ne peut pas être et avoir été ! Il faut laisser un petit peu la place. Regardez. Madame Edith Piaf, jamais il ne sera possible de ne pas penser à cette dame, ce petit moineau. Et Dalida, quelle femme extraordinaire ! Tout ce que je demande, après toutes ces années, c'est d'avoir une petite place dans le cœur de ceux qui m'aiment. « 

 

Photos fournies par Fabien Lecoeuvre Organisation

Propos recueillis par Michel Poiriault

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