Elan Chalon

Dominique Juillot, président de l’Elan Chalon : «Il ne faut pas que l’exceptionnel devienne banal»

Dominique Juillot, président de l’Elan Chalon : «Il ne faut pas que l’exceptionnel devienne banal»

Alors que l’Elan Chalon est installé dans le «Top 3» du championnat de Pro A de Basket, Dominique Juillet nous a accordé une interview. Il parle avec passion, dit ce qu’il a sur le cœur…
«On impose notre façon de jouer, on domine techniquement».
«Si on bat Strasbourg au Colisée et que l’on va gagner au Mans, alors oui on sera considéré comme un favori...»

En début de championnat et notamment après la défaite à domicile contre Nancy, envisagiez-vous de vous retrouver en haut du classement en ce ce mois de décembre ?

Dominique Juillot : «Non, assurément. On avait cependant perçu depuis le début de saison que cette équipe avait de toute évidence moins de talents individuels, mais une alchimie collective meilleure…»

Et aujourd’hui quel bilan tirez-vous, qu’est-ce qui vous séduit ?

«Ce que je n’avais pas perçu, c’était la capacité de Fall à dominer comme il domine sous le cercle. C’est vrai qu’il y a longtemps que je crois en ce garçon. Ce qui est incroyable c’est qu’on ne nous parle plus de Booker qui a quand même terminé MVP de la saison.
Cette équipe de l’Elan est composée de joueurs qui sont en train de se révéler…»

Comme Axel Bouteille par exemple ?

«Bouteille est dans une ascension normale. Mais il a encore beaucoup de marge de progression. Peut-être même qu’il ne soupçonne pas. Il a besoin de mieux solidifier son jeu, d’être encore plus volontaire. Je suis forcément et volontairement un peu sévère avec lui. Axel est aujourd’hui le dépositaire de la formation chalonnaise et j’ai une vraie affection pour ce garçon qui a déjà bien grandi avec nous.
Et puis, il y a aussi Clark. Il est en train d’exploser. Roberson, lui, tutoie le sommet de son art. Et c’est tellement fort que ce n’est pas au détriment des autres. Ce sont là des exemples de l’alchimie collective que je mets en-avant».

«On maîtrise le tempo»

 

Sentez-vous les germes d’une grande saison, comme celle de 2012 ?

«Non je ne peux pas dire cela…»

…Vous voulez la jouer modeste ?

«Non, car le championnat n’est pas établi. Dans ce championnat 2016-2017, il y a Monaco et actuellement nous la bonne surprise. Mais je le dis, Villeurbanne, Strasbourg, Le Mans ne sont pas à leur place. Ils ont les moyens financiers que l’on n’a pas sur un marché des joueurs tellement serré.
Figurez-vous que le Maccabi de Tel-Aviv a quand même appelé Rémy Delpon pour se renseigner sur Justin Brownlee, qui n’est quand même pas la star des stars…»

Oui mais quand même, l’Elan marche sur l’eau depuis quelques semaines…

«Peut-être qu’il peut se passer quelque chose… Comme en 2012, j’ai le sentiment qu’on maîtrise le tempo. On impose notre façon de jouer, on domine techniquement. Mais attention, on n’est encore pas à la mi saison».

Comment abordez-vous le match contre Strasbourg ?

«Il ne faut surtout pas se fier au classement du club alsacien. Il n’est pas à sa place. Le jour où dans cette équipe ça va jouer ensemble, ça va faire mal. C’est une équipe à redouter, tout autant que l’ASVEL…»

«Ce qui m’a fait plaisir dans les propos de Vincent Collet...»

 

ASVEL que vous avez très largement battue…

«Oui c’est vrai. Il faut bien comprendre que l’on est dans une période où on a besoin de tests pour y croire. C’est vrai que si on bat Strasbourg au Colisée et que l’on va gagner au Mans, alors oui on sera considéré comme un favori pour le titre. Déjà gagner un des deux ce serait un exploit.
Dire que ça sera difficile de battre Strasbourg, ce n’est pas du bluff. Ce qui m’a fait plaisir dans les propos de Vincent Collet, c’est qu’il a dit qu’à Chalon ce n’est pas la première saison qu’on se trouve aussi haut…»

Et cela vous touche ?

«Oui, vraiment. 20 ans de Pro A, c’est le travail de tout le monde pour être dans la 1ère partie du classement. Ce n’est pas banal, c’est même plutôt extraordinaire et pourtant on est toujours obligé de prouver. Il ne faut pas que le banal soit un échec. Chalon-sur-Saône c’est la deuxième plus petite agglomération du championnat, ce sont les plus petites subventions, pour un budget de plus de 5 millions d’euros. Je n’ai changé que trois fois d’entraîneur. Jean-Denis Choulet est en train de prouver que l’on est capable de défendre, quand l’année dernière on brillait dans la raquette adverse. Le recrutement qui a été réalisé est opportun. On est crédible et on veut le rester».

Nous l’avons dit, Bouteille est en pleine montée en puissance. Vous avez peur qu’il parte ?

«Il sera en fin de contrat à la fin de saison. Il doit intégrer que c’est sans doute de son intérêt de rester dans un contexte où il peut s’épanouir, avec en plus de l’affectif, car Axel est un peu comme mon fils…»

Cinq de l’Elan retenus pour le Alls Stars Game, c’est une reconnaissance ?

«C’est surtout une grande fierté. Mais je note qu’ils sont nombreux à briller après être passés par l’Elan. Nicolas Lang, David Michineau, Joffrey Lauvergne, Mathias Lessort, Clint Capela… la liste est longue».

«L'Elan c'est un club du bien commun»

 

L’Elan Chalon est-il un club à part ?

«Je ne sais pas. Mais je voudrai qu’ailleurs, dans le département, en Bourgogne, on soit fier de ce que collectivement il s’est passé ici. La réussite n’est pas tombée du ciel. Elle a été suscitée, encouragée. Je vous assure, être encore obligé d’expliquer ce que l’on fait, notre volet social, c’est parfois fatiguant pour ne pas dire décourageant.
Comme quand l’administration nous demande d’appliquer chez nous ce qu’elle ne fait pas ailleurs. Cela alors même que pas une seule fois on a été pris en défaut financièrement. Parce qu’on respecte tout, on nous pose des questions. Ici il n’y a pas d’actionnaire majoritaire, là pour faire du fric. Non ici, à l’Elan, il y a plein de gens. L’Elan Chalon c’est un club du bien commun. Avec 40 salariés, 500 licenciés, 300 entreprises de toute taille à nos côtés».

Certains connaisseurs du sport vous comparent à Jean-Claude Hamel, l’ancien président de l’A.J.Auxerre. Vous souscrivez ?

«Je prends cela comme un très beau compliment. Hamel il est venu à l’AJA par passion. Il a gravi les marches en faisant progresser son club. Cela me plait. Chez nous, à l’Elan, il y a des gens qui sont rentrés il y a 20 ans et qui sont toujours là. Et on va continuer. On va embaucher deux personnes sur la partie digitale…»

Comment faut-il construire l’avenir ?

«On a une très belle salle. Mais on doit gagner de la place pour accueillir les gens dans de meilleures conditions. C’est trop serré pour 1000 VIP. Il faut que tout le monde comprenne cela, comprenne que c’est bien pour la ville, le département, la région qu’il y ait de plus en plus de monde. Des gens qui prennent du plaisir dans une période pas si drôle. Il n’y a pas à créer des polémiques là où il n’y en a pas».

Votre rêve aujourd’hui c’est quoi ? Remporter un nouveau titre, on bien avoir l’assurance que l’Elan sera encore là dans 20 ans ?

«La plus grande récompense c’est la progression linéaire que l’on a eue, sans à coups. Ce club s’est installé dans le haut niveau et ce n’est pas banal. Il ne faut pas que l’exceptionnel devienne banal dans la tête des gens. Bien sûr qu’un titre ce serait formidable. Mais construire et assurer l’avenir c’est tout aussi important».

Recueilli par Alain BOLLERY
(Photos Manon BOLLERY)