Faits divers
TRIBUNAL DE CHALON - Alcoolisé, il étrangle sa fille...
Publié le 18 Décembre 2017 à 20h43
Vendredi dernier, les parents avaient bu, encore. Quand il a trop bu, le père se comporte mal avec ses enfants, alors les filles (Jeanne, 17 ans, et Valérie, 15 ans) sont au taquet. Vendredi dernier, la soirée dégénère, les parents se disputent. Jeanne, excédée par l’attitude de son père a confisqué les bouteilles d’alcool qui étaient dans la cuisine, puis elle a voulu saisir la bouteille de Ricard qu’il descendait petit à petit. Il l’a très mal pris, il a fini par immobiliser sa fille en lui ceinturant le cou de son bras. Elle a manqué d’air. A l’hôpital elle est en état de choc. 8 jours d’ITT.
Valérie avait filmé le début de la scène, et quand Jeanne, étranglée par son père lui a crié d’appeler les gendarmes, elle s’est exécutée. Choquée elle aussi, elle fait une crise d’asthme ensuite. Les gendarmes de Dommartin-les-Cuiseaux ont entendu tout le monde, et escortent Christian G., 43 ans, pour qu’il réponde, en comparution immédiate, de « violence commise par une personne en état d’ivresse manifeste suivie d’incapacité, en récidive ». En 2014 la justice était déjà passée. C’est la fille aînée, Sylvie, qui fut victime cette année-là. Christian a dû engager des soins, et bilan ? « Pendant 18 mois je les ai suivis, j’ai eu des cachets contre l’alcool et j’ai vu un psychologue. Pendant 2 ans ça m’avait bien calmé, et puis je me suis relâché. – Monsieur, vous n’êtes pas obligé d’être contraint par le tribunal pour poursuivre des soins, intervient la présidente Aussavy. – Peut-être que moi, si. »
Cette famille, dont aucun membre n’est présent à l’audience en dehors du prévenu, semble vivre dans les turbulences depuis plusieurs années. La maman boit aussi. Les filles ont été placées un moment suite aux violences de 2014 : « Oui, et elle a fait quoi ? Elle n’a pas apprécié, elle ne veut pas y retourner », lance le père. « Monsieur G. a eu du mal à accepter la condamnation et il a eu du mal à donner du sens à la mesure », avait écrit le CPIP lors du sursis mis à l’épreuve. Tout le monde a du mal, donc, y compris avec l’AEMO (assistance éducative en milieu ouvert), dira maître Ravat-Sandre qui intervient pour l’administrateur ad-hoc de Jeanne, « la famille n’en comprend pas le sens, les éducateurs ont du mal ».
Tout le monde a du mal, et a eu mal, et se fait mal. « Son père était violent avec sa mère, lui aussi, petit, il s’est interposé », explique maître Mirek pour Christian G. « Monsieur a adopté un ton larmoyant vendredi soir pour demander à sa fille, vendredi soir, qu’elle ne porte pas plainte contre lui. Il joue sur la corde sensible, c’est une sacrée malhonnêteté, tout ça pour prétendre qu’elle ne vous en veut pas. Elle a souffert physiquement, elle a eu un instant de panique quand elle a manqué d’oxygène, et elle souffre moralement car elle sait qu’il y aura des conséquences judiciaires, elle n’a pas à penser que ça serait de sa faute. » Maître Ravat-Sandre demande des dommages et intérêts pour la jeune victime. « C’est une famille à bout de souffle, dira madame le procureur. La pathologie de monsieur, son addiction à l’alcool, est devenue ingérable et peut devenir meurtrière. Pour protéger monsieur contre lui-même il faut une contrainte extrêmement forte (Christian G. acquiesce), et il faut protéger ses filles. » Maître Mirek, qui a des choses à dire pour défendre cet homme qui s’estime devenu « indéfendable », relève que certes, il a arrêté les soins, mais qu’un juge avait bien consenti à la main levée des dits-soins, et comment cet homme-là pouvait-il interpréter les choses autrement que « ça va » ? « Il ne tarit pas d’éloge sur ses filles, il a honte, il dit ‘c’est moi qui n’assure pas’. »
Ce fut, vendredi dernier à Contal, la scène de trop pour la compagne qui a fait savoir au tribunal qu’elle ne veut plus de ce couple. Lui, il explique qu’il a une solution de repli dans sa caravane, qui serait hébergée dans la grange d’un de ses oncles.
Le tribunal condamne Christian G. à 18 mois de prison dont 9 mois assortis d’un sursis mis à l’épreuve de 2 ans. Interdiction de paraître au domicile de Jeanne, obligations de soin et de travailler. Le tribunal ne décerne pas de mandat de dépôt mais ordonne l’exécution provisoire : les obligations du SME prennent effet immédiatement, il n’est donc plus question pour Christian de rentrer chez lui. On le verra passer plus tard devant le palais de justice, seul, allant d’un pas très lent, tête nue sous la pluie. La présidente lui avait demandé : « Vous aviez conscience que vous auriez pu la tuer ? »
FSA
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