Grand Chalon

Le Grand Chalon a arrêté hier soir son projet de plan local d’urbanisme intercommunal

Le Grand Chalon a arrêté hier soir son projet de plan local d’urbanisme intercommunal

Au menu du conseil communautaire du Grand Chalon, ce mercredi soir, pas moins de 48 points. Sur ces derniers, l’un d’entre eux a particulièrement occupé les représentants des communes au sein de la communauté d’agglomération.

« L’habitude nous joue des tours… ». C’est ce que fredonnait Maxime Le Forestier dans l’une de ses plus belles chansons : « La rouille ». Pas faux, à vrai dire. En effet, hier soir, l’habitude a joué de tours à certains élus du Grand Chalon qui, pensant que, comme d’ordinaire quand il a lieu à Chalon, la réunion du conseil communautaire du Grand Chalon se tenait dans les salons du Colisée, alors qu’elle était programmée à la salle Marcel Sembat, étaient un peu « à la bourre », à tout le moins « border line » niveau ponctualité.

Mais qu’on se rassure, toutes celles et tous ceux qui avaient prévu de faire acte de présence hier soir sont arrivés à temps pour se confronter à ce qui, sur les 48 points à l’ordre du jour*, était indéniablement le gros morceau d’un conseil communautaire qui a duré un peu plus de 3 heures : le bilan de la concertation et l’arrêt du projet de plan local d’urbanisme intercommunal** (PLUi, point 27). Un projet dont le processus a été lancé le 12 février 2015.

Sébastien Martin : un projet qui est « un symbole de la maturité de notre territoire »

Le secrétaire de séance désigné, c’est fort logiquement que les conseillers communautaires se sont attelés à discuter directement le point qui arrivait…en 27ème position dans l’ordre du jour, consacré au PLUi. Une discussion lancée par une intervention du président du Grand Chalon, Sébastien Martin, sorte d’introduction à la présentation opérée par Dominique Juillot (vice-président).

« C’est un dossier extrêmement important », a d’emblée déclaré Sébastien Martin, avant de souligner que, « dans la vie des élus », un projet tel qu’un PLUi constitue l’ « une des responsabilités les plus passionnantes », « un temps fort de l’intercommunalité ». Puis il s’est félicité que le Grand Chalon soit « une des premières intercommunalités de cette taille, en tout cas en Bourgogne Franche-Comté », en passe d’adopter son PLUi. C’est, a-t-il souligné, « un symbole de la maturité de notre territoire », beaucoup plus « qu’un document de papier », dans tous les cas un sujet que les habitants du Grand Chalon se sont approprié, grâce au travail des 37 maires de la communauté d’agglomération et plus particulièrement de celui de certains de ses vice-présidents, qu’il a tenu à remercier : Dominique Juillot, Landry Léonard, Eric Mermet, mais aussi Isabelle Dechaume, qui a apporté sa pierre à l’édifice quand elle était encore membre de l’exécutif du Grand Chalon.

Ce projet, a poursuivi Sébastien Martin, c’est « une mise sur le papier d’une volonté partagée », reposant sur des principes forts : une harmonisation des diversités du territoire et non pas une uniformisation ; la liberté, c’est-à-dire, pour Sébastien Martin, la capacité de « conduire son action sous l’égide de règles ». Et, « forts de ce document qui permet de mettre en œuvre notre vision », a précisé Sébastien Martin, le Grand Chalon va pouvoir en finir avec l’étalement urbain, si bien que « l’on saura quand on passe d’une commune à une autre », car il y aura « une vraie transition ».

Grâce à « ce document dont toutes les communes ont tour à tour tenu le crayon servant à le rédiger », c’est, a ajouté Sébastien Martin, « une dynamique gagnant-gagnant » qui a été à l’œuvre. Tant et si bien qu’il pouvait hier soir achevé son mot d’introduction avec cette conclusion : « jamais, je n’ai ressenti de volonté, ni des uns ni des autres, de tirer la couverture à soi. Et je vous remercie d’avoir permis de rendre possible » que ce PLUi « respecte l’esprit communautaire ».

Dominique Juillot : « un travail lourd et passionnant »

Avant de présenter plus en détail le projet, Dominique Juillot a souhaité rappeler les origines et la méthode suivie pour arrêter le projet de PLUi. Autrement dit, faire le point sur « un travail lourd et passionnant », qui a duré 3 années. Car, à l’écouter, il a fallu des années « pour élaborer collectivement un document respectant les spécificités et différences de notre territoire, mais aussi un état d’esprit », celui ayant pour objectif de « rendre ce territoire harmonieux ».

Réunions avec les maires, registres, réunions publiques avec les habitants du territoire, expositions, permanences, séminaires avec les partenaires, réponses à pas moins de 400 demandes de particuliers en plus des échanges informels et des nombreux appels téléphoniques… Pour Dominique Juillot, cela ne fait pas l’ombre d’un doute : l’information a été large et a concerné à la fois le grand public mais aussi les acteurs institutionnels, les professionnels de l’aménagement et de l’habitat, le monde associatif. Et tout ce travail a permis de définir les orientations du Projet d’aménagement et de développement durables (PADD), en matière d’urbanisme, d’habitat, de déplacements, d’environnements et d’économie, pour les 10 prochaines années. Un projet que l’on retrouve dans le zonage du futur PLUi, que les élus devaient donc arrêter ce mercredi soir, qui répond aux grands axes, donc, du PADD.

En matière d’urbanisation, il prend en compte, a souligné Dominique Juillot, sur la base d’un power point projeté sur deux écrans, les besoins en logements, en assurant a minima le renouvellement de la population des communes. Ce qui se traduit par le renforcement de la ville-centre et des centres-bourgs. Par ailleurs, il préserve les surfaces agricoles, notamment en prévoyant une valorisation de la diversité des activités (viticulture, maraîchage, etc.) et un soutien aux exploitations existantes.

La méthode de son élaboration et son contenu présentés, Dominique Juillot a ensuite indiqué les prochaines étapes et échéances à venir. Le projet, une fois arrêté, sera communiqué pour avis aux communes et aux partenaires. Il sera ensuite soumis à enquête publique au printemps 2018. Après l’intégration des résultats de cette dernière, le projet de PLUi devrait être approuvé par le conseil communautaire, mi-2018.

Avant de laisser la parole aux élus qui souhaiteraient la prendre, Dominique Juillot a souhaité préciser que ce document, « sincère et fidèle », « n’est pas une fin en soi ». Puis, faisant état du plaisir qu’il a éprouvé à travailler avec toutes et tous, à s’imprégner de l’histoire de chacune des communes du Grand Chalon, qu’il n’ignorait tout de même pas en raison de ses anciennes fonctions de président du Grand Chalon, Dominique Juillot a terminé sa présentation en remerciant « extrêmement chaleureusement » les services du Grand Chalon, ainsi que « les secrétaires de mairie de chacun des communes ».

Mourad Laouès : « plutôt satisfait » du projet, mais trop de « réserves » pour ne pas s’abstenir

Les contours du projet de PLUi définis, la parole a donc été laissée aux élus souhaitant s’exprimer ou procéder à d’éventuelles remarques. Le premier à l’avoir demandée est l’un des élus du groupe Convergence, l’écologiste Mourad Laouès. Si celui-ci a débuté son propos en se déclarant « plutôt satisfait » du travail accompli, il n’en a pas moins souhaité émettre quelques réserves.

La première d’entre elles concernait « la gouvernance ». Pour lui, il y a eu « quelques manques ». « En effet », a-t-il développé, alors que le PLUi intègre de nombreux enjeux, les déplacements, l’adaptation au changement climatique, etc., je constate que des associations spécialisées n'ont pas été associées aux groupes de travail dès le début. Une autre vision des enjeux, d’autres idées, ne peuvent que bénéficier au territoire. Mais la co-construction en amont des projets, et d'une manière générale, le dialogue environnemental, est une culture qui a encore du mal à s'installer dans la politique française à tous les niveaux de décisions ». Une autre réserve de sa part a quant à elle concerné la méthode retenue et appliquée : « un travail en lien avec l'élaboration du PCAET aurait certainement mieux valorisé le PLUi comme outil stratégique au service de l'adaptation au changement climatique. Cet aspect n'est pas assez mis en avant alors qu'on s’apprête à définir l'aménagement du Grand Chalon pour les 15 années à venir dans une perspective d'économie des ressources, de prévention des risques comme les inondations et d’une amélioration du cadre de vie. J'anticipe à ce titre, une proposition qui devrait s'inscrire dans les futurs règlements : la mise en place d'un ‘’coefficient d’occupation végétale’’ qui, en introduisant du végétal dans les projets d'aménagements permet d'atténuer les effets ‘’îlots de chaleur’’, en milieu urbain dense, notamment lors des canicules ». La dernière de ses réserves concernait plus particulièrement les décisions à prendre aujourd’hui : « si j’ai bien compris, Mr Le Président, vous nous demandez de nous prononcer sur une demande de dérogation visant à autoriser l'urbanisation dans des zones auparavant classées en zones agricoles, naturelles ou forestières. C’est en contradiction totale avec la lutte contre l'étalement urbain. Alors que le PLUi est un outil innovant qui doit accompagner la résilience des territoires, on ne peut pas prolonger des règles qui ont conduit à la vulnérabilité de nos territoires. Je rappelle juste que l’étalement urbain est responsable de la disparition de l’équivalent d’un département français tous les dix ans au détriment des terres agricoles, avec les conséquences environnementales que l'on connaît trop bien. J'aurais préféré voir plutôt des pistes pour tendre vers l'autosuffisance alimentaire du Grand Chalon. De plus, une telle dérogation serait un recul pour une politique visant prévenir le risque inondation alors que c'est un problème majeur pour l'agglomération. Quant aux espaces naturels et forestiers, ils sont indispensables pour le stockage des GES, pour réguler les températures, pour permettre aux nappes phréatiques de se régénérer, pour protéger la biodiversité. Pour ne citer que cet exemple, qui a de multiples répercussions, les trois quarts des insectes européens ont disparu en 30 ans. Vous comprendrez alors que je m’abstienne dans ces conditions ». Autant de réserves qui, a-t-il conclu, conduisaient à s’abstenir d’arrêter le projet de PLUi. Et autant de réserves que se sont employés à lever Landry Léonard et Sébastien Martin, qui n’a surtout souhaité retenir de l’intervention de Mourad Laoues que le début de son intervention, à savoir qu’il était « plutôt satisfait » de ce projet. Avant de préciser que, si « nous ne répondons peut-être pas à 100 % de vos exigences », « il y a, ici, une avancée dans les objectifs qui sont les vôtres ».

Jean-Noël Despocq : « le travail collectif engagé dans notre collectivité du Grand Chalon n’est pas le reflet d’un débat constructif dans certaines communes de notre agglomération »

A la suite de Mourad Laoues, c’est un autre conseiller communautaire du groupe convergence, Jean-Noël Despocq, qui a souhaité procéder à quelques remarques : « sur ce dossier spécifique du PLUi, je souhaiterais faire un petit retour en arrière pour ce qui concerne la commune de Saint-Marcel. Lors de l’élaboration du PLU de 2004 à Saint-Marcel, le maire de l’époque, Roger Leborne, a proposé la création d’une commission spéciale regroupant les élus de toutes tendances, les représentants du monde agricole et horticoles, des artisans, des commerçants et, naturellement, du monde économique pour faire le diagnostic et se projeter sur l’évolution de notre cité. Aujourd’hui, nous parlons d’un PLUI et je salue le travail qui a été fait sur le précédent mandat et la continuité des échanges qui se sont déroulés depuis ces trois dernières années au sein de notre agglomération. Pour autant, ce travail collectif engagé dans notre collectivité du Grand Chalon n’est pas le reflet d’un débat constructif dans certaines communes de notre agglomération. Depuis le début de ce mandat, les élus de la minorité de Saint-Marcel ont été écartés des commissions thématiques, ne pouvant donc participer à la réflexion que vous avez souhaité mettre en place. En début d’année 2017, j’ai proposé la création d’une commission pour l’élaboration du PLUi sur notre commune. J’ai reçu une fin de non-recevoir. Site à la réunion publique de septembre, où des informations ont été présentées sur la commune de Saint-Marcel, j’ai renouvelé ma demande écrite cette fois auprès de Monsieur le Maire pour réunir l’ensemble des élus du conseil municipal, afin de nous exposer les évolutions et les différents changements de zonages sur notre territoire. Je vous livre sa réponse, qui en dit long sur le débat au sein de notre assemblée : ‘’Concernant le PLUi, celui-ci est en cours d’élaboration et devrait être adopté fin 2017, après une phase d’enquête publique, pour entrer en vigueur en 2018. Je ne peux donc que vous inviter à participer activement à cette enquête. De nombreux documents sont également en ligne sur le site du Grand Chalon’’. Autrement dit : ‘’Circulez, il n’y a rien à voir’’. » Des remarques qui ont conduit Jean-Noël Despocq à préciser, à la fin de son intervention, qu’il ne pouvait dès lors que s’abstenir. Une abstention qu’a immédiatement regrettée Sébastien Martin, de façon assez lapidaire : « prétexter une situation communale pour s’abstenir sur le projet de PLUi, ça en dit long ».

Christophe Sirugue : « des phrases m’ont fait grand plaisir, lorsque j’ai lu les documents relatifs au PLUi »

A la suite de Mourad Laoues et de Jean-Noël Despocq, c’est Christophe Sirugue qui a demandé la parole, pour s’exprimer au nom du groupe Convergence. Se joignant dans un premier temps aux propos et aux remerciements à l’égard des services du Grand Chalon et des personnels des communes, ainsi qu’envers les élus, celui-ci a déclaré que « ce document qui nous engage, pour longtemps, est important ». Aussi important que « les efforts, déployés depuis de nombreuses années ». Il contient des « pistes intéressantes, même s’il recèle quelques suggestions de potentielles créations de zones commerciales », qui le laissent perplexe, « l’interpelle fortement ».  Revenant sur l’habitat, celui-ci a considéré qu’ « on n’aura pas d’apport de population substantiel ». Aussi, 4 000 constructions de logements, alors que 4 000 sont vacants et que l’on peut au mieux tabler selon lui sur 2 000 personnes en plus, cela ne pouvait que le laisser dubitatif. Suffisamment en tout cas pour inviter tout un chacun à garder cette problématique en tête. Continuant en direct son analyse du projet, Christophe Sirugue est revenu sur les « avancées en matière d’inondations », ces « inconvénients à maîtriser », qui lui semblent « bien pris en compte dans le document ». Relevant au passage que des phrases élogieuses à l’égard de réalisations qui lui sont imputables, telles que le Bus à haut niveau de service (BHNS), très critiqué au moment des élections municipales de 2014, parsemait les documents à l’ordre du jour, Christophe Sirugue en a profité pour dire « le plaisir » qu’il avait éprouvé à leur lecture. Enfin, abondant dans le sens de Jean-Noël Despocq, mais de façon plus globale, l’ancien président du Grand Chalon a relevé que s’il y avait bien eu une concertation avec les maires, « force est de constater qu’avec les élus minoritaires », il n’y en avait guère eu. D’où l’abstention du groupe convergence.

Pour répondre à Christophe Sirugue, c’est à nouveau Sébastien Martin qui a pris la parole. En matière de logements, a-t-il souhaité préciser, « je ne me satisfais pas d’une logique de gestion des stocks » de logements. Quant à la place des élus minoritaires au sein même des communes, il n’a « pas à s’immiscer » dans de telles relations, a-t-il ajouté. D’une manière plus générale, a-t-il conclu, « l’intercommunalité n’est pas un espace comme les autres, pas un espace de petite politique politicienne ». Une façon de dire, peut-être, que la fin de l’intervention de Christophe Sirugue était pour lui hors de propos.

Plus personne ne demandant la parole, le projet a été mis aux voix. Comme annoncé lors des débats, les élus du groupe convergence, minoritaire, s’est abstenu. Du moins une partie de celui-ci... En effet, certains maires n'ont pas tout à fait suivi cette ligne, se singularisant donc au sein de l'opposition, peut-être pour le plus grand plaisir de Sébastien Martin. Quoi qu'il en soit, le projet a été arrêté, aucun autre élu n’ayant voté contre.

Samuel Bon 

*Sur ces 48 points, 21 concernaient des « rapports sans présentation », très vite abordés et réglés, en fin de séance.

** Un document  d’urbanisme qui,  à  l’échelle  d’un  groupement  de communes (EPCI) ou d’une commune, étudie le fonctionnement et les enjeux du  territoire, et vise à construire  un  projet  de développement durable et le formalise  dans  des  règles  d’utilisation du sol. Un document qui ne fait pas toujours des heureux et qui, pour cette raison, s’avère souvent l’objet de recours (juridiques), prospérant devant le juge en raison de vices de forme.