Opinion de gauche

"2017 : le peuple condamné à choisir son prochain souverain" pour le NPA71

La constitution de 1958, mère de la 5ème République, scellait le sort d'une démocratie française aux abois et le retour de l'homme providentiel de la "libération". Presque soixante ans plus tard, cette apologie du sauveur suprême, le temps de l'élection présidentielle, n'a pas pris une ride. Avec le concours complaisant et même complice de l'industrie médiatique, ce rite "démocratique" qui s'est mué en une bataille scénarisée entre "Machiavels" et "Judas", entretient l'illusion d'une souveraineté populaire, d'une expression citoyenne inaliénables.

Pour autant, même si cette illusion est cultivée par toute la chaîne médiatique, de plus en plus de citoyen(ne)s se détournent de cette "politique spectacle" qui installe alternativement deux grandes dynasties, la droite libérale et la gauche libérale. Deux dynasties qui font mine de se faire la guerre afin de préserver le vieux clivage identitaire, mais qui ont bien du mal aujourd'hui à afficher des différences, ayant intégré sans retenue la matrice de la globalisation capitaliste.

Et les Le Pen, Macron, Mélenchon qui veulent se distinguer par leurs "prêches" anti-système sont les faire valoir de ces deux grandes familles qui règnent sans partage dans cet espace politique dévasté. Mais en quoi ces "insoumis" proposent-ils une issue nouvelle, un changement ? Tous les trois se sont auto-proclamés et s'auto-congratulent à longueur de "shows", au centre, sur leur tribune, entourés par leurs supporters médusés et d'une meute de journalistes à genou. Comme les Sarkozy, Juppé, Hollande, Valls, ils parlent à la première personne du singulier.

Leurs slogans respectifs : "les français d'abord" pour la matronne du FN, "la finance d'abord" pour l'ancien banquier, "l'humain d'abord" pour le trublion des plateaux télé, sonnent faux et renvoient en écho "un moi d'abord !" tonitruant. Il n'est pas question ici de mettre sottement dans le même sac Jean-Luc Mélenchon et Marine Lepen. Si nous devons dénoncer farouchement les trahisons du gouvernement Hollande-Valls, les surenchères extrêmes-droitières des postulants "Républicains", le projet national-raciste du FN, nous ne pouvons rester muets face aux dérapages souverainistes, anti-migrants, de celui qui veut incarner "la gauche insoumise".

Toutes les dérives langagières, les propos outranciers, sont autant de "buzzs" médiatiques prémédités qui font désormais office de programmes politiques, de projets de société. Comme ils ne veulent pas changer en profondeur le paradigme de cette société inégalitaire, ils trouvent des boucs émissaires pour vanter l'exigence du repli sur soi et apparaître ainsi comme "les sauveurs de la patrie en danger".

Ce choix de la personnalisation du pouvoir, certes à des degrés différents, tous l'approuvent intimement. La 5è République, même si certains veulent creuser sa tombe, pendant cette séquence de la campagne présidentielle, leur offre la fortune de se projeter en nouveau monarque à jamais gravé dans le marbre de la postérité. Un rapide inventaire des règnes successifs des Mitterrand, Chirac, Sarkozy et Hollande ne peut qu'attester cette triste sentence.

Comme ils n'acceptent pas la contradiction, ils ont viré les conseillers politiques et enrôlé des experts en communication pour vendre, susciter la célébration de leur image. Ces rois de la République qui salissent la "démocratie", humilient les "sans dents", distinguent "les bons migrants des mauvais", ne méritent pas notre obligeance et encore moins nos suffrages.

En mai 2017, la dynastie de "la droite dure" des Juppé-Sarkozy récupèrera probablement le trône. La voie ultra-libérale, sécuritaire et identitaire initiée par la "gauche molle" des Hollande-Valls sera poursuivie et sûrement même durcie.

Au NPA, nous pensons que le changement par les urnes, "la révolution par les urnes", est un processus, une stratégie politique professés par ceux qui finalement ne veulent pas bousculer, renverser l'ordre établi. Un miroir aux allouettes. Comme nous avons pu l'observer en Grèce avec Syriza, en Espagne avec Podemos, l'espoir du changement massivement exprimé dans les urnes a été brutalement déçu. Nous l'expliquons depuis de nombreuses années, "prendre ses affaires en main" ce n'est pas confier son destin à quelques professionnels de la politique, confirmés ou en devenir, parés de tous les atours du sincère révolutionnaire. "Prendre ses affaires en main" c'est prendre collectivement le contrôle sur l'ensemble des décisions, à toutes les échelles, dans les différents espaces qui organisent la société (culturel, professionnel, économique, politique...), dans les différents temps qui rythment et qui imposent la démocratie.

Ce message, ce projet, c'est celui que veut porter humblement le NPA durant cette campagne des présidentielles. Puisqu'il fallait un représentant "singulier", un candidat, c'est Philippe Poutou qui a été désigné. Mais à travers lui, c'est le mouvement social dans toutes ses luttes passées et actuelles qui est représenté (contre les réformes des retraites, la loi travail, les licenciements, la criminalisation de l'action syndicale, les projets inutiles qui menacent l'environnement, les exclusions...)(pour le partage des richesses, le partage du travail, produire et consommer selon nos besoins, la régularisation des sans-papiers, la libre circulation des personnes, un monde respirable...). Nous savons tous que ce combat ne s'arrête pas aux frontières du pays. Le sort de tous les travailleurs, au moins à l'échelle européenne, est intimement lié aux directives libérales de la Commission bruxelloise à la botte des grands groupes financiers. En 2005, très majoritairement nous avons rejeté cette "Europe de l'argent et du profit", mais les urnes n'ont pas pesé très lourd face aux intérêts supérieurs du capital.

Sauf à vouloir se résigner et accepter passivement le délitement des solidarités, de toutes les cohésions humaines et sociales, nous ne pouvons rester les bras croisés. Ce souverain qui sera installé "démocratiquement" en 2017, comme ceux qui règnent partout en Europe, nous devons les "détrôner" et offrir en alternative nos valeurs, notre fraternité, notre projet. Tout le reste n'est que babillages, forêts de papier journal abattues pour le bonheur des grands groupes de presse, propagandes mensongères qui engraissent les mandarins en coulisse (Bolloré, Bouygues...).

Prenons nos affaires en main. Le temps presse !

"Pour changer la vie, il faut d'abord changer la vie politique." Pierre Bourdieu (1998).

 

Jean-Guy Trintignac NPA 71