Chalon sur Saône
Samuel Hercule, comédien et réalisateur du spectacle " (super) Hamlet" se confie à info-chalon.com
Publié le 16 Mars 2014 à 16h17
Avec la Compagnie La Cordonnerie, Samuel Hercule était en représentation à Chalon dans le cadre du rendez-vous des Piccolis, organisé par l'Espace des Arts.
Samuel Hercule, bravo pour ce spectacle ! Tous ces jeux… vous jouez sur scène ce qui se passe dans le film, et dans ce film les comédiens jouent une pièce de théâtre, et des poupées jouent une scène du passé…
Samuel Hercule : Oui, on a voulu cette mise en abyme, la pièce dans la pièce, la mise en abyme aussi de notre travail. C’est un jeu de miroir.
Vous avez les miroirs sur scène, c’est l’image dans l’image et sur l’écran également, tout va en profondeur, mis en perspective
Oui, c’est notre travail, chercher dans cette profondeur ce que cela veut dire pour le spectacle. Le projet de vidéo est quelque chose de fini et solide, et il y a la partie en live plus fragile. Le travail de la compagnie, c’est d’abord l’adaptation d’un texte connu, d’en faire un film. C’est un énorme travail, humain et technique. Quand le film est fini, l’équipe devient plus restreinte, on cherche alors comment raconter sur scène et on travaille avec les musiciens et les techniciens.
Une adaptation, à deux moments différents…
Une première relecture du texte, Hamlet de Shakespeare. Là, on sort un autre spectacle à partir de Hansel et Gretel qui commence la semaine prochaine à Villefranche.
Un conte ! Pouvez-vous nous en parler ?
Oui, c’est ce qu’on aime. On a fait auparavant Frankenstein, mais on était parti d’adaptations, les films qui ont été faits sur le sujet sont presque plus intéressants et on s’en était inspirés. Ici Shakespeare est une œuvre colossale, compliquée à comprendre. Etre, ne pas être…
Ici, dans votre spectacle, il y a les comédiens sur scène qui jouent dans le moment présent. Le film montre les comédiens qui jouent des scènes du passé, les poupées également. Cette idée philosophique du sens et du temps est-elle présente dès le départ dans votre création ?
Comme on joue nous-mêmes dans les films et qu’on fait les représentations parfois 10 ans plus tard, nous avons vieilli. Ainsi ce qu’on a filmé en 2006, on le joue encore, mais vieillis, c’est intéressant de voir ça. Il y a le temps du tournage, le temps qui passe, c’est proche de la thématique d’Hamlet. La question centrale dans cette œuvre théâtrale est celle-ci : quel est le sens de nos vies ?
Comment s’écrit le scénario du film ? Vous travaillez en duo, vous et Métilde ?
On l’écrit à partir d’une œuvre choisie, on travaille en couple. Il y a Timothée qui occupe une place essentielle, la musique. C’est la 3e personne de la Cordonnerie.
Il a une place importante dans les spectacles, pour sa sensibilité. Il transmet bien l’émotion. La technique est complexe, c’est compliqué à mettre en place, ce sont des spectacles pointus. Il faut que ce soit malgré tout discret car on raconte une histoire t on veut provoquer l’émotion chez le spectateur. La musique soutient les émotions.
Il y a des effets techniques incroyables, comme l’éclair dans la salle !
Au début, on faisait un petit éclair qui éclairait un pu le premier rang, mais un jour on a dû jouer dans une petite salle et la lumière a éclairé toute la salle, c’était un bel effet, on a gardé l’idée.
Ca réveille bien, car on part sur une histoire qu’on connait, et d’un coup, cela réveille tout le monde ! Toute la salle, les élèves, ont frémi !
C’est sûr, ça tranche ! On voulait casser la barrière entre la scène et le public, intégrer le public dans la scène.
Les bruitages que vous faites sur scène avec ces objets, ce sont des trucs classiques de cinéma, ou des inventions ?
Une façon de faire qui nous est propre ! De la brocante sonore ! Quand le film est fini, on fait les brocantes, on ramène plein d’objets qu’on étale sur toutes les tables, puis on cherche comment les utiliser pour que ça marche et que ce soit marrant sur scène.
Le film est muet, ce sont des plans-séquences. Vous vous inspirez du cinéma muet ?
Sur la caméra il y a bien sûr la prise de son automatique, mais on ne s’en sert pas, sauf comme aide-mémoire pour se rappeler d’une phrase d’un dialogue. Nos références sont plutôt Hitchcock pour l’ambiance à la fois glaciale et élégante, et puis par rapport à la réalisation, dans les mouvements de la caméra, les plans de caméra. Et aussi les petits films d’animation. Les films muets, les Chaplin, nous inspirent plus pour la nouvelle création de Hansel et Gretel.
Un mot sur cette nouvelle création ?
On a imaginé des personnes âgées, deux magiciens qui occupent la caravane de leur fils, ils rencontrent une sorcière qui mange les vieux. Pourquoi les vieux ? Parce que de nos jours, tout est centré sur l’enfant, on ne peut plus parler d’enfants qui seraient en danger d’être abandonnés. Mais les vieux parents qu’on abandonne oui. Cela soulève la même question que pour Hamlet, quel est le sens de nos vies et techniquement dans le film et le spectacle ce qu’on va en faire, ce qu’ils apportent. C’est important d’en parler au jeune public. Ce sont les mêmes thèmes que le conte : l’abandon, les bonbons, la sorcière, un monde à eux.
Vous êtes réalisateur, comédien, vous faites le scénario, voix/bruitage. C’est beaucoup de choses à la fois, une formation particulière ? On apprend tout cela sur le tas ?
Ma formation initiale est celle de comédien, c’est le plus important. Très tôt j’ai réalisé des courts métrages. J’ai suivi une formation dans une compagnie qui est comme une école privée, qui a duré deux ans, on était 11 comédiens, une sorte de compagnonnage et on jouait tout le temps. Le bruitage de scène n’existe pas. La mise en scène prend de plus en plus de place. C’est important et difficile car il ne faut pas que cela nuise à la narration. Au début on cachait les objets du bruitage, peu à peu on les a mis sur scène, c’est complètement intégré au spectacle. L’attrait de l’image est le plus puissant.
C’est vrai que le spectateur est attiré par l’histoire filmée, mais on regarde tel endroit de la scène -la musique, puis le bruitage, la voix, tout cela tour à tour. En fait, on devrait venir voir le spectacle plusieurs fois pour goûter chaque aspect de la création.
Vous revenez cet été à Chalon ? Une ville qui vous plaît ?
Oui, on reviendra pour voir le festival. Mais on est tout le temps en tournée, jamais le temps de voir un spectacle. Pas le temps non plus de se poser, de réfléchir, de prendre un temps pour soi.
Votre compagnie est une production, coproduction, subventionnée ?
Produire est compliqué, à chaque fois, c’est compliqué. Ce sont des coproductions. Ce spectacle, 5 coproductions, mais Hansel et Gretel, 3 seulement. Heureusement, les théâtres sont toujours prêts à nous accueillir. Ce spectacle a nécessité un budget de deux cent mille euros. On tourne beaucoup, cela permet de dégager les marges de production. On joue 60 fois entre février et mai. Barbe bleue se joue depuis 10 ans. Tous les spectacles sont disponibles à la demande.
Merci Samuel Hercule, pour l’interview et le spectacle
S.B.
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