Chalon sur Saône
La Centrafrique vue par l’un des siens vivant en France
Publié le 17 Juin 2014 à 18h20
Centrafricain résidant en France depuis le milieu des années 2000, dans un premier temps pour des études d’ingénierie de développement local jusqu’en 2005 (à l’Université catholique de Lyon d’abord, puis à l’université de Lille 1), Norbert, Chalonnais à partir de 2007, ne renie pas pour autant sa patrie. Il suit même scrupuleusement son évolution, et revient sur les maux et troubles qui affublent un pays qu’il lui tarde de retrouver, dans lequel vivent femme et enfants. Tôt ou tard, à l’entendre il ne saurait d’ailleurs en être autrement.
La genèse
Au sortir des enseignement reçus, l’actuel travailleur de la cité de Niépce regagna ses pénates pour une période de trente-huit jours, nanti d’une bourse d’études sous l’égide d’une société d’ingénierie italienne, une O.N.G. axée sur l’humanitaire et l’assistance aux petites et moyennes entreprises. Mal lui en prit ! « Je suis arrivé au mauvais moment. Tout m’est tombé dessus à cause d’un proche, je ne m’y attendais pas », confie celui qui lors de son cursus français, avait effectué un stage au Bénin. D’où, notamment, des supputations quant à la nature sous-jacente de ses déplacements…Fort heureusement, la société transalpine devait le tirer de ce mauvais pas en l’exfiltrant. A une échelle autre, l’embrouillamini qui emmène sous les fourches caudines quantité de ses concitoyens révèle-t-il un mal profond ? « C’est une longue histoire, mais les derniers événements sont partis du régime en place, avec le général François Bozizé. Pasteur de l’église céleste, il s’est appuyé sur sa confession religieuse pour motiver les volontaires. Ca a pris un caractère religieux. Il a pris le pouvoir grâce à un coup d’Etat. Il y a eu plusieurs contestations en 2011. Suite à ça, plusieurs mouvements de rébellion ont vu le jour, dont un d’obédience musulmane. C’est celle-ci, avec le concours extérieur en hommes et en armes de gens d’origines tchadienne et soudanaise, des mercenaires, qui a reconquis des territoires en partant du nord, et en progressant, s’est rapprochée de la capitale. Il y a bien eu les accords de Libreville l’an dernier, un semblant de partage du pouvoir, malheureusement il n’a pas été respecté, avec des postes bien précis pour les rebelles, sauf que dans les faits ces gens ne représentent rien. Cette rébellion a attaqué, et pris la capitale. Le régime a été renversé le 24 mars 2013. » Dans cette opposition confessionnelle, selon Norbert, les musulmans sont une minorité (autour de 15%), chrétiens et animistes se partageant les 85% restants. »Il y a aussi l’amalgame avec le conflit. Là-bas le catholicisme est normal, l’islam est une religion étrangère », dissèque Norbert. Il poursuit son analyse. « Cette rébellion a vaincu le pouvoir et installé les siens à tous les postes importants. Il n’y avait plus d’argent dans les caisses, donc les mercenaires se sont servis de choses de valeur et sont rentrés chez eux. A côté de ça il y a eu des comportements qui ont presque donné raison à Bozizé. Dans certaines régions, fin 2013, on demandait aux chrétiens de ne pas manger de porc. Il y avait une espèce de tribunal populaire où on jugeait. Les clivages chrétiens-musulmans ont commencé : pillages, brimades…avec les règles de l’islam. Ces tribunaux ont créé des malaises, surtout parmi la jeunesse. Pour sensibiliser la population il a été fait appel à un groupe d’auto-défense : les Anti-Baraka. »
Une purification ethnique et religieuse
« Loin des yeux, loin du cœur » n’est pas sa maxime préférée. En effet la distance ne saurait être rédhibitoire. « J’ai régulièrement des nouvelles, je suis même hyperactif sur les réseaux sociaux, où je sais qu’il y a des groupuscules. On s’écrit, certaines personnalités ont des pages Facebook, on les taquine un peu. Ceux qui sont au pouvoir lisent ces commentaires et réagissent des fois », raconte Norbert. Quid du présent ? « Le nouveau régime a dissous toutes les institutions. Il y a maintenant des organes de transition, dont un s’appelle « C.N.T. » (Conseil National de Transition). Il y a vraiment selon moi, n’ayons pas peur des mots, une purification ethnique et religieuse. Au fond, ceux qui s’en prennent aux musulmans sont majoritairement de l’ethnie (il y a plus de 200 ethnies en Centrafrique) de l’ancien président Bozizé. Celui-ci a dissimulé certains arsenaux militaires dans les régions, et des opérations sont menées dont le noyau est constitué d’anciens militaires professionnels. «
Ce pays reste, et restera pour toujours l’élu de son cœur
D’une nature à prendre les choses du bon côté, Norbert croit dur comme fer à un retour à l’équilibre. « C’est mon pays, je réagirai chaque fois qu’il le faudra. Je milite pour un changement. Il faut vraiment des dirigeants libres et démocratiques. Tel que c’est parti nous allons y arriver. L’O.N.U. va déployer 12.000 personnes, c’est prévu, d’ici septembre. Je suis optimiste pour la suite. Franchement, mon avenir est là-bas. » Les potentialités sont énormes. « C’est un pays immensément riche, un grand territoire où vivent 4,5 millions d’habitants, avec beaucoup de jeunes. Un des premiers atouts est la terre, avec l’avantage d’être situé dans une zone équatoriale. A Bangui, la capitale, il pleut 8 mois sur 12. C’est un pays à découvrir avec un climat un peu doux, un peu lourd par moments, mais ce n’est pas désertique. Rien à voir avec le Sahel ! Les richesses du sous-sol ne sont pas exploitées. Il y a un point noir : l’enclavement. » Le hic est personnifié par l’encadrement « Malheureusement il n’y a pas eu de bons dirigeants », déplore-t-il. Et le devenir attise bien des convoitises. « L’avenir du pays est l’une des raisons de cette crise. Il y a des enjeux géostratégiques qui sous-tendent les réseaux que les gens alimentent. Par rapport aux événements il y a une période charnière où la situation humanitaire s’est dégradée. »
La France, cette bienfaitrice inégalable
Le coup d’Etat dans la nuit du 4 au 5 décembre 2013 pour la reprise du pouvoir, occasionnant 100 morts, avec l’ancien président parti en exil à l’étranger, a fait l’effet d’un pétard mouillé. Il y a eu des représailles, et la situation s’est dégradée. « Heureusement que la France est intervenue, parce que si ça n’avait pas été le cas, ça aurait été pire que le Rwanda. On parlerait de représailles envers la population civile. La France est arrivée au bon moment, et Hollande a précipité les choses. Malgré tout l’armée française a été dépassée par les événements du fait de ses effectifs insuffisants. N’étant pas en nombre, elle n’a pas pu contrôler toutes les zones de conflit. Les Français sont passés tout de suite à la phase de désarmement, ça s’est mal passé…En désarmant les rebelles musulmans au pouvoir ils ont laissé les assaillants rebelles s’infiltrer dans la population civile, et là, il y a eu une autre phase de carnage… »De quelle manière les Centrafricains perçoivent-ils la France ? « Elle représente le père, le grand frère, la mère. On est vraiment obnubilé par elle, riche, généreuse, pourvoyeuse d’aide, prête à nous aider en cas de pépin, pays des droits de l’homme… C’est aussi la solution à tous les problèmes de cette ancienne colonie française dans la conscience collective, et quand ça ne marche pas, on dit que c’est la France qui bloque. Là-bas tout est basé sur le droit français », définit Norbert. Plus sibyllin, il met à l’occasion un bémol. « Parfois, on se révolte contre le père. En ce qui concerne, par exemple, Areva et l’uranium. » Avant d’extrapoler un tantinet : « Il y a une partie d’ombre entre la France et les pays africains. Les régimes changent en France, mais pas la manière de traiter avec les Africains… »
Michel Poiriault
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