Chalon sur Saône

La réforme pénale en débat au sein de la Ligue des droits de l’homme à Chalon-sur Saône

La réforme pénale en débat au sein de la Ligue des droits de l’homme à Chalon-sur Saône

Jeudi dernier, la section chalonnaise de la Ligue des droits de l’homme organisait un débat sur la question de la Réforme pénale.

La réforme pénale actuellement portée par Christiane Taubira, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, a été votée en première lecture le 10 juin dernier à l’Assemblée Nationale par tous les groupes de gauche, à 328 voix contre 221. Elle sera en débat au Sénat à partir du 24 juin prochain.

Principalement, cette réforme crée une nouvelle peine pour tous les délits : la « contrainte pénale » qui consiste dans le respect d’obligations ou d’interdictions sur une période de six mois à cinq ans, sous le contrôle du juge d’application des peines, pour prévenir la récidive en favorisant la réinsertion. Elle porte également affirmation du principe de l’individualisation des peines, avec suppression des peines planchers pour récidive et révocation automatique des sursis. Elle rend aussi possible la césure du procès pénal, avec le prononcé de la culpabilité et des mesures d’indemnisation des victimes en première audience, puis, sous un délai maximum de quatre mois, le rendu de la décision concernant la peine en seconde audience. Elle organise encore une lutte contre les sorties « sèches », à savoir sans accompagnement, avec une évaluation des détenus aux deux tiers de la peine. Elle instaure la suppression des peines de prison pour les femmes enceintes (sur ce point, les députés ont tenu à ce que soient prises « toutes les dispositions utiles afin qu’aucune femme enceinte ne puisse être placée ou maintenue en détention au-delà de la douzième semaine de grossesse » hors cas de crimes et de délits commis contre les mineurs). Pour rendre possible son application, la réforme prévoit la création de mille postes de Conseillers d’Insertion et de Probation et de quarante postes de Juges d’Application des Peines.

Jeudi 19 juin dernier, à l’initiative de son président, Nicolas Besseyre, la section chalonnaise de la Ligue des droits de l’homme organisait un débat, sous la forme d’une table-ronde, autour de la question « Une réforme pénale pour quelle justice ? ». Afin de croiser les points de vue de différentes professions de la justice, Nicolas Besseyre avait invité à participer à ce débat Aurélien Bailly-Salins - Juge d’Instruction -, Christophe Rode - Procureur de la République de Chalon-sur-Saône -, Alain Guignard - Avocat au Barreau de Chalon-sur-Saône et membre du syndicat des avocats de France (SAF) -, et Pierre Dinet - Educateur de la Protection Judiciaire de la Jeunesse et membre du syndicat SNPES-PJJ-FSU.

Les quatre intervenants ayant répondu présents à l’invitation, chacun a pu donner son sentiment sur la réforme pénale actuellement engagée et livrer ses doutes et interrogations sur des point particuliers du projet de loi.

Ainsi, au fils de la soirée, seront notamment mis en avant les manques de moyens à craindre suite à la suppression des sorties « sèches » de prison et à la création de la « contrainte pénale »,  la nécessité d’être vigilent sur certains délits qui passeront de la condamnation d’une peine d’emprisonnement à une contravention - la liste de ces délits n’ayant pas encore été communiquée -, le regret de voir que les textes législatifs ne concernent les mineurs qu’à la marge.

Le débat dépassera le cadre de la réforme en discussion pour aborder, entre autre, la difficulté de définir et d’évaluer la délinquance - la notion évoluant au rythme de la société -, la nécessité de prendre en considération l’intérêt de la victime mais aussi l’intérêt de l’auteur – le juge ne devant pas faire intervenir un jugement moral dans sa décision, la naissance du sentiment d’insécurité et d’impunité dans la population - qui est finalement assez récente et qui trouve son origine dans des campagnes politiques.

L’ensemble des interventions indiquait clairement que chacun attend une réforme d’une plus grande ampleur du système pénal actuel et Christian Rode regrettait quant à lui « une évolution lente de la justice du fait du poids de l’histoire et du droit européen ».

Autant de thèmes qui ont suscité la participation du public : une salle composée d’une quarantaine de personnes, dont l’aumônier de la prison de Varennes-le-Grand (Jean-Louis Moulinier), un conseiller municipal EELV (Mourad Laoues), le Chef de Cabinet du Président du Conseil général de Saône-et-Loire (Samuel Bon).

D’autres tables-rondes devraient être organisées à l’initiative de la section chalonnaise de la Ligue des droits de l’homme à partir de la rentrée prochaine.

M.B.