Chalon sur Saône

Visite guidée avec le photographe Patrick Bailly au musée Niepce

Visite guidée avec le photographe Patrick Bailly au musée Niepce

Patrick Bailly-Maître-Grand est un personnage haut en couleurs qui a travaillé la photo analogique en noir et blanc durant toute sa vie. Aujourd’hui son œuvre intègre le musée Niepce et sera exposée tout l’été. Comme il était venu au vernissage, il a daigné faire une visite guidée de l’exposition, répondant aux questions du public. Petit tour d’horizon de l’expo et de cette visite guidée.

Patrick Bailly-Maître-Grand a été peintre pendant 10 ans, mais il n’y avait pas assez de technique, il voulait se coltiner avec des appareils. Il se lance dans la photographie. Et il invente ou réinvente autrement. La salle d’exposition est divisée en espaces qui mettent en avant les procédés utilisés au cours de sa carrière : périphotographie, daguerréotype, rayogramme…

Ses photographies sont des monotypes directs, donc uniques. Il fabrique chaque fois une chambre noire de la taille de l’objet à photographier, comme pour les Maximiliennes, les miroirs, les portraits… avec un objectif dont la taille doit être en rapport. Beaucoup de préparations, pas d’accident ni de hasard, ni de transformation de photo numérique traficotée en laboratoire. L’idée précède l’acte photographique, ou l’intuition. Comme un poète inspiré se réveille au milieu de la nuit pour écrire le mot tant recherché qui vient de lui être dévoilé, Patrick Bailly-Maître-Grand a une idée et la réalise.

 

Ce sont les "Gouttes de Niepce", faites avec de la gélatine sur une plaque de verre suspendue qui devient prisme. Des herbes photographiées par une nuit de pleine lune, telle une peinture japonaise à l’encre noire, qui apparaissent noires sur le papier blanc grand format. Ou des carcasses de pigeon photographiées d’une certaine manière, qui apparaissent comme des écritures, ou des calligrammes de Dotremont. Une série de baquets avec l’eau jaillissante photographiée en une seule prise, en cinétique, du même procédé que le scan circulaire chez le dentiste : l’appareil photo est mis sur rails et tourne autour de l’objet, quand l’objet lui-même est posé sur une plaque tournante, et il faut toute la connaissance mathématique pour que les deux mouvements coïncident parfaitement au moment voulu, quand l’eau jaillira du baquet. Les miroirs en positif et en négatif, monotypes directs, qui gardent leur mystère et font rêver. Il y a une notion d’ombre, en positif, qui apparaît comme une lumière. Les poupées, portraits brisés, sont des cartons peints plongés dans l’eau qui se ramollissent et se craquèlent…

 

Cette expo, il l’a appelée "Colles et Chimères" colles pour les techniques utilisées, chimères pour les illusions d'images qui en émergent. Connaître la complexité technique n’enlève rien à la magie de cette photographie analogique. Il y a là matière à réflexion, à rêverie poétique aussi, pour ce que cela révèle d’un esprit contemporain et du monde dans lequel on vit, pour le lien avec la peinture (daguerréotype aux sels d’argent colorés, calligraphie japonaise) ou la science. Mais tout cela est affaire personnelle car "on ne voit que ce que l’on connaît", dit-il !

 

Colles et chimères, Patrick Bailly-Maître-Grand, exposition au musée Niepce, jusqu’au 21 septembre.

28 Quai des Messageries, 03 85 48 41 98, www.museeniepce.com

 

S.B.