Chalon sur Saône

Cette fin de vie qui n’en finit pas de provoquer des remous…

Cette fin de vie qui n’en finit pas de provoquer des remous…

Entité nationale née en 1980 et actuellement forte de 58.000 adhérents, l’Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité bataille ferme pour que la fin de vie à laquelle, un jour ou l’autre et de telle ou telle manière nul ne se soustraira, soit la plus digne possible et conforme à son intime conviction. Elle a soumis en 2011 une proposition de loi ayant pour finalité la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté, ainsi que de l’accès universel aux soins palliatifs. A Chalon-sur-Saône la délégation départementale a enfoncé le clou en surfant sur une actualité brûlante. En effet, suite au rapport des députés Claeys-Leonetti récemment transmis au Président de la République, des discussions seront menées au Palais Bourbon dès janvier prochain…

« …nous sommes toujours combatifs et mobilisés… »

Dirigée par Colette Prochasson, déléguée saône-et-loirienne (358 adhérents, dont une centaine sur le Chalonnais avec Renée-Claude Nectoux en tant que garante à partir de1992) depuis le mois de septembre dernier, une réunion informative aura permis à la bonne vingtaine de personnes présente dans une salle de la rue du Cloître, d’affermir ses connaissances et de débattre autour d’un thème sociétal épineux, souventefois tabou. Toujours sur la brèche, l’A.D.M.D. épouse l’air du temps. « Le 12 décembre une véritable proposition de loi -la loi Leonetti (en particulier les directives anticipées à prendre en considération et sédation irrémédiable en phase terminale N.D.L.R.)- a été présentée à François Hollande. Cette loi ne nous satisfait pas pleinement car elle ne met pas le malade au centre, même si c’est un progrès. Il ne faut pas lâcher.» Echaudée à de nombreuses reprises, la responsable n’est plus à une contrariété près : « Quelles que soient les lois, les ministres, les Présidents de la République qui passent, on n’a pas beaucoup avancé », s’est-elle indignée. A Chalon on n’en était pas au stade des vœux pieux, mais bien plutôt à la formation d’un élan. « Les délégués sont à l’écoute des adhérents. Nous devons faire remonter les desiderata jusqu’au siège de l’A.D.M.D. Ici il s’agit de présenter l’association et de montrer que nous sommes toujours combatifs et mobilisés par rapport au projet de loi. Nous avons d’autre part pas mal d’adhérents âgés, on essaie de renouveler. On a une section « jeunes » au niveau national », a-t-elle glissé.

 

Ces directives anticipées qui font couler énormément de salive : seulement 2% des français les ont rédigées…

Et la déléguée de mettre le doigt là où ça fait mal, sur les fondements mêmes des doléancex. « Les directives anticipées ont été créées à l’A.D.M.D. bien avant Leonetti en 2005. On pourrait appeler ces souhaits ou non-souhaits pour votre fin de vie un testament médical, et de l’autre côté on s’appuie sur une personne de confiance qui fera valoir votre volonté, sachant que la loi Leonetti de 2005 autorise le refus des traitements. Qu’est-ce qu’il y a de plus délicat que de décider pour son conjoint ? Il convient donc d’éviter le conjoint, les enfants, et peut être d’inscrire un ami comme personne de confiance. Ce que nous demandons, c’est que ce soit notre choix, et pas la famille. A titre personnel, j’affirme que ces directives, pérennes et opposables, le médecin va être obligé d’en prendre connaissance et d’appliquer votre volonté. C’est ce à quoi nous aspirons depuis la loi Leonetti de 2005, mais c’est aussi la porte ouverte aux opposants…Moi, j’utilise le terme interruption volontaire de vie, et non pas euthanasie, trop galvaudé, la décision d’abréger vos jours car vous n’en pouvez plus. » Attention cependant, une malencontreuse omission, et tout tombe à l’eau. « Ces directives sont renouvelables  tous les 3 ans. Si vous oubliez de le faire, elles ne sont plus valables. C’est un gros piège ! » Histoire de contourner judiciusement la pierre d’achoppement, un substitut devait voir le jour. « L’A.D.M.D. a élaboré depuis un fichier informatique, ce qui lui permet d’intervenir en cas de problème. Nous avons des médecins-conseils et des juristes qui vont appeler leurs confrères. » Se pose un dilemme. « Faut-il être jusqu’au-boutiste, ou faut-il réussir progressivement par petits pas en allant vers les objectifs ? Qui n’a pas l’exemple d’agonies longues, douloureuses, insupportables ? »

 

La délicate problématique de la sédation

« On va vers la sédation terminale : on vous endort jusqu’à ce que mort s’ensuive», explique Colette. La menace guette sournoisement. « Le grand danger, c’est qu’entre la vie et la mort je ne serais plus consciente. Ce serait la porte ouverte aux fins de vie clandestines. Il y en aurait plus de 3000 en France…Qui peut mesurer cette souffrance psychologique ? Ca pose peut-être plus de problèmes que ça n’en résout, et les opposants diront que c’est une mise à mort. Lorsque le patient sera hors d’état d’exprimer sa volonté, la sédation sera mise en œuvre selon une procédure collégiale. Il faut savoir que la nutrition et l’hydratation constituent un traitement. » Les soins palliatifs ne pouvaient pas passer au travers. « Nous sommes pour les soins palliatifs, mais ce n’est pas assez développé : 20% des personnes décédées en ont bénéficié. Il faut une formation palliative pour les médecins, ainsi qu’un renforcement du droit des patients », a formulé Colette Prochasson, pour qui le type accompli belge demeure la référence absolue en matière de liberté décisionnelle quant au devenir de son enveloppe charnelle.

 

Un courrier circonstancié aux députés

Le dialogue établi avec la salle aura soulevé un certain nombre d’interrogations, ancré également à l’occasion des certitudes parfois érigées en dogmes. De cette adhérente au mental d’acier : « L’A.D.M.D. est une force importante pour faire évoluer les lois. J’espère qu’elle sera entendue quand elle dit que les directives anticipées soient absolument applicables. » La nébuleuse de l’avant-trépas respecté a suscité d’autres questionnements. Tels que le fait de décider de sa fin de vie, le droit d’éteindre soi-même la lumière, qu’est-ce qu’être conscient à un moment donné pour édicter ses volontés ?, etc…Une initiative a été prise à l’issue des prises de position, se traduisant par l’ébauche d’une lettre destinée au député de sa circonscription. On y lit notamment : « …au nom des 90% de Français favorables à une aide médicale active pour abréger les souffrances en fin de vie… » Renseignements à l’adresse suivante : [email protected], ainsi qu’au 06.79.29.87.72  

                                                                                                Michel Poiriault