Opinion de gauche

La laïcité n’est pas soluble dans l’intolérance.

La loi du 9 décembre 1905 a instauré la liberté de conscience et la séparation des églises et de l’Etat. Dans le contexte difficile de l’époque (affaire Dreyfus), l’auteur de la loi, Aristide Briand, prônait une « laïcité de sang froid ». Que voulait-il dire ?

La liberté de conscience est la liberté de croire ou de ne pas croire. Elle permet également à ceux qui ne se reconnaissent dans aucune religion d’être protégés par la loi. Les croyants peuvent ainsi exercer le culte de leur choix personnel : catholique, protestant, musulman, juif, hindou, orthodoxe, bouddhiste…. 

La séparation des églises et de l’Etat marque la volonté du législateur de ne pas définir une religion « officielle » et d’interdire tout prosélytisme dans l’espace public. Depuis 1905, la France est donc un Etat laïc et nul ne peut se soustraire à la loi. 

Dans leur immense majorité, les catholiques, les protestants, les musulmans, les athées ne sont pas contre la laïcité, ils sont contre le fait que celle-ci soit falsifiée ou détournée par des minorités religieuses ou des groupuscules politiques qui appellent à la guerre sainte et à la ségrégation raciale.

Il serait naïf de penser que les obscurantismes, les fondamentalistes et les fanatismes respectent une loi qu’ils ont toujours combattue. Il serait tout aussi naïf de considérer que la loi se suffit à elle même, sans la volonté  républicaine de l’expliquer sans cesse et de la faire vivre au quotidien.

La loi garantit la liberté d’expression et de création des journalistes et des artistes. Mais tout comme la liberté de circuler n’autorise pas à franchir les lignes blanches, la liberté de penser et de s’exprimer n’autorise pas à encourager la haine ou le meurtre. 

Pour défendre les valeurs de la République Laïque, les meilleurs outils demeurent l’école, les associations, et toutes les structures progressistes qui construisent le lien social. L’éducation a un rôle important à jouer. Remettre la laïcité sur les rails dès l’école, faire en sorte qu’elle rime avec liberté, égalité et fraternité est un objectif important pour le mieux vivre ensemble. 

Mais l’école ne peut pas tout. Si la ghettoïsation de certains quartiers, l’exclusion sociale, les inégalités salariales, la xénophobie et le racisme sous toutes leurs formes ne sont pas combattus, alors la pédagogie de la laïcité à l’école sera illusoire.

La question sociale doit être remise au centre des débats. Selon un rapport de l’Unicef (novembre 2014), la crise a fait basculer 440000 enfants dans la pauvreté en France, il existe des centaines de milliers de familles qui vivent avec moins de 700 Euros par mois, il y a 3,5 millions de Français privés d’emploi. Que signifient pour eux l’égalité, la liberté, la fraternité et la laïcité ?

Lutter contre les idéologies sectaires et racistes, lutter pour la tolérance et pour une laïcité moderne ne peut se réduire à une affaire de respect de la loi, de sécurité et de justice. C’est également une question économique. Après les cures d’austérité totalement inefficaces et sans aucun résultat sur l’emploi, une cure de relance de l’économie est plus que jamais indispensable. Chiche !

Le 4 février 2015

Lucien Matron,