Chalon sur Saône
Antonia de Rendinger à Chalon, avant qu’elle n’échappe aux fréquences radar usuelles…
Publié le 17 Mars 2015 à 21h44
Le vendredi 27 mars à 20h les Régalades du Piccolo afférentes au Théâtre éponyme se gargariseront d’un « seule-en-scène avec Antonia de Rendinger pour sortir le grand jeu comme elle sait si bien le faire lorsqu’elle a les coudées franches. L’émission « On n’demande qu’à en rire » sur France 2 en fait au demeurant foi. A Chalon-sur-Saône les envolées verbales de l’humoriste ne devraient pas être avares en railleries piquantes, vu les reliefs prévisibles du « Travail, famille, poterie » mitonné aux petits oignons…C’est tout le mal que l’on souhaite aux spectateurs. Antonia leur tend d’ores et déjà la perche.
Que vous ont apporté les différentes ligues d’improvisation auxquelles vous avez appartenu ? Ce principe d’enseignement n’est-il pas la meilleure des écoles ?
« J’ai toujours tendance à revendiquer haut et fort cette école, parce que je trouve que quand il y a des jeunes qui viennent me voir en me demandant ce qu’ils peuvent faire pour être humoriste, je trouve qu’on a dans le panel des humoristes français énormément d’exemples de gens qui ont réussi : Arnaud Tsamere, Jamel Debbouze, etc. Des gens qui viennent directement de l’impro. Je trouve que c’est une très bonne école, car ça apprend aussi bien à être son propre auteur que son propre interprète, son propre metteur en scène. En ce qui me concerne je suis passée à l’écriture parce que je faisais de l’impro, et qu’au bout d’un moment je me disais qu’il y avait plein de matériel qui était « gâché », plein de choses qui sortaient et allaient bien, qu’il était dommage de ne pas utiliser, ou en tout cas de ne pas utiliser cette technique incroyable pour écrire. Donc moi, c’est déjà au-delà d’une école, c’est ma technique d’écriture, l’improvisation. »
L’intitulé de votre spectacle est-il réellement un pied de nez à la célèbre devise du régime de Vichy : « Travail, Famille, Patrie » ?
« Mais si, complètement, évidemment. C’est un pied de nez, d’ailleurs le nom est malheureusement souvent écorné, il y a des gens qui appellent le spectacle comme la devise pétiniste. Or je voulais à la fois trouver un titre un peu vintage, quelque chose qui fasse allusion à une image de la société qui, me semble-t-il, a vécu, et je voulais trouver un jeu de mots, donc le titre s’est imposé avant que ce spectacle n’existe. »
Après sept ans d’existence pour « Travail, famille, poterie », quelle est votre recette pour jouer avec le même entrain ?
« Déjà parce que le monde change, le spectacle aussi, ce n’est pas le même. Il y a sept ans, quand je regarde les captations, c’est drôle, je disais ça comme ça, je jouais ça comme ça, maintenant je ne le joue plus du tout de la même manière. Le spectacle a connu plusieurs histoires, au début je me suis mise en scène toute seule, et puis après j’ai eu un scénographe, et ensuite un metteur en scène, ça donne des lettres de noblesse au spectacle. C’est comme un vin, un spectacle, il gagne à la longue beaucoup en qualité, et après il faut savoir boire le vin quand il est bon. Il faut après savoir passer à autre chose et faire de nouvelles vendanges. Donc là je suis entre le bon vin et le vin nouveau en fait. On rit beaucoup, mais pas que. C’est d’ailleurs un des retours plutôt positifs de la part du public. C’est un spectacle dans lequel il y a beaucoup de tendresse, il y a de la réflexion sur le temps qui passe, sur la solitude, sur l’âge, sur la féminité, mais pas dans le sens féminisme militant, simplement se poser un peu. La plupart des spectacles que je vais voir sont très pétillants, très gais, où il est beaucoup question de plaisir, de rapidité, qui s’adaptent très vite. Moi, j’ai des sketches très longs avec des personnages qui ne sont pas forcément très racoleurs ou très vendeurs. Si je commence à faire le descriptif du spectacle, il y a peut-être des gens qui vont dire : « Ah oui, d’accord, je sais pas !». Je ne fais plus du théâtre à papa, je dirais que ce que je fais ressemble plus à Sylvie Joly ou à Zouc, qu’à Florence Foresti ou Bérengère krief. »
Quelles sont les particularités de l’humour au féminin ?
«Je pense qu’il y a autant d’humours féminins qu’il y a d’humoristes féminines. Autant je me sens d’une certaine filiation, autant je peux rire très fort en allant voir mes congénères et avoir l’impression qu’on est autant de filles, de personnalités. Je n’ai pas l’impression qu’il y ait un humour au féminin, en tout cas moi je n’ai pas envie du tout de me mettre dans une case d’humour au féminin. Je ne crois pas avoir eu à me battre pour faire ma place en tant que femme et en tant qu’humoriste, les choses se sont faites naturellement. Il y a une petite communauté, mais si on va voir des festivals où il n’y a que des humoristes féminines…. »
Que l’on soit fille ou garçon, y a-t-il une espèce de concurrence chez les humoristes ?
« Je n’ai pas ce sentiment. On est à la fois très contents quand on voit nos amis. On a quand même des affinités les uns avec les autres, c’est un milieu dans lequel on se retrouve beaucoup en festival, beaucoup en plateau-télé, et après ces affinités-là font que l’on va être enchantés de la réussite de l’un ou de l’autre. Par exemple je suis amie avec Caroline Vigneaux ; je suis extrêmement fière du parcours qu’elle fait, et je suis très, très heureuse pour elle tout en ayant conscience qu’elle a beaucoup de chance, et que forcément moi en tant qu’humoriste j’ai parfois des objectifs qui sont les mêmes que les siens. Après, encore une fois, je pense que c’est une question de personnalité, peut-être que d’autres humoristes ont le sentiment d’être sur une course, moi j’ai le sentiment d’être en compétition avec moi-même, de ne jamais avoir à regarder dans l’assiette des autres de manière envieuse. Je pense qu’il vaut mieux se réjouir du succès des autres que d’en être aigri et faire partager les siens aussi, parce que je pense que c’est important quand on a l’opportunité d’avoir des portes qui s’ouvrent, eh bien de surtout embarquer les copains avec, c’est chouette. »
On dit beaucoup de bien de vous. Cela vous libère-t-il totalement, ou au contraire vous donne l’obligation d’être toujours au top ?
« Je crois que j’ai un entourage qui m’aide beaucoup, parce que quelquefois on peut avoir la tentation de la facilité. Je suis entourée de gens très exigeants, ça m’a donné du travail. J’explique également que parfois je n’ai pas fait des choses à la hauteur de mes objectifs et ça m’a fait beaucoup souffrir, ce n’est pas grave, mais je crois que j’ai été très affectée par certaines prestations que j’ai pu faire, notamment à la télévision, qui n’ont pas correspondu à mes ambitions. C’est encore un petit peu par rapport à cette histoire de compétition avec soi-même. J’ai été en sports-études quand j’étais enfant, par conséquent j’ai cette notion de performance personnelle, de respect de soi et du travail. Du coup, quand on a ça un peu dans la peau on est à la fois très contents de ses réussites et conscients du travail que ça a représenté ; en même temps on sait aussi que quand on a des échecs on le doit à un manque de travail souvent. »
Caressez-vous un rêve artistique ?
« J’ai envie de faire du cinéma depuis très longtemps, j’attends qu’on m’appelle. J’ai envie de jouer dans une pièce de théâtre, j’aimerais beaucoup jouer du Feydeau, mais je crois que le cinéma c’est vraiment quelque chose qui me tente, et je voudrais qu’on me propose des choses pas forcément dans l’humour. Je pense être comédienne avant d’être humoriste, et puis voilà, ça viendra peut-être, mais à chaque jour suffit sa peine ! »
Infos et réservations :
Coût de la place : 22,00 euros. A Chalon spectacles au 03.85.46.65.89 ; [email protected] Office de tourisme du Grand Chalon au 03.85.48.37.97 ; réseaux Ticketnet et Fnac/billetel
Crédits photos : Critia/Cn Vergara Michel Poiriault
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