Chalon sur Saône

Très peu représenté, majestueux et précieux, le martinet à ventre blanc revient en villégiature à Chalon

Etre tête-en-l’air ne passe pas pour une qualité première. En revanche, dans quelques cas, cette sorte de dilettantisme s’avère en mesure, malgré les apparences, d’être raccord avec ses pensées dans les nuages. Prenons les ornithologues, les personnes éprises d’avifaune, ces oiseaux sauvages exemptés d’asservissement qui sont une source d’émerveillement et d’apport de connaissances. A Chalon-sur-Saône par exemple, qui sait que le martinet à ventre blanc, aux beaux jours, gratifie les terriens que nous sommes de somptueux ballets aériens, hormis les adhérents de l’A.O.M.S.L. (Association Ornithologique et Mammalogique de Saône-et-Loire, ancrée dans la cité de Niépce) ?

Un vertébré ovipare aux facultés stupéfiantes

« Il y a quatre espèces de martinet  en Europe occidentale, dont celui à ventre blanc. Il est très rare et proche des gens, il niche à Chalon aux Prés Saint-Jean depuis 2010, où trois ouquatre couples ont été recensés. C’est le martinet le plus grand, et il détient de plus le record du monde de vitesse en vol battu (250 km/h), alors qu’en vol piqué la palme revient au faucon pèlerin », annonce Alexis Révillon, chargé d’études&animateur au sein de ladite association. Le naturaliste très averti reconnaît aussi par ailleurs qu’il y a un certain nombre d’électrons libres parfaisant les cieux en toute autonomie sans l’idée obsessionnelle de fixation. « Il existe à peu près une quinzaine d’oiseaux qui fréquentent le site », certifie-t-il. Alexis décrit le chemin de vie du martinet blanc. « Il produit un à deux jeunes par an, et ceux-ci sont matures sexuellement à 4 ans. La 3ème année, ils repèrent, s’accrochent aux parois, et l’année d’après ils construisent le nid (pas en dessous de 4 mètres), essentiellement avec des matières végétales, des plumes, du pollen, récupérées en milieu aérien. Ils peuvent mettre très longtemps pour le réaliser. Puis ils tenteront une  reproduction. Il est prévu de poser trois nichoirs aux Prés Saint-Jean, construits par les élèves du lycée agricole de Fontaines » La nature est extraordinaire, parfois des comportements dépassent l’entendement. « Ils ne se posent jamais, et dorment à plus de 1000 mètres d’altitude en faisant du micro-sommeil, ils planent. Cela vaut également pour le martinet noir. » Plus fort encore, ce phénomène lié aux conditions climatiques contraires. « Quand il y a une dépression, les adultes sont capables de partir à des centaines de kilomètres, ce qui signifie une absence de plusieurs jours, en période de nourrissage de leurs petits. Afin de pallier ce manque, les jeunes diminuent leurs fonctions vitales, entrent en léthargie. A la fin du laps de temps consacré à la reproduction, adultes et jeunes se mélangent. »

Sur le fil du rasoir avec une fragilité manifeste

Lorsqu’il y a des regroupements, le plaisir visuel est décuplé. « Lors du passage migratoire, certains font une halte à Chalon. On y a vu jusqu’au mois d’octobre une quantité qui dépassait la trentaine d’individus. On a déjà eu des observations du côté d’Epervans indiquant que les oiseaux filaient plein nord. C’est un oiseau que l’on peut suivre dans le ciel tôt le matin, et tard le soir. Cette année les premiers individus ont été identifiés le 10 mars, mais ils arrivent surtout début avril, et repartent en septembre-octobre. » Dans les environs il n’y a pas pléthore de spécimens. « Les effectifs restent faibles, en-dehors de la colonie chalonnaise, il faut signaler celle de Mâcon également inféodée aux immeubles (de trois à cinq couples). Hors département et à proximité, il est à noter au « Bout du Monde » à Vauchignon (Côte-d’Or) la seule colonie naturelle, ce depuis le milieu du XXème siècle. Elle est à l’aise dans son milieu d’origine : les falaises. » Comment rendre crédibles ces présences urbaines dans les deux plus grandes villes du département ? « Les grands immeubles, c’est ce qui simule une falaise. C’est une adaptation, les martinets trouvent les conditions propices à leur développement », détaille Alexis. Une menace pèse sur cet insectivore patenté, l’être humain ne partageant pas à tous coups les subtilités de son mode de vie. «Ce sont les rénovations de façade, qui bouchent les fissures. Il convient de savoir qu’il est interdit par la loi de toucher à l’oiseau, à son habitat, ainsi qu’à son nid. Les gens ont la possibilité d’appeler l’A.O.M.S.L. en cas de v besoin », prévient Alexis. Renseignements : 03.85.42.94.57, ou [email protected]

 

Une convention en forme de reconnaissance et d’outil de travail

En cheville avec l’instance intercommunale du Grand chalon, l’A.O.M.S.L a été signataire en décembre 2014 d’une convention de partenariat avec elle, signe indéniable de respectabilité. « L’objectif 2015 est entre autres de s’orienter vers le dénombrement des nids d’hirondelle de fenêtre, et des sites de nidification du martinet noir et du martinet à ventre blanc », précise Alexis.

 

Photos : Alexis Révillon                                                            Michel Poiriault