Chalon sur Saône
«Non mais à l’eau, quoi ? » Le castor de Chalon, parbleu !
Publié le 06 Avril 2015 à 09h43
A Chalon-sur-Saône la présence d’un couple de castors avait été relevée au mois de décembre 2011 par l’ingénieur écologue Alain Desbrosse sur la Saône, attiré initialement par un faisceau d’indices. Après une période consacrée à l’exploration dans son écosystème, les naturalistes de l’A.O.M.S.L. (Association Ornithologique et Mammalogique de Saône-et-Loire) ont décidé de ne pas faire plus cas que cela du mammifère semi-aquatique. En 2015 le mot d’ordre est de le refaire sortir un brin de son anonymat sans nuire à ses allées et venues. Protégé en France depuis 1909, il est le premier animal sauvage toutes espèces confondues à avoir bénéficié de la bénédiction des autorités ad hoc en matière de préservation absolue.
« Il y a eu reproduction »
« On l’a suivie en 2012-2013, et ensuite on a un peu arrêté de se focaliser dessus. C’est une famille qui se porte bien. Il n’y a pas beaucoup de menaces sur elle, dans un environnement qui est la propriété de la ville de Chalon. Je suis pour le fait d’avoir un site phare où l’espèce a du passage, du bruit (perturbations humaines). A Chalon il s’est installé en toute connaissance de cause, il s’adapte très bien à l’homme dès lors que l’on ne touche pas à son territoire. » A ce sujet il y a des types de comportement qui agacent Alexis Révillon, chargé d’études&animateur au sein de l’A.O.M.S.L. « Ce qui me gêne, ce sont les pêcheurs des deux îles du lieu-dit« La Benne-la-Faux », et les bateaux qui accostent la nuit » En revanche, d’heureux événements auraient eu lieu. « Il y a eu reproduction en 2012 et 2013. On n’a jamais observé de jeunes en direct, mais la femelle a été vue avec des mamelles gonflées. En moyenne, les familles ont quatre individus : deux jeunes par an, pour lesquels la mortalité est de 50% la première année. »
Des saules comme garde-manger et pour contenir l’érosion des sols
Parmi les animations réalisées par Alexis, il est à noter la plantation de saules en 2013 consécutivement à un appel à projets de la ville de Chalon, ainsi qu’en 2014, avec 2000 exemplaires de cet arbre mis en terre grâce à la Fondation Yves Rocher. » Les fortunes ont été diverses. « Nous avons constaté une grosse perte en 2013. On débutait, le système de bouturage n’était pas au point. La seconde année nous avons mis en place un système de bouturage différent, et il y a eu 80% de reprise. Actuellement les végétaux sont à 2m-2,50m de haut. Le but, c’est que le castor les ronge, et qu’ils deviennent buissonnants. Il lui faut du bois tendre (saule, peuplier), situé près de l’eau. »
Absence de colonisation de la Saône
Puisqu’il y avait des castors à un endroit donné de Chalon, il devenait intéressant d’aller voir ailleurs si d’aventure des rongeurs d’un acabit identique n’occupaient pas certains endroits. « Après 2013 nous avons cherché sur d’autres sites. Deux ou trois familles ont été localisées aux abords immédiats de l’agglomération sur la Saône, ce qu’on appelle le noyau chalonnais, ces familles sont en contact. Au nord nous n’avons pas assez de connaissances, et au sud il y a un grand trou jusqu’à Uchizy. Dans le cadre de Natura 2000, une étude a été faite de Lux jusqu’à Ormes. Cette prospection a été financée par notre principal partenaire concernant Natura 2000, à savoir l’E.P.T.B. Saône-Doubs (Etablissement Public Territorial de Bassin). » Alexis se met à rêver, qu’est-ce que cela coûte ? «Pour le bassin de la Saône on espère que des loutres viendront du bassin du Rhône. Elles, il leur faut du poisson », éclaire Alexis. Un double danger inquiète le chargé d’études. « C’est le tir à la carabine au crépuscule pour tuer le ragondin. Il existe un gros risque de confusion. Avec l’O.N.C.F.S. (Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage) on va essayer un arrêté préfectoral pour interdire les pièges tuants où il y a la présence avérée de castors au nord de Chalon, à défaut, des indices probants. C’est de la zone de présence. Toute la Saône serait classée sur l’ensemble du département. Sur cette rivière il ne dispose pas d’un biotope idéal, et on n’est pas sur de bonnes densités. Il manque encore pas mal d’éléments pour donner un statut à la population de castors C’est plutôt épars, en pointillé. Cette relative faiblesse par rapport aux capacités de l’espèce est flagrante au regard par exemple du bassin versant de la Loire, où il peut y avoir des surpopulations de castors. On a la chance de n’avoir pas une région fruitière, donc aucun problème à ce niveau.»
Des aides artificielles pour les passages
Quand le cours d’eau est canalisé, segmenté par des barrages, il arrive que l’irréparable soit commis. Sur la Grosne (où une passe à castor a été installée en septembre 2014) deux individus ont été percutés. Le système de franchissement est entré en fonction sur le Solnan, tandis que sur la Seille (où ne s’ébattent que des jeunes) il y aura un ouvrage en métal avec un suivi assuré par une caméra. Question de l’utilisation du biotope, Alexis vante les propriétés des ripisylves, premières barrières (forêts bordant les cours d’eau). « C’est un élément essentiel dans la qualité des eaux. Plus on a dégradé les milieux, que le castor, pour sa part, entretient positivement, plus les crues seront violentes. La Saône est une zone de pêche commune, et beaucoup de dégradations sont dues à des actions de pêche. On n’en prend pas encore la mesure. Il faut apprendre à respecter les berges. De là dépend la qualité du milieu. »
Le 29 mai à Chalon, la pénombre livrera-t-elle des secrets ?
La France, la Belgique, le Luxembourg, la Suisse, bref huit pays européens ont agencé à partir du 20 mars « Le printemps des castors », et le 21 mars en basse vallée du Doubs ce sont les traces et indices qui ont fait l’objet d’une sortie au profit du grand public. Enfin, le vendredi 29 mai dès 19h30 aura lieu à Chalon-sur-Saône une observation nocturne du castor européen (il n’y a que deux espèces de castor dans le Monde, lui, et son collègue nord-américain). Attention, nombre de places limité, il est impératif de s’inscrire préalablement. Renseignements sur le site www.aomsl.org
Photos Alexis Révillon
Visionnez la très belle vidéo de l’A.O.M.S.L.
https://www.youtube.com/watch?v=R2QcAicp3rM
Michel Poiriault
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