Cinéma

Info-Chalon est allé voir « Girls only », de Lynn Shelon. Sans doute pas le film du siècle, mais une production qui se laisse néanmoins bien regarder.

Info-Chalon est allé voir « Girls only », de Lynn Shelon. Sans doute pas le film du siècle, mais une production qui se laisse néanmoins bien regarder.

Lorsque votre serviteur d’Info-Chalon s’est finalement décidé à aller voir Girls only, c’était tout de même sans grande conviction. Il faut dire qu’un film « made in Hollywood », qui a pour projet d’envisager les atermoiements d’une trentenaire américaine dont la vie est un peu en « stand by » et qui retombe un peu en adolescence en allant vivre sous le toit d’une gamine avec laquelle elle a sympathisé le jour du mariage de l’une de ses meilleurs amies, ça n’avait pas de quoi susciter un enthousiasme débordant…

Et pourtant, au final, votre serviteur ne regrette pas d’avoir déplacé sa carcasse jusqu’au Nef. En effet, si Girls only n’est certainement pas le film du siècle, mais plutôt « un film qu’on peut voir à la rigueur » comme dirait Le Canard enchaîné, il a le mérite de faire réfléchir à une question, celle que soulève une scène, lorsque la protagoniste – la trentenaire évoquée il y a quelques instants – s’entend répondre à une prof qui asticote sans nouvelle amie, qu’il est « stupide d’élaborer un plan pour l’avenir alors qu’on se doute qu’on va changer d’avis ».

Penser à ce que pourrait être son avenir, est-ce si stupide que cela ? Au moment où cela est dit dans le film, une telle considération peut effectivement se tenir. Sauf que, et c’est tout l’intérêt de Girls only, qui prend assez intelligemment le contrepied de cette dernière, s’il peut apparaître assez vain d’envisager avec précision ce que l’on souhaite faire de sa vie future et de soi, ne jamais y penser, ne jamais imaginer à quoi pourrait ressembler demain est manifestement le plus sûr moyen de passer à côté de sa vie. Etant entendu que, sans projection dans l’avenir, sans ce processus de néantisation du réel dont parlait Jean-Paul Sartre dans un de ses ouvrages majeurs [2], on se condamne à s’enfermer dans un présent qui, s’il n’est pas forcément totalement mauvais, n’est pas toujours non plus le cadre propice à l’épanouissement de soi, de son être.

Et parce qu’il sait rendre visible cela, qu’il met en perspective cette question chère aux existentialistes sans pour autant occasionner de redoutables migraines, Girls only mérite sans doute d’être vu. Surtout si, comme la protagoniste, on a l’impression d’être bloqué dans une vie étouffante ou du moins insatisfaisante.

 

S.P.A.B.

 

[1] 2015. Durée : 1 h 41

Bande-annonce :

http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19552795&cfilm=220143.html

[2] Jean-Paul Sartre, L’être et le néant. Essai d’ontologie phénoménologique, Gallimard, coll. « Folio », (1943) 1976, 675 p