Grand Chalon

Rencontre avec Aude Husson-Patru, « Faire émerger des personnalités et des voix »

Rencontre avec Aude Husson-Patru, « Faire émerger des personnalités et des voix »

Infochalon.com avait rencontré une 1ère fois Aude Husson-Patru, Professeure de Chant, lors du spectacle : « Apaches, voyous et drôles d’engeances » proposé à l’Arrosoir Jazz Club de Chalon-sur-Saône fin avril. Retentissant succès, puisque les 3 soirs de représentation ont affiché complet ! Arrivée au Conservatoire du Grand Chalon, il y a 8 ans, l’occasion nous est donnée de revenir sur le cursus qu’elle enseigne - sans fausse note. ENTRETIEN EXCLUSIF INFOCHALON.COM

Quelles sont les conditions préalables pour intégrer votre cursus ?

Pour passer l’audition, il faut avoir 15/16 ans minimum et avoir la volonté de pratiquer le chant comme on pratiquerait un instrument, avec la même passion, la même énergie. Lors de cette audition, chacun est libre de présenter la chanson qu’il souhaite, s’ensuit un entretien pour évaluer les motivations. Chaque année, c’est environ une trentaine de personnes qui s’inscrivent à cet examen. Certaines d’entre elles viennent de loin, de Dijon par exemple, elles n’hésitent pas, comme dans d’autres classes, à faire les allers retours pour suivre les cours, preuve que le Conservatoire de Musique, de Théâtre et de Danse… est connu, reconnu.

Les émissions TV de divertissement et de télé crochets qui plébiscitent la chanson participent-elles à cet engouement ?

Depuis la création de la classe, on assiste effectivement à une montée en puissance au niveau des demandes d’inscription. Il y a une vraie influence de ces émissions sur le public, il est plus sensibilisé, plus réceptif à la chanson française entre autres. Finalement cela n’a absolument rien de négatif, même si l’image renvoyée est souvent caricaturale. On voit aussi arriver des personnes d’horizons divers, non seulement des interprètes mais également des auteurs et des compositeurs qui ont envie de développer leur musicalité et leur vocalité.

Votre spectacle annuel a été très bien accueilli par le public venu nombreux, qui sont les élèves concernés par cet exercice de mise en situation ?

2/3 des élèves, les plus avancés mais aussi quelques jeunes débutants motivés ; ce spectacle fait partie intégrante du projet pédagogique. C’est important qu’ils soient mis dans des conditions professionnelles réelles et l’Arrosoir Jazz Club est le lieu idéal, son équipe nous apporte depuis toujours un soutien précieux et cette salle intimiste privilégie la proximité avec le public. Nous voulions exploiter toutes les possibilités de ce lieu mystérieux, ancienne prison avec ses escaliers et ses boyaux, sa cours ronde, nous avons conçu un spectacle sur mesure. D’ailleurs, cette année, l’Arrosoir a été coproducteur du projet. Luc Torres, photographe et vidéaste, bien connu des chalonnais s’est joint à nous pour travailler sur cet univers ainsi qu’une décoratrice, Frédérique Abilama.

Le succès de ce spectacle est le fruit d’une étroite collaboration avec d’autres classes…

Oui, effectivement, ce succès est le fruit d’un travail d’équipe entre la classe Musiques Actuelles et les classes de Chant ; il y a des transversalités entre tous ces enseignements. Aussi, nous voulions mettre les chanteurs dans un rôle de comédien, beaucoup d’entre eux font du théâtre d’ailleurs. Il est indispensable de relier tous ces domaines, c’est pourquoi la danse était aussi représentée. Chacun a participé au projet en apportant sa pierre à l’édifice, nous avons mutualisé les compétences des uns et des autres. Ils ont, également, travaillé individuellement avec la pianiste, Claire Forin, qui a élaboré ses accompagnements avec eux.

Qu’est ce qui fait qu’à Chalon-sur-Saône, cela fonctionne si bien ?

Chalon est ville à dimension humaine, la nature, la qualité et la diversité de son réseau culturel participe à faciliter les échanges entre élèves, domaines de compétences et structures. Le Conservatoire travaille aussi bien avec l’Arrosoir Jazz Club, LaPéniche, l’Espace des Arts, Nicéphore cité, le Musée Niepce, les écoles… On travaille dans des conditions presque familiales ! Cette interaction entre les classes et les structures favorise la curiosité car il est possible d’aller voir ce que l’autre propose et s’enrichir de ce qu’il sait. C’est sécurisant pour les élèves qui s’épanouissent pleinement dans leur apprentissage, en revanche, pour devenir professionnel, il faut nécessairement s’ouvrir aux réseaux nationaux et aller voir ailleurs, au-delà des frontières du Grand Chalon… Notre force, c’est qu’ici, on a une grande ouverture d’esprit sans brader l’exigence. (Rires)

Beaucoup d’élèves veulent devenir professionnels ?

Oui, la majorité d’entre eux et ils travaillent énormément pour cela. Il y a une vraie envie, un vrai enthousiasme et une grande solidarité entre eux. On ne peut qu’être fier de les voir s’épanouir sur scène avec un tel professionnalisme. Afin de préparer le spectacle annuel, les chansons sont choisies très tôt pour ensuite laisser les choses mûrir, évoluer. Ensuite, c’est un long travail d’accompagnement. La voix ne ment pas,  on ne peut pas chanter contre soi. Ceci implique un intense travail sur soi également.

Comment souhaitez-vous voir évoluer les cursus Chant ?

Je veux tout d’abord dire que nous sommes très chanceux au Conservatoire car nous bénéficions de nombreux soutiens autour du Chant et de la Voix et nous avons l’appui, sans faille, de notre Directeur Robert Llorca. Un nouveau cursus innovant se mettra en  place dès la rentrée 2015, proposant un tronc commun avec la Classe de Chant Lyrique en 1er cycle. Cela laissera le temps à chacun de choisir en connaissance de cause dans quelle esthétique il est le plus à l’aise. Il y a de moins en moins de cloisonnements entre l’univers lyrique et le monde de la chanson, surtout dans les jeunes générations, à ma plus grande joie !

Vous faites, à titre personnel, un énorme travail d’archivage et de recherche concernant le patrimoine de chansons françaises notamment celles du XIXème ?

J’ai repris les études de musicologie en master 1 afin de présenter une thèse sur le poète chansonnier Maurice Rollinat. C’est un travail non seulement d’archivage comme vous l’avez indiqué mais aussi de restitution et d’enregistrement. Je m’intéresse avec quelques collègues également au répertoire chalonnais avec des chansons qui ont attrait, par exemple, au carnaval ou à l’île St Laurent, la retransmission du travail de collectage que nous souhaitons pouvoir entreprendre participera à faire vivre la mémoire de Chalon. Le public est aujourd’hui très réceptif à ce patrimoine de chansons voire demandeur. Plus généralement, il faut dépoussiérer ces répertoires et apprécier la qualité des textes, certains sont d’une extraordinaire actualité. Il est étonnant de constater que beaucoup de chansons continuent à avoir la même vigueur qu’au 1er jour.

Prochains Rendez-Vous ?

Le mardi 2 juin à l’Arrosoir (18h et 20h) et jeudi 25 juin au Théâtre Piccolo (20h).