Saint-Marcel
A Saint Marcel, les salariés d'Areva de toute la Saône et Loire avaient donné rendez-vous
Publié le 02 Juillet 2015 à 11h45
Ils étaient tous là : Sirugue, Baumel, Untermaier, Durain, Martin, Billardon... et tous avaient à coeur de défendre la présence d'Areva en Saône et Loire. Mais pour autant, les inquiétudes se sont clairement exprimées.
La CFDT étant la première organisation syndicale chez Areva, il est revenu à Jean-Pierre Bachmann, coordinateur syndical CFDT au sein du groupe, de faire « un état des lieux », pour ouvrir une réunion publique annoncée par l’intersyndicale CFDT - CGT - FO - CFE-CGC et ouverte surtout aux salariés des trois établissements estampillés Areva NP en Saône-et-Loire.
Ceux-ci pesant pour plus de 2 000 emplois, la centaine de salariés présents - malgré des mesures de déplacement travaillées par les syndicats - n’était cela dit pas des plus encourageantes pour « sonder » peut-on dire les premiers concernés par l’avenir de leurs industries... Invités à venir s’exprimer et même prendre position, les élus du territoire avaient eux rempli les premiers rangs. Cités pour leur présence, ils allaient être sollicités, interpelés plus tard dans cette réunion.
Jean-Pierre Bachmann est donc revenu sur la situation, mais aussi sur les préoccupations qui devaient présider. En rappelant notamment les 4,8 milliards d’euros de pertes financières en 2014 pour un chiffre d’affaires de 8,4 milliards d'euros. Des données chiffrées aussi du côté de la profitabilité, afin d’insister sur le poids d’Areva. « Sur le sol français, on compte 36 milliards d’euros générés en masse salariale, et 46 milliards d'euros à honorer sur le carnet de commandes », a souligné Jean-Pierre Bachmann, en lâchant dans le même temps que les erreurs deviennent des fautes quand elles sont répétées... En cause ici, « l’Etat actionnaire ayant validé plusieurs décisions et orientations, comme le non-remplacement de Siemens suite à son départ, l’achat d’uramin, le projet Ol 3... ».
La CFDT dit aujourd’hui tenir aux compétences des salariés et demande une recapitalisation plus conséquente. L’intersyndicale s’exprime aussi en ce sens, pour le maintien d’un modèle intégré. « Il y a plus de dix ans, Areva a été créée, ce n’est pas pour aller en arrière et se retrouver avec COGEMA d’un côté et Framatome de l’autre », a ensuite fait remarquer Karl Frazel pour FO. Avant d’insister : « L’Etat doit jouer son rôle d’actionnaire pour aligner Areva et EDF sur la filière nucléaire ». Le maintien du parc nucléaire français et le respect des 57 tranches sont des arguments répétés. Angelo Paladino, pour la CGT, et Bruno Assémat, au nom de la CFE-CGC, se sont exprimés, le second ayant soulevé plus particulièrement les conséquences autour de la transmission des compétences, sachant que le gel des emplois ne correspond pas à des salariés vieillissants, en l’occurrence à Saint-Marcel, dont le renouvellement est à préparer sur plusieurs années.
Le rapprochement avec EDF, dans le cadre d’une vente de parts importantes du capital d'Areva, n’est pas forcément vu comme néfaste pour certains salariés. Mais ce mardi soir, la majorité des syndicats s’est clairement exprimée contre. « L’éclatement d’Areva » est craint, avec un repreneur comme EDF « qui revendrait les activités selon des règles de concurrence ». Dans l’assemblée à Saint-Marcel ce mardi, on a martelé : « Les difficultés ne datent pas d’hier... ». Et l’Etat a été pointé du doigt pour sa passivité, notamment dans la « guerre » EDF-Areva.
Malgré quelques appréciations et des petites piques envoyées selon les sensibilités politiques, plusieurs élus du territoire se sont affirmés pour le rapprochement, qu’ils voient eux comme un partenariat renforcé. « L’Etat prend ses responsabilités dans le dossier, en s’engageant à la recapitalisation du groupe mais aussi en croyant en EDF qui n’est pas un corps étranger... On rendrait là les deux acteurs du nucléaire français vraiment solidaires », a assuré le sénateur Jérôme Durain. « Ce sont deux cultures qui doivent s’enrichir. Les deux entités doivent être partenaires, pour qu’Areva ne devienne pas un groupe sous-traitant d’EDF », a quant à lui prévenu Sébastien Martin, président du Grand Chalon.
Le député Philippe Baumel a répondu face à d’autres critiques, en précisant : « Qu’on ne dise pas que l’Etat ne s’engage pas. La création d’Areva s’était faite sous le gouvernement de Lionel Jospin, mais ce n’est pas ce gouvernement qui a laissé les difficultés croître ». Avant lui, son homologue Cécile Untermaier avait loué la démarche : « On remet en perspectives, on refonde la filière du nucléaire français ». Le grand carénage, comme programme industriel de plus de 50 milliards d’euros, est pris tel un investissement considérable d’EDF dans l’avenir.
Conseillère régionale de Bourgogne et élue communiste, Nathalie Vermorel s’est exprimée sur un autre angle : « C’est aujourd’hui l’enjeu énergétique d’un pays, et climatique aussi. La sécurité est primordiale. Ce qui est cause dans cette affaire, c’est la déréglementation au nom de la compétitivité. On devrait défendre le modèle intégré, et la recapitalisation par l’Etat est la solution. La gestion démocratique doit prévaloir et les salariés doivent être entendus ». Marie-Claude Cordier, porte-parole d’Europe Ecologie Les Verts en Saône-et-Loire, s’est dite « en colère car les salariés vont trinquer », avant d’orienter quant à elle les perspectives sur une voie de changement à anticiper, en pensant au démantèlement de la filière nucléaire pour lequel « Areva a un rôle à jouer pour l’élue écologiste ».
Les salariés d’Areva NP en Saône-et-Loire croient eux toujours au nucléaire, sans toutefois vouloir « brader » leurs compétences et leurs savoirs-faire, au risque de disparaître au profit des contacts chinois d'EDF par exemple...
Alix Berthier
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