Chalon sur Saône

La fin du menu de substitution dans les cantines scolaires de Chalon-sur-Saône ... devant le tribunal administratif de Dijon

La fin du menu de substitution dans les cantines scolaires de Chalon-sur-Saône  ... devant le tribunal administratif de Dijon

Ce mardi 11 août, le tribunal administratif de Dijon examinera le référé déposé par la Ligue de défense judiciaire des musulmans (LDJM) en annulation de l’arrêté pris ce printemps par le maire de Chalon pour la fin du menu de substitution dans les cantines scolaires, lorsque du porc est servi. Une décision qui devait s’appliquer à la rentrée mais pourrait être remise en cause par le tribunal administratif. Le parcours et les ambitions des diverses parties en présence ne garantit a priori ni la sérénité, ni la discrétion, quelle que soit la décision rendue. Sulfureuse laïcité. Info-chalon.com fait le point la veille du passage devant le juge.

Un coup d‘œil aux parcours des différents acteurs du procès suffit à affirmer qu’un buzz est farouchement attendu. D’un côté, un recours gracieux  déposé dès le mois d’avril, recours finalement accepté par la juridiction administrative le 24 juillet. On trouve la LDJM, la ligue de défense juridique des musulmans, une association créée en 2013 par Karim Achoui.

Avocat au barreau d’Alger depuis février 2015, l’homme a longtemps alimenté, bon gré mal gré, la rubrique faits divers. Cet avocat pénaliste à la double nationalité franco-algérienne, a été victime d’une tentative d’assassinat à la sortie de son cabinet parisien en 2007. « Brillant et talentueux » pour ses amis, « sulfureux et narcissique » pour ses détracteurs le quadragénaire préfère le clash si possible médiatisé à l’accord velouté et discret. A partir de 2007, son casier judiciaire s’alourdit, de multiples affaires se succèdent de la subornation de témoin à usage de faux. Il est finalement interdit d’exercer par ses pairs parisiens. C’est après cette descente aux enfers professionnelle qu’il crée en 2013, la Ligue de défense judiciaire des musulmans, qui se veut un instrument de lutte contre l’islamophobie. En novembre 2014, il a publié un guide pratique « Musulmans, quels sont vos droits ? ». Il estime que personne ne représente les musulmans de France assez efficacement dans les prétoires.

L’avocat déchu à Paris exerce désormais son art chez le bâtonnier d’Alger, un spécialiste en droit des affaires. Une convention franco-algérienne d’août 1962 prévoit que les avocats algériens peuvent plaider partout en France s’ils le souhaitent (même chose pour les Français). Cette année 2015 marque donc un retour pour Me Achoui et on ose dire sans trop se tromper que l’action lancée auprès du TA à Dijon s’inscrit aussi dans une logique de reconquête personnelle.

L’avocat de la LDMJ sera dans cette affaire bourguignonne Nicolas Gardères, un militant du parti EELV qui, professionnellement a aussi bien défendu dans des affaires de liberté d’expression des partisans d’extrême-droite que des militants « gauchistes ». Il est l’invité régulier de débats sur TV Libertés, une chaine web télé fondée en janvier 2014 par un journaliste ex-membre du Front national et désormais proche de Carl Lang. Me Gardères, comme Karim Achoui est un habitué des plateaux télés et des tribunes engagées et donne parfois à ses affaires un aspect volontiers militant.

Au registre de ses actions passées, la LDJM a déposé plainte en 2013 auprès du tribunal correctionnel de Strasbourg contre des dessins de Charlie-Hebdo, car le code pénal spécial d’Alsace par son article 166 était le seul en France à punir de 3 ans de prison maximum un individu pour délit de blasphème, un héritage du code pénal allemand de 1871. Une affaire qui a fait flop. La LDJM a aussi porté plainte en 2014 contre des propos qu’elle estimait « antimusulmans » contre le président du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France), celui de la LICRA (Ligue internationale contre le racisme ou l’antisémitisme) ou encore le député Claude Goasguen.

Enfin, last but not least, dernier mais pas le moindre, Gilles Platret par qui le scandale est arrivé. En attendant  le maire de Chalon-sur-Saône, proche de Nicolas Sarkozy ne se satisfera pas longtemps d’orchestrer les seuls Républicains de Saône-et-Loire et une mairie de 45 000 habitants. Ce dossier lui permet une large tribune nationale. Son apparition le 14 juillet dans une vidéo des Républicains, aux côtés de l’ex-président de la République, juste après l’interview de François Hollande disait toute l’ambition qui était la sienne : prendre une place bien à droite et s’affirmer dans le paysage national.

L’audience dijonnaise de ce mardi 11 août ne dira pas seulement le droit pour ces trois acteurs qui se piquent davantage  de politique que de défense des principes de la laïcité. C’est un des multiples aspects de cette affaire, qui comme tous les faits touchant à cette valeur républicaine fondamentale, peut être le siège d’interprétations contradictoires et passionnées. Jamais totalement innocentes.

 

Florence Genestier