Faits divers

TRIBUNAL DE CHALON - Cinquante-cinq mille euros détournés des comptes des personnes âgées de l’agence bancaire

TRIBUNAL DE CHALON - Cinquante-cinq mille euros détournés des comptes des personnes âgées de l’agence bancaire

De 2011 à 2012, la jeune employée de banque a prélevé des petites puis de plus grosses sommes sur les comptes des clients les plus âgés de l’agence bancaire de Verdun-sur-le-Doubs dans laquelle elle était employée. Tout cela pour faire face aux dépenses de la rénovation de sa maison.

Pour pleurer, elle pleure. Mouchoir en papier en main, cette jolie jeune femme, blonde, lisse et portant un pull rose fluo, a la voix qui tremble quand elle s’exprime à la barre. Au guichet de l’agence du Crédit Mutuel de Verdun-sur-le-Doubs, elle a longtemps été irréprochable. Une « bonne collègue », polie avec les clients et sympathique avec ses collègues. La blondinette, angoissée par des travaux de rénovation prévus dans sa maison ‘avait pas pu obtenir, avec son mari, l’emprunt nécessaire pour la totalité de la réfection. Il lui manquait 40.000 €. Elle a visiblement repéré, dans son agence, « les personnes qui avaient de l’argent et ne s’en servaient pas ». L’aspect détestable du dossier, outre le détournement de fonds, repose sur le choix des personnes victimes de ces prélèvements ou de virements directs de leurs comptes aux artisans qui travaillaient dans la maison de la guichetière. Trois personnes âgées principalement, Alexandrine, Maurice  et un autre vieux monsieur, décédé depuis. La fille de ce dernier, âgé alors de 86 ans,  a écrit au tribunal pour faire valoir un préjudice moral. Elle est persuadée que son père a subi un stress important, avec près de 4900 € détournés de son compte-livret. C’est lui qui révélé l’affaire. « J’ai honte, sanglote la jeune femme. Je pensais vraiment pouvoir rembourser ». La facilité aidant, un virement bancaire après l’autre, elle sombre dans une mauvaise dynamique. Jusqu’à 55.000 euros de préjudice. Jusqu’à surtout, ce qu’un client, âgé mais pas bête, remarque le stratagème.

La jeune femme, après enquête interne, a été convoquée par sa direction puis licenciée en 2011. L’affaire, rare, a provoqué un vif choc dans l’agence bancaire aussi bien à la direction que parmi le personnel. Partie civile, l’agence bancaire ne demande pas de préjudice moral à son ancienne employée. L’agence a indemnisé les victimes. « Ses difficultés financières par rapport à sa maison étaient connues, précise Me Profumo, l’avocat du Crédit Mutuel. Un réaménagement de prêt avait déjà eu lieu. Elle a cédé à une facilité désagréable. Les salariés sont restés très marqués par cette affaire, tout le monde se sent sali ». Si l’indulgence prévaut du côté de la partie civile, ce n’est pas le cas du côté du ministère public. La première procédure lancée à l’encontre de l’ex-guichetière était  une CRPC – comparution de reconnaissance préalable de culpabilité – qui avait le bénéfice d’éviter l’audience publique. Or, la prévenue, qui s’était il y a un an engagée à rembourser son ex-employeur n’a pas procédé au moindre versement. « A l’époque, elle avait une promesse d’embauche, qui ne s’est pas concrétisée » avance son avocate, Me Marie Chanon. Le parquet, agacé, est peu enclin à la clémence : « La prévenue est très repentante, mais elle pleure surtout sur elle-même. Il lui faut un aiguillon judiciaire pour rembourser, assorti d’un suivi assez ferme ». Et de requérir une peine de deux ans de prison dont un an avec sursis et l’exécution provisoire de la peine.

Pour la défense, la prévenue « n’est pas une délinquante mais elle a commis une erreur grave, ce sont des faits ponctuels ». L’avocate souligne l’isolement de la jeune femme depuis ses déboires. Son mari, qui l’a toujours laissée gérer les comptes du ménage,  « ne veut pas entendre parler de l’affaire ». Seule sa sœur la soutient. Me Chanon regrette en tout cas que sa cliente n’ait pas voulu faire appel à un psychologue pour comprendre le pourquoi de ses agissements. Elle demande au tribunal d’oublier une peine ferme et réclame la non-inscription du délit à son casier judiciaire.

Un vœu qui ne sera pas suivi par le tribunal pour l’inscription au casier. La jeune femme a été reconnue coupable d’escroquerie aggravée et condamnée à dix-huit mois de prison avec sursis et mise à l’épreuve avec une obligation de travailler pour rembourser son ancienne banque. 800 € ont été attribués au titre  de préjudice moral à la famille de l’une de ses victimes décédées.

 

Florence Genestier