Opinion de gauche

Réforme du Code du travail : la nouvelle trahison de Hollande pour le NPA 71

Il n'est pas difficile de comprendre que derrière ce projet de réforme prétendument "à droits constants", le gouvernement modifie complètement la donne et cherche à inverser la finalité du Code du travail au détriment des salariés, soi-disant pour favoriser l'emploi.. Il est urgent de réagir.
 

      Avant son élection, notre Président de la République s’était engagé à combattre le chômage. Pour cela, le candidat qui se réclamait adversaire de la finance, annonçait solennellement (35ème de ses 60 engagements pour la France) : « Pour dissuader les licenciements boursiers, nous renchérirons le coût des licenciements collectifs pour les entreprises qui versent des dividendes ou rachètent leurs actions, et nous donnerons aux ouvriers et aux employés qui en sont victimes la possibilité de saisir le tribunal de grande instance dans les cas manifestement contraires à l’intérêt de l’entreprise ».

La communication, c’est important. Faire exactement l’inverse de ce que l’on a promis, c’est grave. C'est même de l'ordre de la trahison. Les lois qui se sont succédées en matière de droit du travail l’ont montré; elles n'ont fait que réduire les droits des salariés les unes après les autres, de manière de plus en plus violente.

 

     Depuis une trentaine d’années, les réformes se sont succédées pour tenter d’assouplir le Code du travail, afin  "de relancer l’emploi". Les résultats sont là : ces réformes n’ont eu aucun impact positif sur l’emploi. Simplifier les licenciements ne favorise pas les embauches : cela simplifie les licenciements. Faciliter le dépassement de la durée légale du travail en permettant aux entreprises de négocier la « compensation » des heures supplémentaires (le rapport Badinter ne parle même plus de majoration) ne crée pas d’emploi. Cela conduit les salariés qui ont un emploi à travailler plus, sans même nécessairement être payés plus.

 

       Le Gouvernement déclare qu’il faut faire confiance aux « partenaires sociaux », qu’il faut favoriser l’information des représentants du personnel, qu’il faut encourager la négociation. Mais il met en place des mesures qui vont dans le sens inverse. Il veut sécuriser les entreprises pour « rassurer les investisseurs étrangers ». Si l’employeur n’organise pas la mise en place des instances de représentation du personnel, il est toujours passible de sanctions pénales mais depuis la Loi Macron, si une fois les instances en place il ne respecte pas leurs droits, l’employeur ne risque plus qu’une peine d’amende symbolique... le principe de la Liberté d’entreprendre prime. Ainsi, le gouvernement affirme promouvoir le dialogue social alors qu’il instaure dans la loi même la possibilité pour les entreprises de ne pas respecter les instances représentatives du personnel.

 

      C’est la même chose pour la négociation collective : le gouvernement veut inciter les entreprises à contourner les organisations syndicales en passant par le référendum. Lorsque l’on connaît l’état du rapport de force au sein des entreprises aujourd’hui, on comprend aisément que proposer de confier la réglementation du droit du travail à la négociation d’entreprise, c’est ouvrir la porte à tous les chantages et en particulier le chantage à l’emploi, le chantage à l’argent. Limiter les droits collectifs des salariés c'est aussi limiter leurs droits individuels. N’oublions pas qu’avec la Loi de sécurisation de l’emploi, a été instaurée la possibilité de négocier des accords d’entreprise permettant d’imposer aux salariés individuellement des baisses de salaire, au risque, s’ils refusent, d’être licenciés pour motif économique...

 
       Ce projet de réforme du Code du travail a au moins un mérite : après le débat sur la déchéance de nationalité, il confirme à lui seul que le gouvernement n’est plus de gauche. Après avoir gaspillé 40 milliards dans le CICE et le pacte de responsabilité, sans contrepartie, nos socialistes de marché font encore plus fort dans la transgression des tabous, avec la loi El Khomri-Macron. Toujours plus loin dans cette fuite en avant, qui prend la forme d’une sidérante régression vers les années d’avant les conquêtes sociales du Front Populaire. Toujours plus loin dans la rupture avec le droit minimum des salariés. La philosophie de ce texte est simple : faire travailler plus ceux qui ont déjà un travail, au détriment de ceux qui n’en ont pas et développer, comme en Angleterre ou aux Etats-Unis, les jobs sans qualifications, corvéables à merci. L’ennemi n’est plus « la finance » mais, le travailleur, les syndicats, les 35 heures et le Code du travail. Même la CFDT qui, jusques là, avait avalé sans broncher nombre de couleuvres indigestes, est vent debout. A l’instar de la CGT, de Solidaires . Cette contre-réforme, écrite  sous le contrôle de Pierre Gattaz, permet aux entreprises d’en finir avec les protections les plus élémentaires et renforce la précarisation des salariés. Ce qui se profile n’est rien moins qu’un changement de société où l’Etat laisse tout le pouvoir aux entreprises tandis qu’il se concentre sur ses seules fonctions régaliennes : le maintien de l’ordre, la sécurité et le contrôle social. Une société du soupçon et de la contrainte, où les pauvres n’ont qu’un droit, celui de se taire. On en revient aux débuts de la révolution industrielle, mais dans le cadre du nouvel ordre numérique.
 

       Cette véritable bombe contre le monde du travail ne favorisera pas la lutte contre le chômage, qui dépend d’autres facteurs. Ceux qui viendront au pouvoir après ce tsunami social, n’auront plus qu’à amplifier cette arme de destruction sociale. Les socialistes auront déjà fait le sale boulot. Les vraies mobilisations citoyennes à construire, les vrais enjeux, ne sont pas là où l'on veut nous conduire (les débats soporifiques à propos des primaires à droite et à gauche), mais dans notre capacité collective de mettre à bas ce projet inégalitaire, comme celui sur la déchéance de nationalité et sur l’Etat d’exception. Si l’on veut éviter le pire à notre pays, il faut gagner ces batailles; ensemble. Nous y sommes prêts. 

 

 

Jean-Guy Trintignac NPA 71