Chalon sur Saône

Tribunal correctionnel de Chalon - 15 mois de prison pour un violent qui a eu bien du mal à se souvenir des faits

Tribunal correctionnel de Chalon -  15 mois de prison pour un violent qui a eu bien du mal à se souvenir des faits

Bruno aurait-il des pertes de mémoire au point de ne plus se souvenir de sa date de naissance, comme l’a signalé Me Tiffanie Mirek, qui le défendait devant le tribunal correctionnel de Chalon pour pas moins de cinq infractions délictuelles. Peut-être, si l’on en croît donc l’avocat de la défense... Et aussi le prévenu, lequel a confié au cours de l’enquête qu’il avait des problèmes de mémoire mais qu’il ne se soignait pas, parce qu’il avait la chance qu’elle lui revienne assez rapidement. En tout cas, ce jeune homme de 25 ans, natif de Beaune, ne se souvenait de pas grand-chose, quand il est passé le 25 janvier dernier devant cette même juridiction en comparution immédiate. Ne pouvant guère expliquer les faits qui lui étaient reprochés, qualifiés de « désagréables » par le ministère public.
Mais ce 22 février 2016, lorsque le dossier a été une nouvelle fois examiné, après un renvoi de l’affaire pour permettre à la partie civile de mettre en cause la CPAM de Côte d’Or, Bruno avait, semble-t-il, retrouvé en partie sa mémoire. « Puisque c’est écrit, c’est que cela doit être vrai » a-t-il dit à plusieurs reprises, en réponse aux questions de la présidente Lauriane Baillargeaux. « Je vois avec plaisir que la mémoire est revenue au prévenu, qui reconnait une partie des faits » a fait remarquer le vice-procureur Charles Prost.
Il est vrai que lorsqu’on est prévenu de violence aggravée par deux circonstances, de rébellion, de menace de crime ou délit contre les personnes ou les biens à l’encontre d’un dépositaire de l’autorité publique, de violence par une personne en état d’ivresse manifeste, et de vol, mieux vaut tenter d’enlever la série de faits du rayon des souvenirs.


Une manchette derrière la tête


Des faits qui se sont déroulés en plusieurs épisodes à Chalon le 23 janvier dernier, en fin de journée, dans le secteur de l’Espace des Arts. Premier épisode : de la main droite, Bruno porte une manchette derrière la tête d’un sexagénaire, qui se rend à pied avec une amie dans l’établissement culturel chalonnais, afin d’y travailler en tant que bénévole à l’accueil, lui occasionnant une ITT de 3 jours. Tout simplement parce que l’infortuné sexagénaire a eu le malheur de reprocher à son copain Jean de circuler à vélo sur un trottoir réservé aux piétons. Deuxième épisode : planqué dans l’immeuble où Jean a un logement, Bruno réussit à échapper aux deux policiers de la BAC (brigade anti-criminalité) de Chalon, lancés à la recherche de l’auteur de l’agression. Troisième épisode : Bruno s’enfuit dans les rues du quartier, n’hésitant pas à traverser plusieurs fois la dangereuse avenue Nicéphore Niepce, et est finalement interpellé à proximité d’un supermarché voisin. Non sans mal, car, se mettant en garde de boxe, il donne des coups de poing aux policiers qui réussissent quand même à le menotter. Un des deux policiers est blessé. Et tout cela bien sûr avec à la clé des menaces de mort, du style « Si tu avances encore, je te plante » ou « Arrête ou je vais te butter ».
Un contrôle d’alcoolémie effectué sur le mis en cause a révélé qu’au moment des faits il avait un taux de 0,40 mg par litre d’air expiré. « On sortait de chez une amie et on avait bu quelques bières » a raconté Jean.
Et, pour couronner le tout, la justice reprochait à Bruno d’avoir dérobé des documents administratifs à son copain Jean, dans sa boîte aux lettres à l’aide d’un pass PTT. Ce qu’il a catégoriquement réfuté. « Les papiers, je ne les ai pas volés. A la base, Jean, c’est mon grand frère ». Quant au pass, il l’aurait trouvé par terre et il devait le ramener à la mairie de Chalon.

 

« L’extrême violence et la gratuité des faits » 


« Dans un premier temps on est un peu agacé à l’écoute des dénégations du prévenu. Puis, dans un second temps, on est inquiet. Car, malgré un mois de détention préventive, on ne sent pas chez lui de véritable prise de conscience » a fait observer Me Jean-Luc Seriot, conseil du bénévole de l’Espace des Arts et du policier de la BAC. Après avoir noté « l’extrême violence et la gratuité des faits » et rappelé que le mis en cause avait proféré des menaces de mort à l’encontre du sexagénaire et de son amie, l’avocat a souligné que son client avait souffert de céphalées et de douleurs dentaires durant plusieurs jours et que depuis les faits il appréhendait de repasser au même endroit. Ayant indiqué que la victime avait fait l’objet de 5 jours d’ITT légal, Me Seriot a ensuite mentionné que le fonctionnaire de police, blessé à la main gauche, avait été arrêté pendant dix jours et était en soins jusqu’à la fin mars 2016.
Dans ses réquisitions le vice-procureur Prost a signalé que Bruno était quelqu’un qui ne supportait pas la contradiction et quelqu’un de très défavorablement connu, faisant allusion aux cinq mentions figurant à son casier judiciaire. Réclamant en définitive notamment 2 ans de prison, dont 6 mois avec sursis, assorti d’une mise à l’épreuve de 3 ans, et la révocation d’un précédent sursis.


Une relaxe pure et simple


« Mon client ne peut pas s’expliquer sur les faits. On ne déclare pas coupable une personne, parce que c’est écrit dans un dossier pénal » s’est insurgé Me Mirek. L’avocate a aussi regretté que Jean n’ait pas été présent à l’audience pour s’expliquer sur les faits et qu’il n’ait été cité qu’en qualité de victime. Avant de demander une relaxe pure et simple, Me Tiffanie Mirek a fait savoir que le prévenu avait toujours respecté la mise à l’épreuve qui lui était imposée depuis mai 2012.
De relaxe il n’en a pas été question, puisque le Tribunal a condamné Bruno à 18 mois de prison, dont 6 mois avec sursis, assorti d’une mise à l’épreuve de 2 ans, avec obligation de travailler ou de suivre une formation, de se soigner, et d’indemniser les victimes, et a prononcé la révocation du sursis de 3 mois en date du 21 mai 2012. Le Tribunal a également alloué au bénévole de l’Espace des Arts 800 € au titre des dommages-intérêts et 500 € au titre de l’article 475-1 du Code de procédure pénale et concernant le policier de la BAC a renvoyé l’affaire sur intérêt civil à l’audience du 9 juin 2016.

Gabriel-Henri THEULOT