Faits divers

TRIBUNAL DE CHALON - Un accident mal "maquillé"

TRIBUNAL DE CHALON - Un accident mal "maquillé"

L’histoire d’un accident de voiture le 16 juin 2013, qui fait une blessée grave à l’issue d’un travail nocturne sur la route à Allerey-sur-Saône. L’histoire aussi d’une solidarité entre collègues. Un professionnel de la restauration a comparu vendredi pour blessures involontaires, trois de ses amis pour avoir fait « obstacle à la manifestation de la vérité ».

L’accident était dû à la fatigue du chauffeur et à la vitesse excessive. A l‘issue d’une grande ligne droite pendant laquelle le conducteur a eu un moment d’assoupissement, la voiture a mal négocié un virage  à angle droit et a embouti la grille d’un château. La scène se passe  dans la nuit, le 16 juin 2013, sur la RD970 à trois heures et demie du matin. Le véhicule détruit en partie le portail du château d’Allerey, classée monument historique en 2008 et datant de la Révolution. Les  dégâts patrimoniaux seront estimés par les experts à plus de 45.000 euros. Plus grave, dans la voiture, deux passagères sont blessées dont une grièvement, la jeune apprentie cuisinière. Sa convalescence, suite à des fractures multiples aux jambes et des complications, va durer huit mois.  Tous travaillent dans un hôtel-restaurant de la région et viennent d’assurer le service d’un mariage. Les collègues rentrent avec deux véhicules : celui professionnel de leur employeur et la voiture de David. C’est cette dernière, une Opel,  qui est accidentée. Très vite, convoi et patron conseillent à David, qui a bu quatre verres de vin pendant le service et traverse une période personnelle difficile de ne pas dire qu’il était au volant. La blessée légère endosse la responsabilité du choc et chacun se met d’accord sur la version à donner aux secours et aux gendarmes. On encourage le conducteur à se cacher plus loin, il reste deux heures dissimulé.  Les déclarations des uns et des autres ne résistent pas longtemps à l’enquête. Blessé, le conducteur de l’Opel se rend vite au centre hospitalier chalonnais pour se faire soigner. Les vérifications des enquêteurs font vite exploser la version consensuelle des collègues solidaires, qui ont cru bien faire. « Dans mon esprit, moi je rendais surtout service à David et on était tous d’accord », résume l’un des collègues poursuivis.

« Je ne voulais pas me cacher, on m’y a poussé » précise le chauffeur à la barre, qui semble encore très ému par l’affaire et déclare souvent penser à la jeune apprentie blessée. « Vous avez été d’accord pour échapper à vos responsabilités », tacle la présidente. Pour le Parquet, entre la vitesse excessive et l’alcoolisation, la responsabilité de David est établie. Il requiert une peine de six mois de prison avec sursis, avec une mise à l’épreuve de deux ans qui oblige à se soigner ainsi qu’une suspension du permis de conduire. Quant aux trois personnes poursuivis pour avoir fait obstacle à a réalité et à la vérité, il demande deux mois de prison avec sursis. Me Guignard, qui assure la défense du prévenu, revient sur le « tragique évènement » de la soirée. Il insiste sur les problèmes réels de cet « employé modèle », plutôt suiveur, qui à l’époque de l’accident, se noyait volontairement dans le travail, jusqu’à épuisement, pour ne pas penser à ses soucis. « Ce jour-là, il  avait accumulé 18 h non-stop de service », précise l’avocat, qui estime « qu’on ne sait pas qui est le chef d’orchestre du maquillage de l’accident. » Entre panique post-choc et besoin de solidarité, le montage s’est bricolé en quelques minutes sur place, sans envisager les conséquences. Préserver leur ami a primé.

Le prévenu a été jugé coupable de blessures involontaires, il a été condamné à six mois de prison avec sursis, cent euros d’amende pour vitesse excessive et son permis de conduire a été  suspendu pour huit mois. Un autre procès au civil aura lieu pour décider des dommages et intérêts aux blessés.

 

Florence Genestier