Faits divers

TRIBUNAL DE CHALON - Le procès des incendiaires de Sornay

TRIBUNAL DE CHALON - Le procès des incendiaires de Sornay

4 feux, 4 victimes. L’un a vu flamber un de ses silos à grain, un autre a perdu 4 à tonnes de bottes de paille, 28 bottes de paille furent réduites en cendres sur un autre terrain, un forain donne au tribunal des devis à hauteur d’environ 12 000 € : 2 voitures de manège, une bâche, des éclairages, du plancher. Il a fait chaud à Sornay cet été, et les deux incendiaires sentent aujourd’hui passer le vent du boulet : ils encourent 10 ans de prison.

19 ans, les deux. Pas de casiers, pas d’alcool, pas de stupéfiants, alors quoi ?


L’un était déjà pompier volontaire sur sa commune. On l’accuse de deux incendies, il n’en reconnaît qu’un. L’autre rêve de devenir pompier depuis qu’il est gosse, il est l’auteur principal, et le tribunal voudrait comprendre un peu ce qui s’est passé « dans sa tête » :
« Je ne sais pas.
- Vous avez ressenti quoi ? l’interroge la présidente Aussavy.
- Rien, du remord.
- Vous êtes sûr ? Vous avez recommencé, vous y avez pris une certaine satisfaction.
- Je ne sais pas. »


« Ça m’a permis d’aller mieux pendant quelques minutes. »

En fait il sait un peu, il le dira plus tard : après avoir fait brûler de la paille et un silo à grain sur juillet et début août, il balance une petite bouteille remplie d’essence le 25 août dernier dans un des manèges de la fête foraine. Par chance le courant du manège est coupé ce soir-là.
« Ça m’a permis d’aller mieux pendant quelques minutes. »

D’aller mieux ? Il évoque le décès de sa mère dont il ne se remet pas, puis celui de son meilleur ami, tué au printemps dans un accident de voiture. « C’était le manège ou lui, ce soir-là », insiste Maître Mirek pour sa défense. Le jeune homme va mal, son avocate décrit son geste comme « un appel au secours », « il voulait attirer l’attention sur lui ».

Le parquet requiert de la prison ferme

C’est sûrement un peu vrai parce que les enquêteurs ne mettront pas longtemps à l’interpeller : il est le dénominateur commun, il est soit celui qui prévient les pompiers, soit celui qui est sur place, ou, pire, carrément à la caserne, comme la nuit de l’incendie du manège.

Il n’avouera pas tout de suite, malgré tout. Il faudra que les gendarmes lui lisent les déclarations du co-auteur, pour qu’il commence à lâcher du lest, mais devant le tribunal il ne conteste plus rien, et réclame des soins : il dit savoir en avoir besoin, la substitut du procureur Caroline Mollier regrette qu’il lui faille arriver devant un tribunal pour le dire. « Leurs motivations ne sont pas claires, ils se sont mis d’accord sur leurs déclarations. »
Les magistrats se demandent jusqu’où l’auteur principal n’est pas fasciné par le feu. On a trouvé dans son téléphone des photos d’incendies. La substitut du procureur requiert 1 an de prison dont 6 mois avec sursis contre le co-auteur, et 2 ans dont 1 an avec sursis contre l’auteur principal, et des suivis mises à l’épreuve de 3 ans.

Le parquet s’oppose par avance à la dispense d’inscription au bulletin n°2 du casier judiciaire. Pour Maître Grebot, qui défend le co-auteur occasionnel ça serait une condamnation à perpétuité : les deux garçons sont jeunes majeurs, faut-il leur barrer l’accès à des secteurs professionnels ?

Les prévenus sont alors assis, face à face, en miroir : têtes baissées, bustes inclinés vers l’avant, regards au sol devant eux, les mains jointes, les doigts entrelacés. S’ils n’étaient pas conscients de la portée de leurs actes, ils sont désormais conscients des conséquences sur eux-mêmes et de ce qui peut grever leurs avenirs. Ils se sont excusés, et sont morts de peur, mais leurs responsabilités sont écrasantes : le co-auteur, au titre de pompier volontaire avait accès à Mobops, l’application qui indique les sorties des sapeurs-pompiers, la nature et les lieux des interventions ; l’auteur principal avait commencé par un feu qu’il avait lui-même éteint, impressionné sans doute par son geste, mais il s’était vite habitué.

Décision du tribunal 

Le jeune (ex)pompier volontaire est relaxé pour l’incendie de la nuit du 27 juillet. Coupable du surplus il est condamné à 8 mois de prison avec sursis, et à un suivi mise à l’épreuve de 2 ans qui commence tout de suite avec obligation de travailler, d’indemniser les victimes et interdiction de contact avec son (ex)copain, interdiction de devenir sapeur-pompier, interdiction de paraître à la caserne de Sornay. Dispense d’inscription au B2.

L’auteur est condamné à 14 mois de prison, dont 8 mois avec sursis et un suivi mise à l’épreuve de 2 ans. Mêmes interdictions que son comparse, avec une obligation de soins en plus, et le rejet de la dispense d’inscription au B2.

Indemnisation des victimes (chacun selon sa responsabilité) : 600 € à chaque exploitant agricole, et 12 800 € pour la réparation du manège.

 

FSA