Faits divers

TRIBUNAL DE CHALON - Il avait provoqué un incendie au centre pénitentiaire de Varennes le Grand

TRIBUNAL DE CHALON - Il avait provoqué un incendie au centre pénitentiaire de Varennes le Grand

Au centre pénitentiaire de Varennes-le-Grand, le jeudi 11 janvier en début d’après-midi, les surveillants entendent du tapage, puis aperçoivent la fumée qui s’échappe par une fenêtre dans l’aile E du bâtiment. Immédiatement, les surveillants ouvrent les trappes de désenfumage, coupent le courant, s’équipent de matériel « anti-feu », prennent des bouteilles et des masques à oxygène et se précipitent. Mission première : sauver le ou les détenus qui sont alors en danger.

La fumée émane d’une cellule. On ouvre la porte, un premier homme donne un coup de lance à eau sur ce qui brûle encore, puis les trois surveillants qui interviennent regardent : personne. L’un d’eux vérifie les WC, vides. Alors qu’il referme la porte des toilettes, le détenu surgit. Il se tenait en retrait, entre la paroi des toilettes et son lit. A partir de là les versions divergent. Les surveillants décrivent quelqu’un qui a délibérément voulu porter un coup de poing à l’un, qui a atteint l’autre jusqu’à déplacer son masque à oxygène, l’homme a inhalé de la fumée, un médecin hospitalier a constaté des brûlures aux poumons et à la gorge, sans, heureusement, de conséquences autres.

Du box, Malek B., 36 ans, 18 condamnations à son casier dont 8 pour violences sur les forces de l’ordre, et 11 ans d’injections à effet retard pour l’aider à contenir les effets d’une schizophrénie, raconte les choses de son point de vue. « Depuis que je suis arrivé à Varennes, je demande à être transféré. On me fait la misère tout le temps, j’ai eu des côtes cassées. Ce matin-là, deux autres détenus m’ont menacé en promenade. J’ai pas supporté. Et quand je suis rentré dans ma cellule, ça n’allait pas. Je voulais voir le major pour demander mon transfert, et j’ai mis le feu. J’ai coincé les bords d’un jean dans l’encadrement de la porte, et j’ai pris un briquet. Quand ils sont arrivés, c’était déjà éteint. Ils m’ont dit ‘viens-là, viens-là’, ils m’ont tiré, mis des coups de genoux partout. J’ai mal partout, j’ai un genou enflé, il a saigné. J’avais ouvert la fenêtre pour que je puisse respirer malgré la fumée. Depuis que je suis à Varennes je me fais taper, j’arrête pas de filer des cartouches, et quand je cantine, au bout de deux jours j’ai plus rien. » Malek convient que mettre le feu n’était pas une solution, « je le regrette », mais conteste absolument avoir donné un coup de poing. « Moi à Varennes je suis calme, et c’est pas les surveillants qui m’ont mis la pression, c’est d’autres détenus. »

D’ores et déjà cet incident violent lui a faire perdre 21 jours de réduction de peine. Malek devait sortir demain (on le juge ce lundi 22 janvier), ça reporte sa sortie à mi-février. Aline Saenz-Cobo, vice-procureur, fait une lecture du dossier qui colle à la terrible actualité de l’ensemble des surveillants pénitentiaires. Elle parle de « guet-apens », d’un acte « mûri et réfléchi ». « On peut comprendre beaucoup de choses sur la détention, même quand on est au parquet, mais on ne peut pas faire payer son mal-être au personnel pénitentiaire. » Elle requiert 18 mois de prison avec mandat de dépôt à l’audience, la tête de Malek plonge entre ses mains, il est accablé. 

Maître Marceau, pour le surveillant victime d’un coup, rappelle la situation d’urgence qui s’est déclenchée en un instant ce jeudi-là. « C’est une situation d’intervention très stressante, en milieu clos, dans des cellules exiguës. Quand les surveillants arrivent, le champ visuel est d’autant plus restreint qu’il y a beaucoup de fumée. » Maître Pépin, pour le prévenu, insiste sur la dernière expertise psychiatrique de Malek B., « pensée déstructurée voire incohérente », « ce n’était pas un guet-apens. Il avait encore subi insultes et menaces et il a eu du mal à gérer cette pression ». Elle rappelle que son client avait lui aussi, par la force des choses, inhalé de la fumée, et que le surveillant n’a pas eu d’ITT. « Je me doute bien que la parole des surveillants aura plus de poids que la sienne, mais je vous demande de tenir compte de tous ces éléments. »

Malek B. se trouve en état de récidive légale (une condamnation de 2016). Le tribunal le condamne à 12 mois de prison et décerne mandat de dépôt. Malek B. ne sortira pas en février. Il est, depuis les faits de janvier, détenu au quartier disciplinaire.

FSA