Faits divers
TRIBUNAL DE CHALON - A trois, ils tabassent après une remarque de ne pas fumer près d'une station d'essence à Saint-Rémy
Publié le 26 Mars 2021 à 07h18
« Je ne sais pas pourquoi ça a pris de telles proportions, je n’aurais pas dû leur répondre. »
Monsieur X, 44 ans, s’est fait rouer de coups alors qu’il attendait pour faire le plein à la station service de Saint Rémy, ce mardi 23 mars vers 14h30. Trois jeunes sont dans le box des comparutions immédiates ce jeudi 25 mars. Celui qui a porté le premier coup a 19 ans pile aujourd’hui. Ils sortent de garde à vue, la police les escorte.
Les prévenus sont donc trois. B. et S. sont arrêtés sur place. O. parvient à reprendre le volant, les gendarmes le repèrent, il tente de se soustraire au contrôle et pour cause : il n’a pas de permis de conduite et il est sous l’empire de stupéfiants. Il soutient à l’audience n’avoir aucune addiction et ne fumer que deux ou trois fois chaque semaine, « le week end ». Il a été contrôlé mardi, mais est-il à ce détail près ?
Bagarre qui tourne à trois contre un
En effet leur attitude dans le box frappe par leur calme et leur détachement. Les lascars étaient venus à pied remplir un jerricane et des bouteilles, d’essence. Leur véhicule était en rade pas loin. Au même moment, monsieur X, au volant d’un véhicule professionnel serigraphié SNCF, attendait qu’une place se libère. Les jeunes vont direct à la pompe que visait monsieur X. L’un d’eux téléphonait, monsieur X lui dit qu’on ne téléphone pas dans une station service, ajoute « petit con, barre-toi ».
« C’était ultra violent »
Les jeunes partent au coin du bâtiment, insultent et ricanent, monsieur X n’entend pas tourner les talons, les gosses lui tombent dessus. Visage en sang, coups de pied portés au visage alors qu’il est à terre, blessé aux bras, dans le dos. « C’était ultra violent », a témoigné la gérante de la station service. B. apparaît comme l’auteur principal, les deux autres, S. et O. reconnaissent avoir frappé, mais aussi « pour séparer ». « Donner des coups de pied, pour séparer des chiens qui se battent, je veux bien, mais pour séparer des hommes ? » dit Anne-Lise Peron, substitut du procureur. La victime a 5 jours d’ITT et un arrêt de travail au moins jusqu’au 25 avril.
La présidente confronte les prévenus à leurs actes. B. affirme qu’il n’est pas violent (sic), et qu’à l’avenir il posera plainte. Quand on lui demandera de ne pas téléphoner dans une station service et qu’on le traitera de petit con ? S. : « C’était surtout de l’adrénaline, de l’énervement. » O. : « C’était sous le coup de l’énervement aussi. »
« Il a la tête sur les épaules » versus « je me suis pris la tête avec l’OPJ »
B. fut suivi par la PPJ , fait toujours l’objet d’une mesure, son éducateur est positif- « il a la tête sur les épaules »-, voire « dithyrambique » dira l’avocate. Le jeune homme est marié religieusement mais vit toujours chez sa mère, il a investi « la valeur travail », maître Charrier ne manque pas de le plaider en sa faveur. Il a 5 condamnations (Tribunal pour enfant). Il a tout de même frappé un homme à terre et soutient ne pas être violent. La procureur a tenu compte du tout et a requis 10 mois de prison aménagés en peine de détention à domicile sous surveillance électronique. Anne-Lise Peron l’a confronté à son comportement en garde à vue, le garçon ne s’est pas démonté : « Je me suis pris la tête avec l’OPJ, il était un peu sur les nerfs, mais en même temps je peux comprendre vu son travail. »
« Une gentille errance post infantile »
« Deux mondes se sont rencontrés, dit maître Diry. Un monde ordonné et une gentille errance post infantile. Ils auraient dû se croiser, mais ils se sont affrontés. Des éléments du dossier nous disent que la violence a été partagée, puisque la victime a dit avoir eu en tête d’en découdre et de se battre. Mais le contexte n’est pas le résultat, c’est certain, et chacun est bien à sa place. Ils sont trois et sont très jeunes. » Maître Diry a connu S. au tribunal pour enfant (1 condamnation), et témoigne que depuis il a évolué, il travaille. Il est requis contre son client, S., une peine de 8 mois dont 4 mois sont assortis d’un sursis probatoire de deux ans.
Typiquement un effet de groupe
« C’est typiquement un effet de groupe qui s’est produit, plaide maître Varlet pour O. Les effets physiologiques de l’effet de groupe sont connus et établis. Sa mère et son beau-père sont dans la salle, il vit dans un environnement cadrant et travaille depuis plus d’un an. Donc, 5 mois ferme c’est disproportionné par rapports aux faits qui lui sont reprochés et à sa personnalité. » Le parquet a en effet requis 10 mois dont 5 ferme, et 5 assortis d’un sursis probatoire.
Le tribunal déclare chaque prévenu coupable
Condamne O., 19 ans, à une peine de 7 mois entièrement assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans. Obligations de soins, de travailler, d’indemniser la victime, de passer son permis de conduire, de faire un stage de sécurité routière.
Condamne S., 21 ans, à une peine de 9 mois entièrement assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans. Obligations de travailler, de faire un stage de citoyenneté, d’indemniser la victime.
Condamne B., 19 ans, à une peine de 12 mois dont 6 mois sont assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans. Obligations de travailler, de faire un stage de citoyenneté, d’indemniser la victime. Ordonne l’aménagement ab initio des 6 mois ferme sous la forme d’une détention à domicile sous surveillance électronique.
L’audience tient entre ces deux phrases :
« Avez-vous conscience qu’à trois, vous auriez pu le tuer ? » demandait la présidente aux jeunes gens.
« Allez, au revoir, bon courage pour la suite ! » lance au tribunal le jeune B. en quittant la salle.
Florence Saint-Arroman
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