Chalon sur Saône
50 ans cette année, prêt à rebrancher !
Publié le 14 Mai 2021 à 09h00
Fête d’anniversaire programmée, repoussée, reprogrammée, rien ne décourage la fidèle équipe de l’Arrosoir, lieu prestigieux, scène de jazz mais pas seulement ! Cette ancienne prison qui accueille le public dans l’intimité de sa cave voutée fait résonner dans son antre également les musiques de traverse. Plusieurs événements festifs pour célébrer ses 50 ans seront programmés, découvrez le communiqué de l’Arrosoir, redécouvrez l’histoire de ce lieu atypique et les rendez-vous à ne pas manquer…
Le communiqué :
« L’Arrosoir a cinquante ans ! Dans la liste des lieux de jazz français, les quinquagénaires et plus ne courent pas les rues : le Caveau de la Huchette, à Paris (73 ans) le Hot-Club de Lyon (73 ans), le Jazz Club de Grenoble (60ans) et…et… on n’en voit guère d’autre. Pardon aux ancêtres qu’on aurait oubliés.
En cinquante ans l’Arrosoir a eu plusieurs vies et deux noms. Au milieu des années 90, le Jazz-Club de Chalon a été rebaptisé. Dans l’expression jazz-club, nous n’étions pas gênés par le mot jazz, mais club… Le mot avait l’inconvénient de ses adjectifs les plus collants : restreint, fermé, privé…L’Arrosoir, lui, est un ustensile commun, bon enfant, ouvert des deux bouts, il fait pousser les oreilles en les arrosant de musique, il fait pousser la musique en l’arrosant d’une attentive et chaleureuse présence humaine…
Mais avant les appellations, il y a les gens. D’abord les fondateurs, puis les continuateurs. L’enthousiasme des premiers, la ténacité des seconds; entre eux, un amour partagé des musiques de jazz. Il y eut une relève, et même plusieurs, il y eut l’inévitable et féconde querelle des anciens et des modernes, mais jamais de guerre, et l’on vit même quelques anciens accompagner fraternellement l’envolée des nouveaux.
Dans les années 90, la professionnalisation fut l’apprentissage d’une cohabitation, nouvelle dans l’univers associatif, entre les bénévoles et les salariés successifs. Prendre sa place pour les uns, se restituer pour les autres, une équation subtile, jamais figée et, fort heureusement, jamais définitivement résolue. Parmi toutes les figures de l’Arrosoir, Gilbert Scheid, aujourd’hui disparu, occupe une place toute particulière dans notre mémoire.
Pour rappel, l’Arrosoir est une petite structure professionnelle qui œuvre dans le domaine du jazz et des musiques qui lui sont proches, selon trois modalités : la diffusion de concerts, l’accompagnement des musiciens et l’organisation d’actions culturelles en direction de populations qui ne constituent pas son public habituel. L’Arrosoir prend part activement à tous les réseaux existant sur ce champ d’activité, tant nationaux que régionaux, et noue par ailleurs, depuis longtemps, de fructueux partenariats avec les autres acteurs culturels de Chalon et de sa région.
Aujourd’hui, cinquante ans après sa naissance, cette association parmi les plus dynamiques en France ne compte toujours qu’un seul permanent. Partout ailleurs, les structures équivalentes en termes d’activité comptent désormais, au minimum, deux ou trois salariés, et leur financement local est très nettement supérieur à celui dont bénéficie l’Arrosoir. Cette situation atypique a pris au fil du temps l’allure d’une sorte de malédiction dont les raisons semblent d’une profondeur insondable. Cécité, indifférence, méconnaissance de l’économie des lieux de musiques vivantes ? Le fait est que jamais, ici, à la différence de tant d’endroits, la volonté de favoriser l’essor d’une salle reconnue et incontournable ne s’est manifestée avec force. Assurer sa survie en configuration minimum a paru suffisant.
Dans ces conditions, la vitalité de l’Arrosoir doit beaucoup au courage, à l’entêtement, à la passion de ceux qui le font vivre. Outre les équipes qui s’y sont succédé, les musiciens et le public sont pour beaucoup dans cette longévité. Les premiers ont plus d’une fois démontré leur solidarité et leur attachement. L’Arrosoir, les musiciens y viennent volontiers car ils aiment ce lieu chaleureux, ouvert à leurs musiques, à leurs projets, attentif à leur parcours, entre fidélités anciennes et nouvelles découvertes. Ils savent qu’ils y seront bien accueillis, respectés et décemment payés. Ils amènent ce que les jazz actuels offrent de plus vivant, de plus surprenant, dans une simplicité généreuse qui fait voler en éclat les vieux clichés indécrottables. Le jazz serait indéchiffrable, abscons, élitiste ? Fadaises.
D’ailleurs le public, désormais, le sait bien et il lui a suffi, pour cela, de pousser la porte. Pas un petit cercle, pas des aficionados, non, le public dans son ensemble, dans sa diversité, dans son ignorance de ces musiques méconnues qu’il découvre ici de manière directe, parfois stupéfait, une fois écarté le voile des fausses réputations, dans la proximité avec ceux qui les inventent. Sans lui et sa curiosité, jamais l’Arrosoir n’aurait atteint cet âge.
Voici quelques années, à l’occasion d’un formidable mouvement de générosité en réponse à une énième crise de sous-financement, nous écrivions ceci au public de l’Arrosoir :
« Il y a donc ainsi des personnes pour qui l’existence d’un lieu comme l’Arrosoir, ce qui s’y passe, ce qui s’y vit, est important ; artistiquement important, ou humainement important, ou politiquement important, ou les trois à la fois.
Il y a donc aussi des personnes qui, sans forcément fréquenter assidument l’Arrosoir, sont attachées à ce qu’il symbolise, une petite fabrique d’humanité dont la matière première est la musique, une communauté sans cesse à inventer, une résistance heureuse et chaleureuse au décervelage, qui entraîne chacun de nous vers sa propre intimité comme vers un espace cordialement mitoyen de celui du spectateur voisin.
Alors nous sommes comme toi, ami (e), nous aimons ces moments de grâce : sous la pluie de l’Arrosoir, alors que deux mélodies se frottent et se frôlent, s’éloignent et se rapprochent, on se surprend à échanger des sourires comme d’un jardin à l’autre, en écoutant ensemble éclore ses propres secrets sous la chaleur des cuivres. »
Ces instants là, nous en sommes tous privés depuis trop longtemps. Nous avons un anniversaire à célébrer, Nom d’une pipe ! Et pour ces instants là, en dépit des fatigues et des difficultés, l’Arrosoir est prêt à hisser les voiles pour un second demi-siècle ! »
Communiqué: Communication L’Arrosoir - visuel : Clément Vallery - Mis en ligne par SBR
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