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Adieu l’expo ? Quel avenir pour l’expo consacrée à Renaud après Paris ?
Par Nathalie DUNAND
Publié le 25 Novembre 2021 à 17h16
« Renaud, Putain d’expo » s’est tenue jusqu’au 7 novembre à la Philharmonie de Paris. Le 8, on procédait au démontage. L’hommage – du jamais-vu du vivant d’un artiste – bascule dans les cartons. Son frère David s’est démené pour que vive cette aventure, il tentera tout pour qu’elle voyage à travers le pays jusqu’aux admirateurs de Renaud. Pour nous, il évoque la complexité d’une itinérance.
N. D. : L’aventure de cette expo a connu un succès incroyable et, en même temps, des zones de turbulences, on peut même parler de tsunami, non ?
David Séchan : Oui, ça a été une aventure magnifique et compliquée. L’expo a ouvert ses portes à la Philharmonie de Paris le 16 octobre 2020. Saluée dans les médias, elle a trouvé aussitôt son public. Puis tout a été brutalement stoppé, partout, par le confinement. Après 7 mois d’interruption, elle a redémarré le 20 mai 2021, mais toutes les manifestations de spectacle ont connu la réticence des gens à revenir, et on les comprend. Ce n’est qu’au retour des vacances d’été que le flux des visites a repris un rythme soutenu, avant la clôture, le 7 novembre.
Au total, ce sont environ 50 000 visiteurs qui ont découvert le monde de Renaud sous un jour nouveau. C’est un succès extraordinaire, compte tenu des empêchements de la crise sanitaire. Sans ces complications, si le rythme s’était maintenu, l’expo aurait sans doute attiré près de 100 000 visiteurs.
David, vous étiez là quand on a démonté l’expo. Vous avez assisté à cette forme d’adieu avec la gorge serrée, nous a-t-on rapporté. Qu’avez-vous ressenti ?
David Séchan : De la tristesse. Et une émotion extrême quand j’ai vu détruire tous ces décors, ces vitrines qui abritaient les témoignages de la vie privée de Renaud, de notre enfance, de ses amours, ses amitiés, ses engagements… Tous ces jalons de son immense carrière de chanteur-auteur-compositeur qui retournent au silence des cartons, c’est… eh bien c’est triste, comme toutes les fins de belles histoires.
Au-delà des efforts déployés pendant de longs mois, il y a eu, pour moi, une implication émotionnelle forte. Ça a été une aventure humaine, professionnelle et fraternelle sur laquelle tombait le rideau.
En province, beaucoup d’admirateurs de Renaud se sentent frustrés de ne pas avoir vu l’expo, comme en témoignent les dizaines de milliers de messages sur les réseaux sociaux. Auront-ils la chance de vivre cette aventure dans leur région ?
David Séchan : Je souhaite profondément que l’expo voyage. D’une façon générale, on est trop dans un centralisme parisien : les régions ne profitent pas des grandes expositions parisiennes, qui voyagent peu ou pas, pour des problèmes de coûts. Ne serait-ce que le démontage, stockage puis transport des décors, qui coûte extrêmement cher. Les municipalités des régions n’ont pas le même budget que les grands établissements de la capitale. C’est une des raisons qui fait que je veux tenter de faire voyager l’expo en adaptant les coûts au budget des autres villes.
Par ailleurs, Renaud est très attaché aux régions, on peut dire que c’est un vrai régionaliste : il a toujours défendu la langue dans sa richesse et sa diversité. Dans nombre de ses chansons, il a redonné ses lettres de noblesse aux dialectes régionaux.
Alors, comment rendre l’itinérance réalisable ?
David Séchan : L’expo aurait du mal à voyager sous sa forme actuelle, parce qu’elle engendrerait des coûts trop élevés. Je précise que Renaud ne touche pas d’argent sur cet événement. Nous travaillons donc à une forme plus transportable et à la portée de villes moyennes, sans retirer le cœur ni l’amputer de son essence. Ça, c’est réalisable.
On a remarqué notamment que les visiteurs utilisaient très peu les audioguides. Ce ne sont pas les documents audiovisuels qui intéressaient les gens. Et sans les dispositifs audiovisuels, très onéreux, le budget de l’expo est considérablement réduit.
Ce qu’ils découvrent en revanche, et avec avidité, ce sont toutes ces pièces rares et émouvantes sur son passé (bulletins scolaires, photos de famille, correspondance avec son père, avec François Mitterrand), ses emblèmes (blouson de cuir, mobylette, bandanas), les nombreux manuscrits originaux de ses plus célèbres chansons, ses clips et ses disques d’or, de platine de diamant… Et plein d’autres photos et documents inédits. C’est là le cœur de l’expo.
Notre chance, dans cet adieu qui, je l’espère très fort, n’en est pas un, c’est que tout est prêt : chacune de ces pièces intimes est rentrée dans l’ombre, et attend l’occasion d’être exposée à nouveau.
Est-ce un projet ou un vœu ?
David Séchan : Pour l’instant, c’est un espoir, une tentative. Aux obstacles budgétaires s’ajoute le problème de dates de programmation : la crise sanitaire se traduit par une accumulation de reports de dates, ce qui ne simplifie le planning pour personne.
Mais la réaction des visiteurs de l’expo est un moteur. Beaucoup disaient, en substance : « Je ne savais pas que, Renaud, c’était tout ça ! » : derrière l’œuvre, ils découvraient l’homme, un humaniste « énervé et énervant », militant et sensible, un fils et un père…
Et puis, il faut le dire, j’étais fier et heureux de faire cette expo. C’est important pour moi, c’est un retour sur ma jeunesse, mon rapport fraternel et gémellaire avec Renaud. La redécouverte de toutes les facettes d’un grand artiste. Longtemps, je me suis empêché de vénérer Renaud, parce que je suis son frère, je le regardais autrement. Mais je peux me l’avouer simplement : j’admire l’œuvre et l’artiste.
Nous aussi, on est allé voir l’expo…
Nous aussi, on est allé voir l’expo. Au milieu de ceux qui étaient, comme nous, dans « l’antre du Renard ». Et on en a eu plein les mirettes : les regards agrandis des mômes qui côtoyaient ceux, pleins de plaisir nostalgique, de leurs parents. Comme un héritage qu’on se transmet.
Renaud, le chanteur qui a nourri le cœur de tant d’autres vies que la sienne, tant de générations aussi… ce météore fragile et inaliénable qui a bouleversé non seulement la chanson française, mais le rapport d’un public à son artiste, fait de reconnaissance profonde.
Clin d’œil
Petit clin d’œil à un admirateur anonyme qui écrit : « Croisons les doigts pour que cette expo voyage, même en mob, du Ch’Nord à la Belle de mai, ou en fameux trois-mâts, de la Pointe du Raz aux Îles Sanguinaires. Bref, qu’elle parcourt l’Hexagone. » Les connaisseurs du répertoire du fameux Renard comprendront.
Propos recueillis par Nathalie DUNAND
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Merci à Dim pour l’utilisation des photos. Photo de Une : David Desreumaux.
Un nouvel album de Renaud est annoncé pour mai 2022.
Pour patienter, écoutez son duo avec Bénabar, qui salue en filigrane les complices de soirées intimes et chaleureuses : l’auberge des Corses où il fait bon se retaper le moral ! Ici chez U Stazzu Di Machja
Plus de détails sur la genèse de l’expo : ici
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