Société

L'accès à l'eau, un coût à géométrie variable

L'accès à l'eau, un coût à géométrie variable

Les ménages français consomment en moyenne 120 m3 d'eau par an. Mais en fonction de la localité, le tarif de ce service peut varier du tout au tout. Combien ça coûte ? Quelles aides existent en cas de difficulté ? On fait le point.

Le droit humain fondamental à l'eau, et plus précisément à l'eau potable mais aussi à l'assainissement des eaux usées, est reconnu au niveau international et en France par l'article L.210-1 du Code de l'environnement. Dès lors, « l'usage de l'eau appartient à tous et chaque personne physique, pour son alimentation et son hygiène, a le droit d'accéder à l'eau potable dans des conditions économiquement acceptables par tous ». En effet, si la ressource disponible est gratuite, sa gestion et sa fourniture se paient… et parfois même très cher.

D'après un récent rapport de l'Assemblée nationale, le tarif moyen de l'eau atteignait 4,19 €/m3 en 2020, sur la base d'une consommation annuelle de 120 m3. Cela représente tout de même une facture de 503 € par an, soit 42 € par mois. Et si l'addition est nettement moins élevée dans certaines régions comme PACA (3,66 €/m3), elle bat à l'inverse tous les records dans d'autres et notamment en Guadeloupe (6,39 €/m3). Alors qu'on estime que la facture d'eau ne devrait pas dépasser 2 % des revenus des ménages, la réalité est donc bien différente, comme le dénonce depuis longtemps l'association de défense des consommateurs CLCV (consommation, logement, cadre de vie).
Pour son coordinateur eau et assainissement, Alain Chosson, qui travaille sur ces questions depuis une trentaine d'années, « la structure tarifaire de ce service est un élément clé du droit à l'eau ». Une enquête de 2019 de la CLCV a en effet démontré qu'en moyenne 16 % de la facture acquittée par les Français relevait de l'abonnement, tandis que les taxes et redevances comptaient également pour 16 %. Près d'un tiers du coût de l'eau n'a donc rien à voir avec la consommation des usagers ! Pire, la fourchette d'abonnement varie de 0 € (20 % des collectivités) jusqu'à plus de 156 € par an selon les localités, sachant que ce service public relève des communes et intercommunalités. « Lorsque la part fixe est trop élevée, c'est un obstacle à un accès égal à l'eau pour tous », commente le spécialiste.

 

Certaines initiatives tentent cependant d'alléger ces factures. Depuis 2010, la législation permet ainsi aux communes de calculer le montant correspondant à la consommation réelle des ménages à partir d'un tarif uniforme au mètre cube ou bien sur la base d'un tarif progressif. Cette tarification progressive consiste alors à établir des prix croissants en fonction de seuils de consommation, la première tranche étant facturée de façon très faible, voire gratuite dans de rares cas. Soutenue par la CLCV car permettant un prix plus juste, cette solution ne représentait toutefois que 14 % du panel des factures étudiées par l'association en 2019.


Autre option : appliquer une politique sociale de l'eau reposant sur des conditions de revenus. Lancée en 2013, cette expérimentation était mise en place par près d'une cinquantaine de collectivités territoriales (11 millions de personnes) en 2019, d'après le bilan de l'État. Chèque eau, allocation versée sur le compte bancaire ou tarification sociale modulant la part fixe ou variable du prix, tout dépend ici du choix de la commune. De façon globale, les pouvoirs publics ont évalué le montant de ces aides à 136 € par an et par foyer. Il n'empêche, de l'avis de la CLCV, ces dispositifs pourraient être recentrés sur les usagers les plus précaires si les coûts de préservation de la ressource mais aussi de modernisation des installations ne reposaient pas seulement sur les particuliers.

Julie Polizzi

Des aides ponctuelles

1/ Vous avez des difficultés à gérer vos factures ? Sachez tout d'abord que la loi interdit au distributeur de vous couper l'eau ou de réduire son débit dans l'attente de vos paiements ! Pour régler vos dettes, vous pouvez contacter un travailleur social au sein du CCAS (centre communal d'action sociale) ou d'un Point conseil budget qui se chargera alors de faire une demande d'aide financière auprès du Fonds de solidarité pour le logement (FSL ou FULH selon les départements). Toute personne, propriétaire ou locataire, peut en bénéficier, sous condition de ressources.

2/ Vous avez constaté une hausse anormale de votre facture ? C'est probablement une fuite d'eau qui en est à l'origine ! Dès lors que le distributeur constate une augmentation de consommation de plus du double du volume moyen utilisé au cours des trois dernières années, il a l'obligation de vous en informer au plus vite. Vous avez alors un mois pour faire réparer la canalisation et adresser au service de l'eau une demande de plafonnement de votre facture en y joignant une attestation du réparateur. Depuis 2012, la loi limite en effet le montant de votre facture qui ne pourra dans ce cas pas dépasser le double de votre consommation habituelle.