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TRIBUNAL DE CHALON - Il pensait transporter 90 kg d’herbe de cannabis, mais les douanes en ont pesé par loin de 135 kg, outre 2,7 kg de résine

TRIBUNAL DE CHALON - Il pensait transporter 90 kg d’herbe de cannabis, mais les douanes en ont pesé par loin de 135 kg, outre 2,7 kg de résine

Le chauffeur routier polonais reconnaît donc avoir accepté de faire ce transport, d’Espagne, d’où il remontait à vide, jusqu’en Pologne.

C’était le 4 avril dernier, sur l’aire de Savigny-en-Revermont. Les services douaniers contrôlent un ensemble routier composé d’un tracteur et d’une citerne de quatre cuves. Il est près de minuit. Les agents grimpent sur la citerne, des regards permettent de jeter un œil à l’intérieur des cuves. Les trois premières sont vides, la quatrième héberge des sacs en plastique noir. Dans les sacs, des sachets thermosoudés, dans les sachets de la drogue, dans la cabine du chauffeur, cinq téléphones portables dont quatre lui appartiennent. Le cinquième lui a été confié par le commanditaire qui devait lui permettre d’éviter les coins à contrôle et lui donner l’adresse de la livraison à la fin du trajet.

Côté avertissement c’est raté ou trop bien réussi, allez savoir. Maître Chuiton, venu de Paris, le rappelle : les trafiquants n’hésitent pas à balancer un transporteur de temps en temps. Le tripot social, as usual.

Il ne pensait pas être contrôlé, dit-t-il, ni encourir une peine de prison pour ça

Le prévenu est âgé de 42 ans, il est marié à une infirmière et père de famille. Il est à son compte depuis 2010, et il loue le tracteur comme la remorque (à deux sociétés différentes qui d’ailleurs font réclamer leur matériel par maître Leplomb à l’audience). 
Le plus souvent il assure le transport de matières dangereuses entre la Lituanie et l’Allemagne, mais là, en Espagne il dit s’être trouvé coincé quand on lui a siphonné son carburant et qu’il s’est retrouvé sans moyens et dans la chaleur de fin mars là-bas. 
C’est ainsi, si on l’écoute, qu’il a rencontré un dénommé Lucas, qui lui a proposé de lui payer le plein à la condition qu’il transporte « 90 kg de cannabis. Je devais être payé entre 200 et 250 euros le kg ». Une manne… Il ne pensait pas être contrôlé, ajoute-t-il, ni encourir une peine de prison pour ça.

« Il ne donne pas les explications véritables »

Encore faut-il le croire. Le parquet doute : « C’est un trafiquant, puisque quiconque participe en connaissance de cause, d’une manière ou d’une autre, à un trafic, est considéré comme un trafiquant. Ses explications…. Au-delà de la reconnaissance des faits, il ne donne pas les explications véritables. ‘J’étais fatigué, il faisait chaud, et je n’avais pas pris de douche’ ? Non, il a fait un choix. » La vice-procureur requiert, outre l’amende réclamée par les douanes, la peine de 3 ans de prison avec maintien en détention et une interdiction du territoire français pendant 5 ans.

Un ratio

L’avocat parisien livre une plaidoirie plutôt fine sur le ratio coût/intérêt d’avoir à garder en prison pendant 3 ans un homme qui « a collaboré avec les enquêteurs », « qui ne parle pas français », qui est « dans le bas du spectre » (entendre les petites mains qui tantôt peuvent s’enrichir un peu en participant au transport, tantôt être offertes aux autorités – à noter que la somme donnée par ce prévenu est immensément supérieure à ce que la plupart des chauffeurs pris avec de la drogue, annoncent).

Au moins 400 litres d’essence

« Le vrai trafic, le haut du spectre, joue de la vulnérabilité des transporteurs. Ces gens sont capables de siphonner eux-mêmes un réservoir, pour ensuite pouvoir contraindre. Un réservoir, ici, c’est au moins 400 litres. Et puis, pardon mais la logique qui consiste à taper sur celui qu’on a sous la main sans enquêter sur le haut du spectre, ça ne marche pas. Le laboratoire d’Ecully a demandé une photo du logo qui est sur les sacs trouvés, pour regarder si on peut les rattacher à quelque filière, mais même ça, on ne l’a pas fait ! 
Il était vulnérable à ce moment-là, ça ne justifie pas trois ans. Et en termes d’efficacité, ça n’a aucun sens ! »

Maintien en détention puis ITF

Le tribunal dit le chauffeur routier coupable des 6 infractions (3 du code pénal et les 3 mêmes mais dans le code des douanes : détention, transport et importation de stupéfiants ), le condamne à la peine de 18 mois de prison avec maintien en détention, à la peine complémentaire de 10 ans d’interdiction de paraître sur le territoire français (ITF), et à l’amende douanière de 641 000 euros.

FSA