Faits divers

TRIBUNAL DE CHALON - Peut-on décemment juger comme on cuisine à la plancha ?

TRIBUNAL DE CHALON - Peut-on décemment juger comme on cuisine à la plancha ?

Celui-ci a une trentaine d’années. Il vit pas loin de Louhans, et par quel mystère s’est-il trouvé avec autant d’infractions cumulées, lors d’un contrôle le 23 octobre dernier, alors qu’il est mécanicien de métier ?

 Il doit répondre d’usage de fausse plaque ou fausse inscription apposée sur un véhicule à moteur, de refus d’obtempérer, de conduite en ayant fait usage de substances classées comme stupéfiants, et de conduite d’un véhicule à moteur avec un permis non prorogé.

Ce ne sont pas des infractions nouvelles car il a déjà été condamné pour plusieurs d’entre elles. Son casier judiciaire comporte 8 condamnations dont plusieurs en Suisse où il avait monté une affaire dont il était gérant. Il est revenu vivre vers Louhans, il dit que depuis le contrôle c’est « ma famille qui…. » qui le transporte, si on veut bien le croire.

Déféré sans crier gare 

Il était depuis cette date tranquillement chez lui. C’était sans compter la diligence du parquet qui l’a fait convoquer en gendarmerie ce matin même, lundi 25 novembre. L’homme s’est rendu à la convocation, les gendarmes de Louhans l’ont gardé avec eux et l’ont présenté au procureur de la République qui lui a proposé d’être jugé selon la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), là, tout de suite, au moment du défèrement.

Un dossier, une escorte et un prévenu parachutés en audience sans crier gare non plus

Pourquoi pas ? Mais la peine proposée a paru excessive au prévenu et il l’a refusée. Qu’à cela ne tienne, le procureur le renvoie sur le champ à l’audience de comparution immédiate.
Sauf que, le dossier arrivant en même temps que le prévenu et son escorte (le temps, en plus, que celle-ci s’y retrouve dans les dédales du palais de justice), il est 17 heures et la présidente n’a pas pu, par la force des choses, prendre connaissance du dossier. Le tribunal ordonne donc le renvoi.

Le procureur est pour un placement en détention provisoire

Le procureur requiert le placement de l’homme en détention provisoire : il a déjà été condamné pour des infractions similaires ou identiques, donc ce furent des condamnations sans effet ; il est en état de récidive légale ; il navigue entre la Suisse et la France, il y a donc un risque de soustraction à la justice ; et puis il a, en octobre dernier, refusé d’obtempérer, parce qu’il savait bien qu’il n’était pas en règle, c’est donc de la dissimulation.

« Il serait suicidaire de commettre de nouvelles infractions ou de ne pas se présenter »

Bah, répond maître Grebot, quand les gens fuient les contrôles, c’est bien parce qu’ils ne sont pas en règle et le savent. Sur le reste, l’avocat estime que son client a bien répondu à la convocation de la gendarmerie, il ne s’est pas soustrait ; ensuite « le centre de ses intérêts est dans la région » (sa nouvelle affaire et sa famille). « On peut lui faire confiance. Il serait suicidaire de commettre de nouvelles infractions ou de ne pas se présenter. »

Le tribunal estime ne pas devoir juger comme on cuisine à la plancha

Par quel mystère des fausses plaques et autant d’infractions ? On le saura en janvier 2025 puisque le tribunal estime devoir être en état de juger correctement, et non de juger comme on passe des bouts de viande à la plancha, découvrant un dossier sur l’instant et risquant de mal l’appréhender. Question d’éthique professionnelle, laissée à l’appréciation des différents juges.

Placement sous contrôle judiciaire

Le tribunal ordonne le renvoi du dossier à mi-janvier prochain. Place le prévenu sous contrôle judiciaire : obligation de pointer à la brigade de Louhans, une fois par semaine ; interdiction de sortir du territoire national ; justifier de soins en addictologie ou au moins prouver qu’il a fait les démarches vu les listes d’attente, partout. Il sera dans son intérêt d'apporter deux résultats de deux prises de sang, il est prié de s’y prendre à l’avance. Il sera convoqué par le contrôleur judiciaire, l'AEM.

Le tribunal conclut non sans un grain de sel, histoire que le retour du prévenu chez lui ne soit pas l’occasion de faire à nouveau n’importe quoi, pour fêter ça, par exemple : « Si vous ne savez pas quoi faire pour les fêtes de fin d’année, prenez le volant, consommez de la drogue : il y aura illico une petite place pour vous au centre pénitentiaire. »

FSA