Chalon /autour de Chalon

TRIBUNAL DE CHALON - Condamné en récidive et incarcéré, avant le mandat d’amener qui se profilait

Par Florence SAINT-ARROMAN

Publié le 24 Janvier 2025 à 18h19

TRIBUNAL DE CHALON - Condamné en récidive et incarcéré, avant le mandat d’amener qui se profilait

Il n’est pas poursuivi pour trafic de stupéfiants mais il est, on va le dire comme ça, « dans les stups », parce qu’il a beau plaider sa « conso perso », le matériel installé dans la cave rattachée à l’appartement que loue sa mère, « colore la procédure » comme on dit au tribunal.

 Les faits

Un équipage de police aperçoit, le 20 janvier un peu avant 15 heures, « un individu de grande taille » vêtu de noir, qui parle avec le conducteur « d’un fourgon blanc ». « Ils semblent faire une transaction » : go ! 
On peut supposer que les policiers l’ont reconnu, ce jeune homme : ils connaissent bien leur monde et celui-ci est déjà condamné pour des faits liés aux produits stupéfiants. 
Bref. Dans sa poche, un sachet contenant une matière brunâtre, 300 euros en petites coupures dans sa chambre chez sa maman, et dans la cave, tout le fourbi.

Dans la cave

Sur des étagères, un IPhone, un joint, un cutter, un sachet contenant des morceaux de cannabis. Au fond de la cave, dans un meuble blanc : des sacs d’emballage portant des traces de cannabis, une balance électronique, un sac contenant un opinel porteur de traces de cannabis, un dernier sachet contenant des morceaux de matière brunâtre. Il y a en tout 54.68 grammes de cannabis. Tout appartient au garçon mais c’est pour sa « conso perso ».

Une « conso perso » d’herbe de cannabis, ça reste illégal mais c’est toujours moins grave que le trafic tel que la loi le définit. C’est un peu sur cette base que se déroule l’audience.

Le garçon a déjà travaillé mais il est en récidive pour chaque infraction

Il est né à Chalon sur Saône en février 2002. Il a eu travaillé, y compris chez le fabricant de sandwichs industriels de la région. Il vit chez sa mère, avec son jeune frère. Il perçoit des allocations de retour à l’emploi. Ses relevés bancaires racontent qu’il aime les vêtements dits de marque, comme d’autres couches de la population. Marques sociales qui s’achètent, comme la société industrielle et capitaliste le promeut. Il dit participer à la vie du foyer un peu chaque mois, mais du coup il lui reste pas mal pour lui. En résumé : ce qui ressort de son train de vie tel que les opérations bancaires le retracent, n’est pas franchement significatif.

A son casier, deux condamnations : à un stage de citoyenneté en 2022 pour vol en réunion, et à 12 mois de prison dont 6 mois sont assortis d’un sursis probatoire en avril 2024, pour usage, détention, acquisition de produits stupéfiants et refus de donner le code d’accès au contenu de son IPhone. Il est aujourd’hui jugé pour exactement les mêmes préventions.

« Dans quel milieu vous évoluez, monsieur ? »

Les 6 mois ferme d’avril dernier ont été aménagés en détention à domicile sous surveillance électronique (DDSE). Il a une obligation de soins : il a raté l’unique rendez-vous qu’il avait pris. Pas de démarche de sevrage, donc. « J’ai été bête. J’étais dans mon coin, je fumais, j’ai pas pensé aux conséquences. » La présidente lui renvoie que ça lui vaut d’être jugé en comparution immédiate en état de récidive légale, soit un peu le pire de la correctionnelle. 
Il n’a pas donné son code de déverrouillage du téléphone. Pourquoi ? « Parce qu’il y a des informations gênantes pour d’autres, dedans. – Ah ? Mais, dans quel milieu vous évoluez, monsieur ? »

Une juge assesseur intervient : « Ce que vous dites n’est pas cohérent. » 
- il n’a pas fait le stage de citoyenneté auquel il fut pourtant condamné,
- il bénéficie ensuite d’une « mesure de confiance » (le port d’un bracelet) mais « vous continuez à commettre les mêmes délits ».

« Un mandat d’amener était prévu »

Le rapport du juge de l’application des peines dit que le prévenu a déclenché plusieurs alarmes du bracelet, dont l’une « pendant près de 5 heures » et a débranché une fois le dispositif qui chez sa mère le lie à l’autorité publique. Il a fait plusieurs sorties en soirée, courtes et répétées. Il ne respecte aucune de ses obligations. Le 20 décembre dernier il a été convoqué pour un rappel de ses obligations. Quand le juge lui demande de s’expliquer sur ses sorties non autorisées, il répond : « Je ne sais pas. »

« Un mandat d’amener était prévu prochainement, monsieur, pour révoquer la DDSE » dit encore la juge. Ce jeune homme allait donc être incarcéré, faute d’avoir investi l’aménagement de peine pour travailler à passer à autre chose. 
La présidente réagit : « Vous avez été convoqué en décembre pour un rappel de vos obligations et en janvier vous continuez à ne pas les respecter ? Vous vous croyez plus fort que la justice, monsieur. »

La logique pénale 

En récidive pour exactement les mêmes délits, alors que « sous bracelet et en sursis probatoire » ? Le procureur requiert une peine de 14 mois de prison avec maintien en détention et la confiscation des scellés (l’argent) « qui servent à acheter des stupéfiants ».

« On n’est pas dans le cadre d’un trafic de stupéfiants » rappelle maître Andali. L’avocate plaide le jeune âge de son client, sa reconnaissance des faits, et « le choc carcéral ». « C’est encore un gamin. Il a pris ça à la légère mais depuis 3 jours il est en prison, et c’est la première fois. Il cherche sa voie, il faut lui envoyer le message que tout n’est pas perdu. »

14 mois ferme, maintien en détention

Le tribunal envoie plutôt le message qu’au bras de fer « c’est la société qui gagne » - comme le disait un des juges chalonnais il y a quelques années - (même si l’actualité à Besançon, par exemple, dit bien que c’est le fruit d’un combat face à des forces armées et sans le moindre scrupule, dans un milieu sans foi ni loi et qui ne connaît, justement, que la mal nommée « loi du plus fort »).

Le tribunal dit le prévenu coupable et le condamne à la peine de 14 mois de prison avec maintien en détention. Le sursis probatoire en cours reprendra à sa sortie.

FSA