Crissey

TRIBUNAL DE CHALON - Un garage en carafe et un squat en bonne forme à Crissey

Par Florence SAINT-ARROMAN

Publié le 28 Janvier 2025 à 08h03

TRIBUNAL DE CHALON - Un garage en carafe et un squat en bonne forme à Crissey

« J’ai squatté un bien à lui. Je ne savais pas où dormir. » Le prévenu résume ainsi ce qui le conduit à la barre du tribunal. Placé sous contrôle judiciaire le 21 décembre dernier, l’homme est jugé ce 27 janvier.

 Ce dossier, exposé le plus clairement du monde par la présidente, est un poil complexe parce qu’il a un versant qui relève du litige commercial et un versant qui relève du pénal, seul ce point intéresse le tribunal correctionnel.

Le contexte et les faits

Soit le propriétaire d’un bâtiment à Crissey, bâtiment divisé en quatre lots qu’il loue. La gestion en est confiée à une société dont le gérant porte plainte en premier : dans cette rue à Crissey, le locataire - depuis 2020 - d’un des lots, occupe une superficie supérieure à celle prévue par le bail. De quelle façon ? Il a investi un local supplémentaire (local libéré il y a peu par un organisme de formation et destiné à accueillir un restaurant qui a vu son installation retardée de plusieurs mois, à cause de cette histoire) et en a changé la serrure. Le propriétaire dépose plainte à son tour.

Propriétaire et locataire « sont défavorablement connus des services ». Les gendarmes de Châtenoy-le-Royal en savent quelque chose, plusieurs fois sollicités dans le cadre de cette guerre que se livrent les deux hommes.

Un garage en carafe et un squat en bonne forme

Le locataire avait installé un garage à cet endroit et son affaire, dit-il au tribunal, marchait « bien », sauf que lorsque les gendarmes y sont allés, ils ont trouvé porte close et personne sur place. L’affaire ne marche plus du tout. 
Dans le local connexe qu’il s’est attribué, il avait installé un matelas et un radiateur. Certes il n’avait pas ou plus, de logement, mais ce qui est fou, c’est son assurance à revendiquer son droit : dès lors qu’il squatte depuis 48 heures, alors « c’est chez moi ». Et si le propriétaire veut récupérer son bien, il n’a qu’à engager une procédure « longue et difficile ».

« Il n’a jamais payé le moindre loyer »

A la base, dit-il : l’absence de compteur électrique donc d’électricité pour son garage. « Faux » répond le bâtonnier Seriot qui assiste le propriétaire lésé : « Il y a un compteur principal pour tout le bâtiment et quatre sous compteurs pour les locaux, afin que chacun paie ce qu’il a consommé. C’est lui qui a fait disparaître le compteur qui lui était attribué. Et il n’a jamais payé le moindre loyer ! »

« On ne peut plus me faire sortir d’ici, car c’est chez moi »

Il y a une autre base de départ (pour dire que ce dossier est envenimé par l’attitude du prévenu au moins) : une erreur matérielle sur le bail sur le nombre de m2. La surface écrite ne correspond pas à la surface louée. Au lieu de faire rectifier le bail, le prévenu s’attribue une annexe et s’y installe. Il y fait ouvrir l’électricité à son nom (Enedis fut interrogé sur ce point). Et, sans vergogne, déclare aux gendarmes : « On ne peut plus me faire sortir d’ici, car c’est chez moi. »

Un casier fort de 8 condamnations

L’homme a un casier judiciaire pour des faits vieux de 15 ans, mais aussi des faits plus récents, de tromperies sur la marchandise. Il a fait appel de la dernière condamnation. 
Il est de nationalité algérienne. Agé de 36 ans il est célibataire, il a un fils. Il a aussi un titre de séjour en règle. Plus jeune, il avait l’habitude de donner des identités fantaisistes. Il est actuellement mis en examen pour travail dissimulé et recel de biens. Il n’est pas à l’aise pour lire et écrire en français.

« Floue »

« Votre situation financière est floue » observe la présidente. Le prévenu s’en défend : quand il se sert sur le compte de la société, « tout est noté dans la compta ». Et il insiste : « On nous a empêché de travailler, car sans électricité on ne peut pas. »
Le procureur requiert 6 mois de prison avec sursis et l’interdiction de mettre les pieds dans ce local.

Des faits « pas sympas mais pas très graves »

Maître Andali plaide l’attitude de son client devant le tribunal : il s’est excusé, il demande « pardon ». L’avocate demande au tribunal « d’entendre ses excuses » et de relativiser les faits d’occupation du bâtiment, « pas sympa, mais pas très graves ». 
« J’avoue que j’ai un peu dépassé les limites » conclut le prévenu.

4 mois de prison avec sursis 

Le tribunal le dit coupable de s’être introduit frauduleusement dans ce local et de s’y être maintenu. Le condamne à la peine de 4 mois de prison avec sursis simple. Il a l’interdiction de paraître à ce local. Il devra faire un stage de citoyenneté (300 euros d’amende si jamais il ne le fait pas). Le tribunal ordonne la restitution des clés au propriétaire. 
« Peu importe les différends qui vous opposent à monsieur X, vous devez recourir à des moyens légaux pour régler les problèmes. »

FSA