Bresse Chalonnaise

Vols de boulangerie : il avait besoin d’argent pour s’acheter de l’alcool

Par Florence SAINT-ARROMAN

Publié le 21 Février 2025 à 15h18

Vols de boulangerie : il avait besoin d’argent pour s’acheter de l’alcool

« C’était pas moi en fait. J’étais drogué, j’avais trop bu, et la voix dans ma tête me disait de faire des choses sinon ça me fera du mal. » c’est ainsi que le prévenu justifie d’avoir volé une boulangerie et tenté de voler une autre, à Louhans.

 C’est une explication qui sort spontanément mais il en a une autre : il n’avait plus d’argent, et il recherchait de l’alcool. C’est ainsi que dans la nuit du 26 au 27 septembre dernier, les gendarmes l’interrompent alors qu’il essaie de faire céder la porte d’une boulangerie, à Louhans où il vit, à grands coups de pied. L’homme est placé en garde à vue, en ressort avec une convocation pour être jugé mais voilà, il recommence le 1er novembre.

Il s’en prend à une autre boulangerie, toujours à Louhans. Cette fois-ci il détruit la porte vitrée coulissante d’une boulangerie, pique 300 euros dans la caisse selon le gérant. 
Sur les images de vidéosurveillance du magasin, on le voit bien et, de surcroît, il a récemment été entendu par les gendarmes... Il est interpellé, placé en garde à vue, puis en détention provisoire deux jours plus tard.

Il est jugé ce 20 février, le temps qu’un médecin psychiatre le rencontre (l’homme vit sous le régime de la curatelle) et rende son rapport d’expertise. Le prévenu n’est pas pénible du tout, il reconnaît tout, il parle des toxiques qui dominent ses jours et ses nuits, cocaïne et alcool. 

Son histoire, sous l’angle des évènements pénibles voire très difficiles

Le président ne tait rien de la succession d’événements qui ont marqué la vie du prévenu. Né à Mâcon en 1987, il est placé entre ses 8 et 9 ans parce que ses deux parents ont été incarcérés, il a pu vivre chez un oncle ensuite, mais il arrête d’aller à l’école alors qu’il est en CM2. « On voyageait beaucoup, j’ai fait par correspondance. » Il ne sait ni lire, ni écrire. Puis, dans la vingtaine, il a un grave accident de voiture. Il fut jugé et condamné pour blessures involontaires (il avait bu). Il a lui-même été lourdement blessé. Son corps compte avec des broches et des plaques. 
Moins de 10 ans plus tard, son père disparaît dans un accident, « j’ai fait une grosse dépression » dit le fils, du box, et il devient accro à la cocaïne. 

Pas d’altération du discernement, pour le médecin psychiatre

Vu sous cet angle, rien de marrant. L’expertise psychiatrique n’a rien de marrant non plus, qui conclut à l’absence de pathologies psychiatriques et à l’absence d’altération du discernement. Somme toute le médecin répond à une mission qui lui est confiée. Sa position de psychiatre, en résumé : quand on entend des voix, c’est tout le temps. Si c’est de temps en temps, ça ne vaut pas pathologie psychiatrique -soit -, mais surtout ça n’entraîne pas l’abolition du discernement. 

Le prévenu constate une amélioration de son état général en prison

Le procureur emboîte le pas à l’expert et requiert une peine de 14 mois de prison dont 6 mois sont assortis d’un sursis probatoire de 2 ans, avec maintien en détention pour la partie ferme. Le casier judiciaire du prévenu compte 3 condamnations (l’accident de voiture, puis des vols).
A noter qu’en prison, le prévenu prend « une pilule bleue » et constate une amélioration de son état général, il a demandé aussi son transfert à Bourg-en-Bresse pour être plus proche de sa famille, et il a demandé à aller « à l’école » pour y apprendre à lire et à écrire. Il n’a pas eu de parloir et en souffre mais ne se plaint pas de quoi que ce soit. Cet homme n’est pas rétif.

Ces voix ? « Ça me fait faire des crises, ça me fait me mettre des coups de poing dans le ventre. » 

Son avocate prend cette histoire de « voix entendues » au sérieux. Elle interroge le prévenu : que lui disent-elles, ces voix, ou cette voix ? L’homme répond : « ça me fait faire des crises, ça me fait me mettre des coups de poing dans le ventre. » Mais il n’aime pas trop s’étendre sur ses difficultés, d’une manière générale.

Dans ces conditions, maître Chavance rappelle au tribunal qu’il n’est pas lié par l’expertise psychiatrique. « On voit bien qu’on peut discuter avec monsieur, mais l’existence de ces voix qui peuvent le pousser à se faire du mal à lui-même me fait douter » (du parfait discernement de son client, ndla). »
Le prévenu a la parole, « pour ajouter quelque chose pour sa défense » lui explique le président. « Non ça va aller » répond sobrement le prévenu au teint pâle et aux traits tirés.

8 mois ferme puis un sursis probatoire pendant 2 ans

Le tribunal le dit coupable de la tentative de vol et du vol, le condamne à la peine de 14 mois de prison dont 6 mois sont assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans, avec obligations de soins en addictologie et en psychiatrie, de payer le droit fixe de procédure, d’indemniser la partie civile, et de travailler. 
Le tribunal ordonne le maintien en détention pour la partie ferme (du moins son reliquat puisqu’il est en prison depuis le 3 novembre dernier).

« On vous invite à travailler, dans la limite de vos moyens physiques, bien sûr. Vous semblez motivé pour apprendre à lire et à écrire, on vous encourage à le faire. Tout ça peut vous aider à vous éloigner de vos dépendances. »

FSA