Société

Votre banque peut-elle refuser de vous rembourser en cas de fraude ?

Votre banque peut-elle refuser de vous rembourser en cas de fraude ?

Alors que les arnaques en ligne sont légion, la législation protège les consommateurs en imposant aux banques de rembourser les opérations frauduleuses… du moins lorsque la victime n'est pas en tort ! On vous explique les contours de cette exception qui peut vous coûter cher.

 Hameçonnage (ou phishing en anglais), piratage de compte, arnaque au faux support technique, logiciels malveillants du type rançongiciel ou encore vol des données sont autant de menaces qui nous guettent constamment. Heureusement, la loi assure aux consommateurs d'être remboursés des sommes indûment débitées… sous certaines limites.


UNE OPÉRATION NON AUTORISÉE
Catastrophe : 300 € de paiements ont été effectués sur votre compte bancaire sans que vous en soyez l'auteur ! Vous êtes assurément victime d'une arnaque à la carte bancaire. Dans ce cas de figure, l'article L133-18 du Code monétaire et financier vous protège : « En cas d'opération de paiement non autorisée signalée par l'utilisateur, le prestataire de services de paiement rembourse le montant de l'opération non autorisée immédiatement après avoir pris connaissance de l'opération ou après en avoir été informé, et en tout état de cause au plus tard à la fin du premier jour ouvrable suivant. » La loi précise que les éventuels agios qui ont pu découler de cette fraude en vous mettant à découvert sont également restitués. 


Pour récupérer votre argent, vous ne devez donc pas avoir autorisé l'opération, ce qui exclut toutes les situations où vous avez volontairement payé avant de découvrir qu'il s'agissait d'une arnaque.


GARE À L'ORDRE DE VIREMENT
De même, mieux vaut ne pas vous tromper dans l'ordre de paiement puisque selon l'article L. 133-21 du Code monétaire « si l'identifiant unique fourni par l'utilisateur est inexact, le prestataire de services de paiement n'est pas responsable de la mauvaise exécution ou de la non-exécution de l'opération de paiement ». Ainsi, un couple qui souhaitait acheter une voiture a envoyé à sa banque l'IBAN du vendeur par e-mail pour pouvoir effectuer le virement. Sauf que la messagerie électronique des clients avait été piratée par un escroc qui a remplacé cet identifiant unique par le sien pour recevoir les fonds. Or, comme le paiement litigieux a été exécuté conformément à l'IBAN fourni par le couple, la Cour de cassation a donné raison à la banque qui refusait le remboursement dans un arrêt du 15 janvier 2025.


LA NÉGLIGENCE SANCTIONNÉE
Dès lors qu'un paiement frauduleux a été réalisé à la suite du vol ou de la perte de vos moyens de paiement (CB ou chéquier), votre établissement bancaire peut laisser à votre charge jusqu'à 50 € maximum de pertes financières en guise de pénalités pour ne pas avoir fait opposition assez vite (article L133-19).


Plus encore, le prestataire pourra refuser tout remboursement s'il parvient à prouver votre « négligence grave », le motif le plus souvent invoqué ! En pratique, la banque doit ici démontrer le caractère grossier de l'arnaque dont vous avez été victime. Cela peut être le cas si vous avez par exemple cliqué dans un e-mail « manifestement trompeur » (adresse fantaisiste, texte truffé de fautes, en langue étrangère, etc.) ou subi un phishing « raisonnablement identifiable ». Ainsi, dans un autre arrêt du 15 janvier 2025, la Cour de cassation a donné tort à deux entreprises dont le comptable a suivi un e-mail douteux, ce qui a permis à un logiciel espion de transférer ses données et de réaliser pour 498 266,50 € de virements bancaires. Face à cette négligence manifeste, les juges ont estimé que la banque n'avait pas à rembourser.


Mais attention, le fait de trop tarder pour faire opposition à votre carte bancaire alors que vous avez constaté des paiements frauduleux peut aussi être considéré comme une négligence grave !


J.P.


RÉAGIR VITE ET BIEN
Dès lors que vous repérez des paiements frauduleux, faites immédiatement opposition à votre CB ! Épluchez vos relevés pour déterminer depuis quand le malfaiteur puise dans vos deniers et portez plainte, un prérequis imposé par la majorité des banques. Si vous avez toujours votre carte bancaire, signalez la fraude sur le téléservice Perceval via Masecurite.interieur.gouv.fr. 
La loi vous donne 13 mois à partir du débit frauduleux pour demander le remboursement. Si votre agence tarde à réagir, rappelez-lui que des intérêts de retard s'appliquent ! En 2023, la Banque de France a en outre précisé qu'en l'absence d'authentification forte, la restitution des fonds doit être systématique et immédiate. Lorsque cette procédure de sécurité a été utilisée pour payer, l'établissement doit tout de même instruire le dossier sous 30 jours et apporter des éléments de preuve pour justifier son refus.
En cas de litige, vous pouvez saisir le médiateur bancaire (gratuit) et vous faire aider par une association de défense des consommateurs.